L’appel du député franco-israélien Habib Meyer pour «boycotter touristiquement» la Tunisie, dans un post Facebook, mercredi dernier, 5 février 2020, continue de susciter l’indignation, et pas seulement parmi les Tunisiens. La Tunisie survivra a tous ses détracteurs, lui répond l’auteure de ce billet.
Par Lilia Bouguira *
Dites à ce député nommé Habib Meyer qui a appelé au boycott de mon pays: comme tout tunisien et tunisienne, les propos de ce député français m’indignent et font tourner mon sang. Ma tunisianité en prend un coup.
Une seule question me taraude et grogne en moi. Pourquoi cette méchanceté faite à mon pays? Pourquoi ce député en ce timing s’insurge-t-il contre mon pays? De quel droit invite-t-il ses semblables à se détourner de mon pays auquel la France est liée depuis toujours par d’étroites relations? Pourquoi appelle-t-il les français à bouder la Tunisie? Comment se permet-il de tracer un tableau noir de notre pays sur les pas de l’Iran dit-il et où la haine est le maître mot? De quel droit se munit-il pour inviter à boycotter les boycotteurs?
Certes, depuis neuf années bien houleuses mon pays est secoué par de tristes événements. Il est malheureusement desservi par ses politiciens peu diplomates ou carrément véreux qui tentent de le ruiner et d’y porter de graves préjudices.
Mon pays tangue dangereusement. Mille démons le guettent. Les terroristes tentent d’y faire leur nid. Le chaos et la gabegie…
Seulement, mon pays se dresse en permanence en insoumis. Des hommes et des femmes sont garants de sa transition vers la démocratie. Des femmes et encore des femmes vaillantes et puissantes bravent leurs détracteurs et se refusent avec virulence à la captivité.
Non monsieur Meyer, vous faites tout faux. Vous avez laissé la haine vous piéger et vous faites preuve de plus de discriminations que tous les terroristes réunis en appelant au boycott d’un pays qui se bat courageusement pour sa liberté.
Dans votre appel peu innocent, vous aspirez comme ses détracteurs à l’enfoncer encore plus mais détrompez-vous, monsieur le député, il survivra à vos folies et à vos fourberies pour l’emporter sur vous tous.
«Dalenda Carthago est», le fameux appel à détruire Carthage, est toujours de mise. La Tunisie a toujours été convoitée voire jalousée.
«Dalenda Carthago est» restera impossible grâce à ses femmes et toujours ses femmes.
«Dalenda Carthago est» restera impossible grâce à ses saints millénaires dont Sidi Mehrez que nos juifs tunisiens vénèrent parce qu’il n’a jamais de son temps appelé au boycott du juif. Il les a bien au contraire protégés sous son égide sans faire de discrimination.
«Dalenda Carthago est» restera impossible grâce à sa Djerba la douce avec sa Ghriba que visitent chaque année depuis la nuit des temps des milliers de juifs de tous les coins du monde. Des pèlerins que seul ramène l’amour de ce lieu sacré sans réserve aucune ni haine.
«Dalenda Carthago est» restera impossible grâce aux souvenirs d’autrefois où la cohabitation entre juifs et musulmans se tenaient délicieuse dans un va-et-vient tolérant et où les différences se dissolvaient autour d’un met concocté tantôt chez l’un tantôt chez l’autre. Mieux encore où le musulman venait allumer le feu ou la lumière pour son voisin de palier pendant le Shabbat dans un respect total des religions et du sacré.
«Dalenda Carthago est» restera impossible pour un million de petites choses que vous, monsieur le député, n’arriverez jamais à comprendre parce que votre cœur et votre regard sont plombés de mauvais sentiments.
Certes, le comportement, l’amateurisme et le manque de tact de certains de nos dirigeants peuvent désorienter mais jamais aucun autre que vous premier n’a jamais porté autant de rancune à ce petit pays dont vous et une grappe de vos semblables veulent perdre pour nous en rendre orphelins.
Non, monsieur le député, «Dalenda Carthago est» restera toujours impossible malgré vous et vos semblables jusqu’à la fin des temps. Votre politique ne pourra jamais détruire ce qu’il y a de profonds entre nous. Prenez exemple sur René Trabelsi qui a su mettre tout amalgame de côté pour faire reluire son pays et rien que son pays.
Les politiques disparaissent. Les hommes partent. Et seul reste le pays.
* Médecin et activiste de la société civile.
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