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L’économie tunisienne dans le cercle vicieux de ses carences

Centre-ville de Tunis.

Pour n’avoir pas engagé à temps les réformes structurelles dont son économie, en fin de cycle, avait besoin, la Tunisie se retrouve aujourd’hui dans une situation où elle doit engager des réformes complexes et douloureuses, qui plus est, dans une situation politique, économique, financière et sociale souvent qualifiée de catastrophique par les observateurs et les analystes. Situation que complique encore un contexte mondial des plus difficiles avec les impacts conjugués de la guerre en Ukraine.

Par Amine Ben Gamra *

Plus de 60% de la dette extérieure de la Tunisie est libellée en devises. Le total des dettes de l’Etat s’élèvent à 19 983 millions de dinars tunisiens (12 652 MTND de dettes extérieures et 7 331 MTND de dettes intérieures). Plus le dinar tunisien (DT) s’affaiblit, plus la dette augmente.

Le cercle vicieux de l’endettement et de l’inflation

Le cercle vicieux de l’inflation croissante alimentant un dinar plus faible a un impact sur le niveau de la dette.

L’absence d’action rapide accentuerait la pression sur la Banque centrale de Tunisie (BCT), car la combinaison de taux d’intérêt élevés, d’une faible croissance du PIB, d’un taux de chômage élevé et d’une dette publique croissante est insoutenable.

D’où l’impatience exprimée récemment par la BCT face à la lenteur des négociations avec le Fonds monétaire international (FMI), dont la Tunisie attend un nouvel emprunt qu’elle espère à hauteur de 4 milliards de dollars.

Par ailleurs, l’Union Européenne (UE) et la France, partenaires commerciaux essentiels et sources de nombreux investissements industriels en Tunisie, sont eux-mêmes désemparés. Ils sont à la recherche des financements nécessaires pour faire face aux impacts de la guerre en Ukraine. Il s’agit tout d’abord de réduire la dépendance européenne vis-à-vis du gaz et du pétrole russes, estimés à respectivement 40% et 25% de leurs ressources. Aussi, les Etats, qui avaient globalement réduit leurs dépenses en matière de défense après la chute du mur de Berlin, en 1989, vont aussi devoir rattraper leur retard dans ce domaine et moderniser leur armée à marche forcée. Sur l’ensemble du Vieux Continent, les budgets consacrés à la défense devraient augmenter en moyenne de 25%.

De graves turbulences en perspective

Dans ces conditions, les turbulences en Tunisie, un pays qui ne parvient pas à se réformer et qui tombe dans une pauvreté encore plus grande, et dans les autres pays de l’Afrique du Nord aux prises avec des problèmes similaires, ne feraient qu’accélérer le rétrécissement stratégique déjà évident dans les relations entre l’UE et les pays du Maghreb voire même ceux de l’Afrique. Surtout que l’UE et la France, acteurs clé en Afrique du Nord, n’ont pas réussi à coordonner leurs réponses aux crises interdépendantes au Mali et en Libye.

Notre pays aurait pu être dans une situation économique moins défavorable, si les réformes économiques nécessaires que les gouvernements successifs s’étaient engagés à mettre en œuvre auprès des bailleurs de fonds (FMI, UE et gouvernements occidentaux) se sont concrétisées. Ce n’est malheureusement pas le cas…

Mais comment réussir la mise en œuvre des réformes alors que l’UE, le FMI, la Banque Mondiale et autres donateurs occidentaux se montraient indulgents avec ces gouvernements auxquels ils prêtaient l’argent en fermant les yeux sur la corruption rampante, l’évasion fiscale et la fuite des capitaux qu’ils laissaient gangrener l’économie du pays?

C’est ainsi que la Tunisie s’est retrouvée dans une situation où elle doit engager des réformes complexes et douloureuses, qui plus est, dans une situation politique, économique, financière et sociale souvent qualifiée de catastrophique par les observateurs et les analystes.

* Expert comptable, commissaire aux comptes, membre de l’Ordre des experts comptable de Tunisie.

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