Si des pays voisins se préparent à une crispation avec l’Occident pour des choix et des considérations qui les concernent, la Tunisie n’a pas intérêt à se laisser entraîner dans cette spirale de la tension et à faire siennes les querelles des autres, car il y va de sa stabilité et même de sa survie.
Par Elyes Kasri *
Juste après la célébration, morose selon de nombreux observateurs, du 50e anniversaire de la francophonie à Djerba, voilà que certaines voix, plus ou moins bien intentionnées à l’intérieur et à l’étranger, s’efforcent de susciter en Tunisie une vague de francophobie qui pourrait ne pas être tout à fait innocente ou désintéressée.
Les francophobes montent au créneau
En attendant que la justice se prononce sur les accusations rapportées par certains médias, il ne serait pas excessif de penser que les feux précédemment allumés par les obsédés du sel et autres richesses minérales prétendument pillées par la France, suivis par des accusations graves mettant en cause l’atteinte à la sûreté extérieure de l’État dans le but d’attenter à sa sûreté intérieure, risquent d’enflammer les passions et d’élargir davantage le fossé avec des pays occidentaux, partenaires traditionnels, au moment où l’économie nationale a cruellement et même vitalement besoin de soutiens étrangers bilatéraux et au sein des instances financières internationales.
Il y a lieu d’espérer que la remarquable victoire des Aigles de Carthage sur l’équipe de France, détentrice de la Coupe du monde, contribuera autant soit peu à calmer les ardeurs des revanchards et facilitera une vision plus sereine et plus décomplexée de nos relations avec cet important partenaire politique, économique, culturel, scientifique et consulaire.
Ceux que la nature et la géographie condamnent à l’ouverture et à la coopération internationale gagneraient à se méfier des accès de frilosité que certains pays dotés de rentes naturelles croient pouvoir se permettre, et c’est leur plein droit, toutefois avec les résultats sociaux et économiques qui n’échappent à personne.
La crispation avec l’Occident dessert la Tunisie
Si des pays voisins se préparent à une crispation avec l’Occident pour des choix et des considérations qui les concernent, la Tunisie n’a pas intérêt à se laisser entraîner dans cette spirale de la tension et à faire siennes les querelles des autres car elle a ses propres contraintes et défis qui sont suffisamment lourds à affronter pour parvenir à assurer sa stabilité et même sa survie.
Le grand leader Habib Bourguiba avait, avec sa perspicacité légendaire, correctement identifié le sous-développement comme l’ennemi numéro un de la Tunisie.
Cet ennemi, associé aux effets d’une gouvernance calamiteuse de la décennie noire, nous guettent et risquent de mettre en péril les acquis de l’indépendance et d’un demi siècle d’efforts et de sacrifices.
* Ancien ambassadeur.
Donnez votre avis