La Tunisie risque d’être submergée par l’afflux de migrants africains débordant des frontières avec l’Algérie et la Libye et surtout ceux qui seront bientôt rapatriés en Tunisie par les pays européens, et ce à la faveur de l’accord sur la migration signé hier avec l’Union européenne. La quatrième guerre punique se prépare-t-elle ?
Par Elyes Kasri *
Depuis 2011, les Tunisiens ne cessent de voir leurs vœux exaucés comme si c’était une interminable Noel ou une nuit du destin sans fin. Le problème c’est que leur situation ne s’améliore guère.
Ceux qui ont préféré vivre avec du pain et de l’eau pourvu que Ben Ali disparaisse se sont débarrassés de Ben Ali et se sont retrouvés à faire la queue pour acheter une misérable baguette qui fond comme de la glace en pleine canicule et vivent au gré des coupures d’eau, préméditées ou dues à une infrastructure vieillotte et mal entretenue.
Ceux qui ont été déçus par Ennahdha et sa démocratie ont été débarrassés des deux dans l’attente d’un nouveau régime qui semble, en dehors des sondages occasionnels, faire l’objet d’une désaffection populaire lors des consultations ou élections organisées pour en dresser les contours (11,4 % de taux de participation aux dernières législatives en 2022).
«Carthago delenda est»
Le dernier souhait en voie d’être exaucé semble être celui de libérer la Palestine dans la mesure ou les tenants de l’identité arabo-musulmane de la Tunisie risquent d’être submergés par l’afflux de migrants africains débordant des frontières avec l’Algérie et la Libye et surtout ceux rapatriés en Tunisie par les pays européens à leur tête la bienveillante Italie qui semble mener la quatrième guerre punique pour faire disparaître pour de bon Carthage, selon les vœux de Caton (vers 150 avant J.-C.) qui ne cessait de haranguer le sénat romain avec son fameux cri de guerre «Carthago delenda est» (Carthage doit être détruite).
Ces Subsahariens risquent de prendre les tenants de l’arabité et de l’antisionisme au mot et leur demander d’évacuer cette terre africaine afin de réaliser leur destin en Palestine ou dans le désert d’Arabie d’où ils sont venus en conquérants.
Faire attention à ses souhaits
Ce serait la dernière phase de la décolonisation de l’Afrique et une occasion historique pour ceux qui piaffent d’impatience de libérer la Palestine de mener le véritable combat contre le sionisme israélien au lieu des joutes oratoires et de la surenchère arabiste de campus universitaire et de salons.
Dans une de ses célèbres fables, l’écrivain grec Esope (fin du VIIe et début du Ve siècle av. J.-C.) avait recommandé de faire attention à ses souhaits car ils pourraient être exaucés.
En Tunisie, on ne cesse de caresser une multitude de souhaits sans prendre le temps d’en calculer les conséquences.
* Ancien ambassadeur.
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