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Tunisiens évacués d’Ukraine : «M. Tarek Aloui, arrêtez votre char !»

Arrivée à Tunis d’un groupe de rescapés de la guerre russo-ukrainienne.

Une étudiante tunisienne, originaire de Tinja, dans le gouvernorat de Bizerte, qui a choisi de garder l’anonymat de ses initiales S.H., souhaite, par son témoignage, mettre un terme à ce qu’elle considère comme étant une «petite légende» que Tarek Aloui, président de l’Association des Tunisiens d’Ukraine, a construite pour, selon ses termes, sa «petite personne».

Par S.H.*

Cela m’attriste que l’on succombe aussi facilement que Tarek Aloui à la tentation de se faire passer pour le sauveur des Tunisiens d’Ukraine. Bien évidemment, dans cette affaire, il s’agit de sa parole contre la mienne. Mon témoignage contre le sien.

Comme tous les Tunisiens, le jour où la guerre a éclaté en Ukraine, j’ai paniqué. Je ne savais plus où donner de la tête : j’étais là, en Ukraine, pour étudier et j’apprenais chaque jour à gérer ma petite vie d’étudiante tunisienne à l’étranger, comme je pouvais. D’ailleurs, il s’agissait de mon premier voyage hors de la Tunisie et mon expérience dans le domaine de la gestion de mon indépendance était très limitée. Chaque mois, je devais batailler pour m’assurer de l’arrivée du virement bancaire de mes parents et de bien garder mes sous car ils ont été durement acquis par mes parents. Tout allait normalement, paisiblement… Mais v’là que MM. Poutine et Zelensky en ont voulu autrement. La guerre des mots est devenue une guerre de chars, d’avions, de bombes, d’obus, de destructions, de morts et de blessés. Et tout cela se passe dans un pays où nous n’avons pas de représentation diplomatique.*

Le culot de surfer sur le désarroi de ses compatriotes

Je vous laisse imaginer la suite, c’est-à-dire l’étendue de la peur qui nous a pris, nous autres un petit groupe d’étudiants tunisiens qui étions à Dnipro…

Là, je parle en mon nom, de ce que j’ai personnellement vécu, de ce que j’ai pu voir, de ce que j’ai constaté, de ce que mes proches amis à Dnipro ou ailleurs ont pu me rapporter et de ce que j’ai pu vérifier.

Pour la faire courte, Tarek Aloui est «un petit rigolo» et je n’arrive toujours pas à comprendre qu’il puisse, depuis plus de deux semaines, continuer de se faire plaisir à surfer éhontément, comme il le fait, sur le désarroi de ses compatriotes.

A partir du jour où la guerre en Ukraine a éclaté, nous avons tous été informés de l’existence de M. Aloui et de son association. Tout le monde nous a communiqué ses coordonnées –d’ailleurs, avant même celles de nos ambassades en Pologne et en Russie. Qu’il en soit ainsi !

Je vous épargne les détails de mes innombrables déceptions. Je ne comptais plus les jours, les soirées et les nuits où notre groupe avions contacté Tarek Aloui et, à chaque fois, pour l’entendre nous dire : «OK, je m’en occupe. Ne vous inquiétez pas. Je vous rappelle.»

C’était toujours la même «amabilité» à chaque échange téléphonique ou courrier électronique. Pour le concret, comme on dit chez nous en Tunisie «yabta chwaya» (il faudra attendre un peu).

Tarek Aloui son association «bidon»

La chance, la débrouillardise (tunisienne !), certaines générosités ukrainiennes et le coup de main de certains Tunisiens qui étaient sincèrement motivés à nous sortir de ce piège ukrainien, qui ne cherchaient pas à être «décorés» ou que la Une des médias tunisiens n’a jamais intéressée… C’est cela et tous ceux-là qui m’ont permis d’être encore en vie aujourd’hui et de pouvoir témoigner comme je le fais ici, dans les colonnes de Kapitalis.

Et cette chance inouïe qui m’a été donnée de retrouver ma famille, mes amis, Tinja et la Tunisie, je suis dans le regret de dire que je ne la dois pas à Tarek Aloui, ni à son association «bidon».

Le jour où notre groupe a atteint la Roumanie, M. Aloui n’a rien trouvé de mieux à dire que cette interrogation : «Comment avez-vous fait pour être là ? Vraiment…». Et cette réaction en dit long sur les «prouesses» de cet homme…J’aurais pu garder tout cela pour moi. Par contre, je promets que j’en dirai plus, si M. Aloui continue de frimer, en allant, par exemple, jusqu’à prétendre qu’à présent il est passé à l’étape suivante, à savoir qu’il est en train de négocier avec les responsables ukrainiens –ministère de l’Enseignement supérieur d’Ukraine, doyens de facultés, que sais-je encore– le sauvetage de notre année universitaire.

Basta cosi, M. Aloui ! Je souhaite que cela s’arrête à ce point. J’en dirai plus si ça se poursuit. Votre parole contre la mienne. Votre témoignage contre le mien. Je n’ai rien contre vous, Tarek Aloui. J’essaye, tout simplement, de vous protéger contre la tentation d’un poste d’ambassadeur à Kiev, par exemple… Pour les énormes quantités de blé que nous achetons aux agriculteurs ukrainiens et les dizaines de milliers de touristes ukrainiens qui visitent notre pays chaque année, M. Jerandi devrait réfléchir sérieusement à l’ouverture d’une ambassade de Tunisie en Ukraine.

Est-ce que vous suivez mon raisonnement, M. Aloui ?

* Etudiante tunisienne rapatriée d’Ukraine, il y a un peu plus d’une dizaine de jours.

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