Fitch rassure mais avertit : la Tunisie n’est pas à l’abri d’un défaut de paiement

Bien qu’elle s’attende à ce que l’accord entre la Tunisie et le Fonds monétaire international (FMI) soit signé en novembre ou décembre prochains, l’agence de notation Fitch Ratings n’abandonne pas son hypothèse de base qu’un risque de défaut de paiement pourrait entraîner une nouvelle dégradation de la note ‘CCC’ du pays.

L’accord annoncé entre le gouvernement et l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) sur les augmentations des salaires du secteur public lève un obstacle majeur à un programme de prêt du FMI, estime Fitch Ratings, qui considère ce programme comme «la clé de la liquidité extérieure et de la cote de crédit de la Tunisie».

Dans un communiqué publié jeudi 15 septembre 2022, Fitch Ratings souligne que «la Tunisie continuera à bénéficier du soutien international», et suppose que notre pays «obtiendra un accord avec le FMI au cours du second semestre de l’année en cours, débloquant un financement supplémentaire de la part des créanciers officiels en novembre-décembre», prévision qui comblera d’aise le gouvernement qui ne dispose pas dans ses caisses des liquidités nécessaires au financement de ses dépenses au cours du 4e trimestre de cette année particulièrement difficile.

Rappelons qu’après des mois de négociations, le gouvernement et l’UGTT ont signé avant-hier un accord sur une augmentation de 5% des salaires bruts dans le secteur public sur la période 2023-2025.

L’accord intervient après que la performance budgétaire de la Tunisie s’est améliorée au premier semestre de l’année, bien que le faible déficit annoncé ait été rendu possible par les retards dans le paiement des compensations des subventions.

Selon Fitch, le gouvernement a fait des progrès dans la gestion de la position budgétaire sous-jacente au premier semestre 2022, même si le resserrement des liquidités a pu jouer un rôle. Le recouvrement des recettes a été solide, tandis que les dépenses salariales semblent se rapprocher des niveaux budgétés pour 2022 et seront probablement contenues à moyen terme grâce à l’accord avec les syndicats.

«Le gouvernement a fait état d’un déficit budgétaire de 471 millions de TND au premier semestre 2022, soit 0,3% de nos prévisions pour le PIB nominal en année pleine en 2022», a indiqué l’agence.

De nouveaux financements substantiels engagés ou accélérés par les créanciers officiels depuis mars ont déjà permis à la Tunisie de commencer à rattraper le retard des paiements de compensation des subventions, a ajouté Fitch.

«L’Office des céréales, chargé d’acheter des produits alimentaires sur les marchés internationaux et de les distribuer à moindre prix en Tunisie, n’a pas reçu de nouveaux transferts de l’État pour couvrir les coûts des subventions entre mars et juin et a eu recours à des emprunts auprès de banques publiques avec une garantie de l’État», précise Fitch, qui ajoute que «le gouvernement a également retardé le paiement de certaines compensations de subventions à la Steg, qui fournit de l’électricité et du gaz subventionnés. Les arriérés accumulés au cours du deuxième trimestre 2022 se sont élevés à au moins 800 millions de DT, soit 0,6% du PIB.»

L’agence de notation s’attend à ce que les dépenses globales en subventions en 2022 soient équivalentes à 8,2% du PIB, contre 1,5% rapporté en juin pour le premier semestre 2022. Ceci, combiné à une augmentation des dépenses d’’investissement au second semestre, sous-tendra un déficit budgétaire beaucoup plus large à la fin de l’année.

L’agence estime que si les dépenses de subventions avaient été égales à leur niveau de 2021, le déficit de l’année 2022 serait plus proche de 4,5% du PIB, contre des prévisions de 8,5%, et les 7,1% enregistrés en 2021.

Bien qu’il s’attende à ce que l’accord entre la Tunisie et le FMI soit signé en novembre-décembre, Fitch Ratings souligne que son scénario de base comporte des risques.

«De nouveaux retards dans la conclusion d’’un accord avec le FMI ou dans la mise en œuvre de réformes, entraînant une nouvelle détérioration des indicateurs de viabilité de la dette tunisienne, pourraient conduire le FMI à exiger de la Tunisie qu’elle restructure sa dette», a déclaré l’agence, qui avertit : «Des signes indiquant qu’un défaut devenait plus probable pourraient entraîner une dégradation de la note ‘CCC’ de la Tunisie.»

I.B. (avec Tap).

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