Erdogan-Ghannouchi : Le chef du mouvement islamiste international et son vassal tunisien.
Est-ce la «démocratie islamiste» d’Erdogan, qu’Ennahdha rêve d’instaurer en Tunisie, en s’attaquant à la liberté des journalistes et des médias ?
Par Chedly Mamoghli *
Ce n’est ni un article, ni une tribune mais par ces modestes lignes je voudrai exprimer mon soutien et ma solidarité aux journalistes tunisiens qu’ils appartiennent à la presse écrite ou aux médias audiovisuels suite au communiqué d’Ennahdha menaçant la liberté de la presse et la liberté d’expression et consacrant un retour éventuel du délit d’opinion.
Les journalistes qui travaillent souvent dans des conditions difficiles et qui jouent un rôle central dans la construction de la démocratie tunisienne méritent le respect et l’encouragement et non pas l’intimidation et le harcèlement judiciaire.
La danse du coq égorgé
Maintenant que tout le monde parle du blanchiment d’argent, de l’opacité du financement d’Ennahdha et des autres partis politiques aussi, des milliards du Qatar, des associations bidons qui serviraient à financer les partis politiques, Ennahdha panique et se sent fragilisé.
Agonisant et frileux car rattrapé par ses casseroles, c’est la danse du coq égorgé. Que les Tunisiens généralement ou les journalistes spécifiquement, qui sont in fine des citoyens Tunisiens, se posent des questions sur le financement d’Ennahdha ou de tout autre parti politique est tout à fait légitime et c’est le cas contraire qui ne serait pas acceptable, car ils auraient manqué à leur devoir professionnel.
En agissant de la sorte, Ennahdha s’inspire d’Erdogan en voulant museler les médias et l’opinion publique et faire taire la liberté d’expression et celle de la presse. Son communiqué publié hier, samedi 10 février 2018, confirme cette stratégie erdoganienne d’intimidation des journalistes, des médias et de l’opinion publique. Il ne faut pas se laisser intimider par les islamistes et leur méthode erdoganienne.
Ennahdha veut nous convaincre depuis son congrès du printemps 2016 que c’est la métamorphose, que ce n’est plus un parti religieux mais un parti démocratique. Ce n’était qu’un coup de Com’ pour embobiner les naïfs; c’était sans plus ni moins du bluff et ce communiqué est une preuve irréfragable que nous n’avons pas affaire à un parti démocratique mais à la filiale tunisienne des Frères Musulmans, dont la franchise tunisienne s’appelle Ennahdha.
Des questions légitimes sur des faits plus que douteux
Nous, Tunisiens et les journalistes parmi nous, avons le droit de nous interroger sur le financement d’Ennahdha, sur sa gestion des affaires du pays depuis janvier 2012, sur tous les désastres et catastrophes ayant eu lieu sous son ère, surtout en 2012 et 2013, comme la fameuse journée du 9 avril 2012, marquée par des dépassements policiers mais aussi par le fait que des voyous tabassaient des citoyens avenue Bourguiba, l’attaque de l’ambassade américaine, le 14 septembre 2012, la fuite plus que douteuse, deux jours plus tard, du dénommé Seifallah Ben Hassine (alias Abou Iyadh), instigateur de cette attaque, de la mosquée El Fath à Tunis, puis du territoire tunisien, alors que toute mouche qui entre ou qui sort du territoire tunisien est connue par nos services, le lynchage à mort de Lotfi Nagdh, le 18 octobre 2012, les violences policière de Siliana le 27 novembre 2012, l’attaque du siège de l’UGTT le 4 décembre 2012, ou encore les recrutements douteux au sein du corps des gardes forestiers, le creusement des déficits, le recrutement massif au sein de la fonction publique, l’accroissement abyssal de la dette publique, bref la dégradation des finances publiques qui a entraîné la dégradation de la note souveraine de la Tunisie plus d’une fois.
Autant de questions légitimes que les journalistes doivent se poser et des faits sur lesquels ils sont censés se pencher. Mais les islamistes ne l’entendent pas de cette oreille et entendent s’inspirer de leur idole Erdogan qui use et abuse du délit d’opinion pour faire taire toute voix discordante qu’elle soit celle d’un journaliste ou n’importe quel citoyen.
La liberté d’expression et la liberté de la presse sont des libertés constitutionnelles, des acquis irréversibles que nous n’entendons pas laisser violer par quiconque. Il est hors de question que ces libertés deviennent juste écrites noir sur blanc dans la Constitution mais bafoués dans la réalité.
La construction démocratique tunisienne est en gestation et reste vulnérable. Toucher à la liberté de la presse et à la liberté d’expression reviendrait à exterminer cette démocratie naissante.
Il est plus que regrettable que chez nous et dans le monde arabe, une critique, une caricature ou une blague puisse encore déranger et agacer un gouvernant ou un parti, qui permettez moi de rire, ce dit démocratique.
Je remarque que plus de 24 heures après la publication de ce communiqué l’absence totale de réaction et le mutisme de Nidaa Tounes, devenu hélas une pâle copie de l’ancien RCD avec d’ailleurs des RCdistes qui le pilotent, Hafedh Caïd Essebsi n’est qu’un paravent.
N.B. Actuellement, 170 journalistes sont détenus en Turquie, plus de 700 cartes de presse annulées et plus de 140 médias fermés. La Turquie d’Erdogan occupe la 155e place sur 180 au classement de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (RSF). Est-ce cette démocratie islamiste qu’Ennahdha rêve d’instaurer en Tunisie ?
Tout journaliste, tout acteur politique et tout citoyen qui se respectent se doivent nourrir cette crainte.
* Juriste.
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