La Libye emboîtera-t-elle le pas à l’Egypte, la Jordanie, et, plus récemment, les pays du Golfe et le Maroc, et précèdera-t-elle à la normalisation de ses relations avec Israël ? Rien n’est encore sûr à ce sujet, mais, depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi, les contacts entre les responsables libyens et israéliens se multiplient discrètement.
Par Imed Bahri
Le Premier ministre libyen Abdel Hamid Dbeibah, qui est aussi candidat à l’élection présidentielle reportée, a récemment visité Amman pour rencontrer le directeur du Mossad David Barnea et discuter avec lui des modalités de normalisation des relations et de la coopération en matière de sécurité entre la Libye et Israël.
C’est ce qu’ont rapporté, mercredi 12 décembre 2022, les médias saoudiens et libyens, en rappelant que cette réunion a été précédé par une visite très médiatisée de Dbeibah au Maroc, pays maghrébin qui avait renoué récemment ses relations diplomatiques avec l’Etat hébreu et se montre très actif sur ce front de la normalisation israélo-arabe.
Saddam Haftar enjambe la ligne rouge
Cette information a été reprise, jeudi 13 janvier, par le journal israélien Jerusalem Post, qui a ajouté que le bureau de Dbeibah a nié que ladite réunion ait eu lieu. Démenti de convenance pour préserver les chances du candidat à la prochaine présidentielle ? On peut le penser, mais là n’est pas la question. Car la question de la normalisation avec l’Etat hébreu n’est plus vraiment taboue dans le monde arabe, y compris en Libye. Elle ne l’est encore que pour quelques nationalistes arabes et gauchistes attardés en Tunisie.
En novembre, Haaretz, un autre journal israélien, a rapporté que Saddam Haftar, fils du seigneur de guerre libyen, le général Khalifa Haftar, s’était envolé pour l’aéroport Ben Gourion pour des réunions avec des responsables israéliens concernant une éventuelle normalisation.
Outre que la réunion n’a jamais été officiellement confirmée, en supposant qu’elle ait réellement eu lieu, on ne sait pas avec qui Haftar fils a discuté. Et aucun responsable ou journal israélien ne l’a confirmée. Mais là n’est pas, non plus, car la normalisation entre Tripoli et Tel Aviv est une question de temps et d’opportunité.
«D’une part, le département Tevel du Mossad aurait eu des contacts avec divers responsables libyens au fil des ans. D’autre part, l’ancien chef du Conseil de sécurité nationale Meir Ben-Shabbat et son messager, connu uniquement sous le nom de « Maoz », auraient également eu de tels contacts, et leur traitement du dossier a été transmis à l’ancien responsable du Shin Bet, Nimrod Gez», ajoute Jerusalem Post.
Pour autant, le journal israélien ne croit pas pouvoir confirmer que les responsables libyens voudraient procéder à une normalisation substantielle des relations de leur pays avec Israël, eu égard l’instabilité politique toujours en vigueur dans le pays maghrébin et rien n’indique que les divers groupes belligérants seront en mesure de se mettre d’accord ou de modifier des décennies de relations officiellement heurtées avec l’État juif.
La Tunisie et l’Algérie jouent aux intransigeants
Quoi qu’il en soit, la Tunisie – qui avait noué des relations avec l’Etat hébreu depuis le milieu des années 1990 avant de les rompre au lendemain de l’Intifada palestinienne – et l’Algérie sont aujourd’hui les seuls pays d’Afrique du Nord qui rejettent encore tapageusement toute forme de relation avec l’Etat hébreu. Et les présidents Kaïs Saïed et Abdelmadjid Tebboune semblent sur la même longueur d’onde à ce sujet et ne ratent aucune occasion pour faire de la surenchère en matière d’hostilité au sionisme.
Jusqu’à quand ces deux pays vont-ils pouvoir tenir cette ligne intransigeante, eu égard surtout leurs difficultés intérieures et l’isolement international de leurs pays respectifs ? Les paris sont ouverts…
Donnez votre avis