Le président coordinateur de la Commission nationale consultative pour la préparation de la nouvelle constitution, Sadok Belaid a déclaré dans une interview à Euronews que l’avantage de la nouvelle constitution est de se concentrer sur de nouveaux aspects qui n’étaient pas abordées dans les constitutions précédentes et qui étaient marginalisés, notamment les aspects économiques, sociaux, culturels et environnementaux, et particulièrement la digitalisation et la jeunesse.
Par Imed Bahri
Le professeur de droit constitutionnel a expliqué que la situation actuelle dans le pays, en particulier la crise économique et sociale, nécessitait de modifier la constitution, ajoutant : «Le but de prendre une telle mesure dans cette période est de sortir de toutes les crises que nous traversons… Notre approche est pragmatique basée sur le diagnostic de la crise et la recherche de solutions.»
Concernant les articles qui posaient problème et qui rendaient difficile le travail entre les pouvoirs législatif et exécutif, il a répondu que le texte de l’ancienne constitution ne permettait pas la coopération et l’interaction au sein même du pouvoir, et que ce sont les blocages issus des anciennes constitutions et le grand nombre de partis créés au lendemain de 2011 qui sont la cause des difficultés actuelles.
Eviter la mauvaise compréhension et l’interprétation abusive
M. Belaid a également indiqué que ce qu’on lui demandait de faire était de présenter le projet d’une constitution et non de fournir des garanties juridiques et constitutionnelles qui empêcheraient la fraude lors du référendum du 25 juillet prochain sur la nouvelle constitution. Il a ajouté : «Le problème de la fraude existe dans tous les pays, même dans les plus développés. Il existe des organisations internationales qui ont supervisé les élections précédentes en Tunisie, comme la Commission de Venise, qui a reconnu l’intégrité de ces élections, mais nous découvert qu’ils étaient frauduleux et que plusieurs infractions avaient été commises.»
M. Belaid a souligné qu’un travail est en cours pour éviter la mauvaise compréhension et l’interprétation abusive des nouveaux articles de la constitution, en référence à sa déclaration précédente selon laquelle le président sera un fonctionnaire de l’État et que les termes de pouvoir exécutif et de pouvoir législatif ne seront pas utilisés, indiquant que «ce qu’on entend par le terme pouvoir renvoie à celui de sultan ou de dictateur, tandis que le président est chargé d’une mission.»
«Quant au parlement, il n’est pas un pouvoir, mais tire plutôt son existence d’un mandat délivrée par le peuple, qui reste le titulaire originel du pouvoir», a-t-il ajouté.
Sadok Belaid a nié avoir reçu des instructions du président de la république, Kaïs Saïed, concernant la possibilité de suppression de l’article stipulant que «l’islam est la religion de l’Etat» dans le texte de la nouvelle constitution.
La mention de la religion dans le premier article de la constitution n’est pas un enjeu crucial en termes d’organisation du pouvoir dans le pays. Cet article a des justifications, et est venu trancher la polémique du temps de feu le président Habib Bourguiba entre progressistes et conservateurs, a-t-il rappelé, ajoutant : «La question religieuse est présente dans le préambule de la constitution de 59, dans l’amendement de 76 et dans la constitution de 2014, qui met l’accent sur l’islamité du peuple tunisien, alors que les devoirs religieux concernent la relation de l’individu avec Dieu et ne sont pas une application du premier article de la constitution. Cela dit, il n’y a aucune divergence sur le fait que les Tunisiens soient majoritairement musulmans.»
Vers un système politique équilibré et stable
«Je vous assure pour ma part que je n’ai pas reçu d’instructions du président de la république, il m’a plutôt laissé libre avec ma conscience, et je resterai sur cette voie jusqu’à l’accomplissement de cette mission», a assuré M. Belaid, en précisant que sa commission utilisera les articles relatifs aux droits et libertés dans la constitution de 2014 et que nombre de principes contenus dans les précédentes constitutions seront inclus dans la nouvelle en gestation.
Le président de la Commission nationale consultative pour la préparation de la nouvelle constitution a également souligné l’importance d’inclure un article relatif à la création d’un Conseil consultatif économique, culturel, social et environnemental, «qui jouera un rôle très important, puisqu’il recueillera les doléances des citoyens, leur proposera des solutions appropriées et les présentera au parlement, en les formulant sous forme de lois.»
A propos de la nature du système de gouvernement qui sera instauré par la nouvelle constitution, Sadok Belaid a déclaré : «Ce qu’il faut, c’est un système équilibré et stable, capable d’atteindre des objectifs économiques, sociaux, culturels et environnementaux.» Difficile d’être plus vague sur le sujet…
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