Il y a bien des manières de raconter l’histoire d’un pays aux non-initiés, et Slah Eddine Ayachi a choisi la meilleure de toutes. En effet, dans les trois petits ouvrages que cet historien vient de publier aux éditions IRIS, il retrace l’histoire de la Carthage punique et de la civilisation carthaginoise et livre aux lecteurs un compendium sous forme de trilogie : Histoire de la Tunisie (illustrée), 1ère partie : Elyssa, de la Préhistoire à 814 av. J.-C. ; Histoire de la Tunisie (illustrée), 2e partie : Carthage, de 814 à 264 av. J.-C.; et Histoire de la Tunisie (illustrée), 3e partie : Hannibal, de 264 à 146 av. J.-C. Nous présentons cette belle somme dans trois articles successifs.
Par Mohamed Sadok Lejri *
Ainsi, Slah Eddine Ayachi offre, en trois opuscules fort instructifs et réunis sous le titre de Histoire de la Tunisie (illustrée), un large panorama de l’histoire et de la culture de la civilisation carthaginoise : origines du peuple carthaginois, société, organisation sociale et politique, vie quotidienne, économie et histoire, croyances et religions…
Trois romans richement illustrés
Ces petits livres publiés par les éditions IRIS sont disponibles dans les deux langues, à savoir en français et en arabe, et se lisent comme des romans, avec les batailles auxquelles les Carthaginois ont pris part, les intrigues qui ont bouleversé le cours de l’histoire et les personnages d’exception qui trônent au Panthéon de la postérité.
Richement illustrés et contenant des cartes instructives et bien élaborées, ces livres sont essentiellement destinés aux enfants qui, en les lisant, pourraient se découvrir une passion pour Carthage, une vocation pour l’histoire antique. Ils sont également destinés aux adultes qui, toute leur vie durant, ont entendu parler de Carthage, de Elyssa, des guerres puniques, de Hannibal, d’Hamilcar, de Hasdrubal, sans jamais avoir eu la possibilité de s’immerger complètement dans l’histoire de la Carthage punique.
En historien pédagogue, concis et infiniment rigoureux, Slah Eddine Ayachi offre aux lecteurs de tout âge trois ouvrages de vulgarisation. En effet, dans cette trilogie conçue à des fins de vulgarisation, les faits historiques se succèdent en toute fluidité, les traits de notre histoire sont bien enchâssés et le tout est enveloppé dans une agréable narration. Les faits historiques sont relatés dans un style à la fois riche et concis, dans un français aisé, élégant et intelligible pour tout lecteur. Et il en est de même de la version arabe.
Outre les mots et les passages importants qui ont été mis en gras par l’auteur par souci pédagogique, les trois opuscules sont enrichis de mentions explicatives et indispensables à une meilleure compréhension du texte. Et c’est une chose qui a beaucoup plu aux premiers lecteurs de cette trilogie !
Avec ces trois opuscules réunis sous la rubrique Histoire de la Tunisie (illustrée), les éditions IRIS viennent de lancer une nouvelle collection et comptent nous faire traverser les principales époques de l’histoire de Tunisie.
Slah Eddine Ayachi est né à Sousse en 1950. Après des études secondaires à Sfax, il poursuit ses études supérieures en histoire, en droit et en sciences politiques à la Sorbonne et au Panthéon.
De retour en Tunisie, il crée une société de publicité, de communication et de création artistique, Elyssa Création, une société de production de films, Hannibal Films, une imprimerie graphique, Imprimerie Graphique du Centre – IRIS, et, pour finir, une maison d’édition, IRIS, destinée à la jeunesse pour la découverte du patrimoine historique et culturel tunisien.
Il est le co-auteur du livre encyclopédique Si Sousse m’était contée et auteur de nombre de contes arabo-maghrébins ayant pour objectif de faire découvrir aux jeunes et aux moins jeunes la culture et l’imaginaire traditionnels.
Premier tome : Elyssa, de la Préhistoire à 814 av. J.-C.
Les premières pages de cet opuscule** qui ouvre une collection dédiée à l’histoire de la Tunisie sont consacrées à la Préhistoire. L’historien situe dans le temps, sur une frise chronologique, quelques repères jalonnant l’histoire de l’espèce humaine et formule des définitions courtes et pertinentes de notions aussi essentielles que «préhistoire», «paléolithique», «néolithique» et «protohistoire». Il livre ensuite une synthèse des recherches et découvertes dans le domaine de la préhistoire en Tunisie. Il en dresse un tableau récapitulatif : paléolithique, néolithique et protohistoire.
L’auteur enchaîne avec un condensé éclairant sur les origines ethniques et linguistiques des Berbères, avant d’attaquer le Croissant fertile, soit cette région disposée en arc de cercle allant de l’Égypte au Golfe Persique en longeant la côte méditerranéenne, puis en suivant les vallées des deux fleuves de Mésopotamie, en l’occurrence le Tigre et l’Euphrate. Ce passage est un avant-propos bien utile à ce qui s’ensuit, la civilisation phénicienne étant l’une des civilisations anciennes du croissant fertile.
L’historien passe ensuite à la civilisation phénicienne. Il explique que, dès le troisième millénaire, le peuple phénicien apparaît orienté vers le commerce maritime. En effet, il était en relation avec l’Égypte et la Mésopotamie. L’auteur explique, en termes simples et aisément compréhensibles pour le commun des lecteurs, que les Phéniciens étaient organisés en cités-Etats ayant chacune son roi et ses dieux (Baal, Melkart et Astarté), mais qu’ils étaient unis par la civilisation.
Les Phéniciens furent de «grands navigateurs» (p. 16), les commerçants les plus actifs de la Méditerranée. Ils ont fondé des colonies, notamment «à Chypre, en Sicile, en Sardaigne et dans la Péninsule Ibérique et en Afrique du Nord» (p. 17). Les Phéniciens, ce peuple d’origine sémite, disposaient d’importantes flottes qui jouèrent un rôle capital dans la défense contre les ennemis.
Les Phéniciens comptaient une main-d’œuvre qualifiée et étaient d’«habiles artisans et commerçants» (pp. 18-20). L’alphabet est inventé par les Phéniciens en 1300 avant J.-C. Même si cette thèse est discutée, il n’en reste pas moins que le principe d’une écriture alphabétique est attesté en Phénicie. L’auteur explique succinctement l’alphabet phénicien en précisant qu’il sera propagé dans le monde méditerranéen et que les Phéniciens le transmettront aux Grecs notamment. Tout ce génie conjugué à d’autres précellences leur ont permis de connaître une longue période de prospérité.
Après avoir consacré une page à la fondation d’Utique et d’Hadrim, l’auteur raconte l’histoire de la légendaire princesse de Tyr qui s’enfuit de Phénicie pour accoster «au nord de la côte méditerranéenne d’Afrique du Nord (l’actuelle Tunisie) entre les villes d’Utique et d’Hadrim (Sousse)» (p. 23), avant de fonder Carthage, Kart Hadash (ville nouvelle), autour de la citadelle de Byrsa. La dernière partie de ce premier opuscule est consacrée à la fin tragique d’Elyssa.
Ayachi Slah Eddine, Baâziz Ameur, Si Sousse m’était contée : mémoire d’une ville de 3000 ans, Sousse, éditions IRIS, 2017.
(A suivre).
* Universitaire.
** Elyssa, de la Préhistoire à 814 av. J.-C.; collection Histoire de la Tunisie; Sousse; éditions IRIS, 2021, 28 pages, 8 dinars.
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