Il y a de plus en plus d’indications que de l’islam politique de Rached Ghannouchi et d’Ennahdha, considéré trop politique et trop soft, nous nous dirigeons, avec le président Kaïs Saïed, vers un islam politique plus puritain et extra strength. (Illustration : lors de sa première visite officielle en Egypte, en avril 2021, Kaïs Saïed ne s’est pas rendu au musée du Caire, ni aux Pyramides de Gizeh, mais à la Grande mosquée Al-Azhar).
Par Elyes Kasri *
Ceux qui présentent Kaïs Saïed comme l’unique alternative au parti Ennahdha, omettent de reconnaître, sciemment ou par ignorance, qu’il y a des indices de plus en plus perceptibles que nous sommes en train de vivre l’accélération de la mise en œuvre du programme de l’islam politique avec l’effacement de l’histoire moderne de la Tunisie, de ses principales figures comme le leader Habib Bourguiba et ses dates phare à savoir les fêtes de l’indépendance et de la république en leur superposant la consultation électronique du 20 mars sur les réformes politiques et le référendum du 25 juillet sur la nouvelle constitution.
Un conflit de façade avec Ennahdha
La dissolution des institutions républicaines et leur remplacement progressif par des mécanismes d’allégeance à connotation tribale et régionaliste semblent se faire au détriment de la notion de patrie et de ses institutions et composantes comme la société civile et les partis politiques, émanations de la société moderne, malgré leurs erreurs de jeunesse et les quelques dérives incontestables d’un apprentissage difficile de la démocratie.
Au-delà de quelques actions spectaculaires de courte durée et jusqu’a présent à caractère plutôt médiatique, des poursuites judiciaires contre des responsables d’Ennahdha, il devient de plus en plus difficile de réfuter l’argument que le discours et les références de Kaïs Saïed, notamment l’article 5 de «sa» constitution, avec sa référence à la nation islamique (oumma islamiya), laissent penser à une inspiration culturelle et idéologique islamiste.
D’un islam soft à un islam extra strength
Il y a de plus en plus d’indications que de l’islam politique de Rached Ghannouchi et d’Ennahdha, considéré trop politique et trop soft, nous nous dirigeons vers un islam politique plus puritain et extra strength (que confortent les positions fondamentalistes du président de la république sur des thèmes comme l’égalité des sexes devant l’héritage, Ndlr).
Certains proches de Kaïs Saïed (ou se réclamant de lui, Ndlr), comme les membres du Harak du 25-Juillet, vont jusqu’à craindre une dérive chiite en Tunisie, ce qui fait apparaître à l’esprit le tort causé par le régime des ayatollahs à l’Iran qui a été mis au ban des nations depuis près d’un demi-siècle et n’est pas prêt d’en sortir.
* Ancien ambassadeur.
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