Sans la déclaration ci-dessous, quatre organisations internationales appellent les Etats membres du Conseil des droits de l’homme de l’Onu à s’attaquer à la crise des droits de l’homme qui s’aggrave rapidement en Tunisie.
Le Conseil des droits de l’homme de l’homme devrait s’attaquer de toute urgence à la détérioration de la situation des droits de l’homme en Tunisie, ont déclaré, mercredi 28 juin 2023, quatre organisations de défense des droits de l’homme alors que la 53e session du Conseil est en cours.
Dans une lettre envoyée aux représentants des États membres de l’Onu, le 5 juin 2023, les organisations soussignées ont mis en garde contre l’aggravation rapide de la situation en Tunisie et ont exhorté les États à saisir l’occasion de la session en cours du Conseil des droits de l’homme pour y remédier.
Les organisations ont appelé le Conseil et les États membres à faire pression sur les autorités tunisiennes pour qu’elles respectent leurs obligations en vertu du droit international des droits de l’homme, en particulier celles garantissant les droits à un procès équitable, la liberté d’expression, la liberté de réunion et d’association pacifiques et la non-discrimination.
Le Conseil des droits de l’homme devrait exhorter la Tunisie à mettre fin à la répression actuelle de la dissidence pacifique et de la liberté d’expression, et à abandonner les poursuites et à libérer toutes les personnes détenues et poursuivies uniquement sur la base de leurs activités politiques pacifiques et de l’exercice de leurs droits fondamentaux.
Le Conseil devrait également appeler la Tunisie à mener une enquête rapide, approfondie, indépendante, impartiale et transparente sur une vague de violence anti-Noirs – y compris des agressions et des expulsions sommaires – contre des ressortissants étrangers noirs africains, y compris des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés, et traduire en justice toute personne raisonnablement soupçonnée d’être responsable, et fournir aux victimes un accès à la justice et à des recours effectifs.
Au cours des deux dernières années, la Tunisie a connu un important recul des droits de l’homme. Les garanties d’indépendance judiciaire ont été démantelées et certains juges et procureurs ont été l’objet de révocations arbitraires, de poursuites pénales politisées et d’une ingérence accrue de la part de l’exécutif. Des avocats sont poursuivis pour s’être acquittés de leurs obligations professionnelles et exercé leur droit à la liberté d’expression.
«L’ingérence des autorités tunisiennes dans le système judiciaire et les attaques contre les avocats ont fortement porté atteinte au droit à un procès équitable et à la confiance du public dans l’intégrité du système judiciaire. Les autorités doivent veiller à ce que les tribunaux ne soient pas armés pour écraser la dissidence et la liberté d’expression», a déclaré le directeur Mena de la Commission internationale des juristes, Said Benarbia.
Sous couvert de «lutte contre les délits liés aux systèmes d’information et de communication», passibles de 10 ans d’emprisonnement et d’une lourde amende selon le décret-loi 54, au moins 13 individus, dont des journalistes, des opposants politiques, des avocats, des défenseurs des droits de l’homme, et militants, ont fait l’objet d’enquêtes policières ou judiciaires et risquent d’être poursuivis.
«Alors que la Tunisie est confrontée à l’incertitude politique et à la crise économique, il est plus important que jamais que les Tunisiens soient libres de débattre de l’avenir de leur pays sans crainte de représailles. Les autorités doivent s’efforcer de permettre la jouissance effective du droit à la liberté d’expression de chacun; au lieu de cela, ils l’attaquent», a déclaré Rawya Rageh, directrice adjointe par intérim d’Amnesty International pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
La semaine dernière, le Haut commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a appelé les autorités tunisiennes à cesser de restreindre la liberté des médias et de criminaliser le journalisme indépendant. Dans une déclaration publiée le 23 juin, Volker Türk a exprimé sa profonde préoccupation face aux restrictions croissantes du droit à la liberté d’expression et à la liberté de la presse en Tunisie, notant qu’une législation vague est utilisée pour criminaliser le journalisme indépendant et étouffer les critiques à l’encontre des autorités. «Il est troublant de voir la Tunisie, un pays qui nourrissait autrefois tant d’espoir, régresser et perdre les acquis de la dernière décennie en matière de droits de l’homme», a déclaré la Haut-Commissaire.
Depuis février 2023, une vague d’arrestations a visé des opposants politiques et des critiques présumés du président tunisien, Kaïs Saïed. En l’absence de preuves crédibles d’infractions, les juges enquêtent sur au moins 48 personnes, telles que des dissidents, des personnalités de l’opposition et des avocats, pour avoir prétendument conspiré contre l’État ou menacé la sûreté de l’État, entre autres chefs d’accusation. Au moins 17 d’entre eux font l’objet d’une enquête en vertu de la loi antiterroriste tunisienne de 2015.
«En emprisonnant des dirigeants politiques et en interdisant les réunions de l’opposition, les autorités bafouent dangereusement les droits fondamentaux qui sous-tendent une démocratie dynamique. Le recul démocratique et les violations des droits humains, qui sont sans précédent depuis la révolution de 2011, nécessitent une attention urgente de la part du Conseil des droits de l’homme et des États membres», a déclaré Salsabil Chellali, directeur pour la Tunisie à Human Rights Watch.
Traduit de l’anglais.
Signataires :
Commission internationale de juristes (CIJ)
Service international pour les droits de l’homme (ISHR)
Amnesty International
Human Rights Watch (HRW).
Source: HRW.
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