«L’Italie regarde de près la stabilité et le développement de la Tunisie, également à travers le soutien à sa croissance économique. Nous avons un engagement et une vision communs contre l’immigration clandestine».
C’et ce qu’a écrit sur Twitter le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères italien, Antonio Tajani, à l’occasion de sa rencontre à Carthage avec le président Kaïs Saïed, ajoutant : «Nous allons lancer un forum d’affaires pour renforcer le commerce», soulignant ainsi les liens entre la croissance économique et la lutte contre la migration irrégulière.
«Nous avons parlé de la stabilité de la Libye, pour nous c’est très important et nous travaillerons toujours ensemble pour la sécurité des frontières. Pour résoudre le problème de l’immigration, il faut aussi des accords politiques pour réduire les flux de la Libye vers la Tunisie et qui se dirigent ensuite vers la Méditerranée et vers l’Italie. Avec Tunis, nous sommes également d’accord sur la Libye et nous continuerons à travailler ensemble», a aussi déclaré Tajani après la rencontre avec Saïed.
La nécessité d’intervenir à la racine
«Nous avons eu une rencontre très positive avec le ministre de l’Intérieur et des Affaires étrangères mais surtout avec le président tunisien : des relations solides et d’amitié se sont confirmées entre deux pays voisins, il y a l’engagement de l’Italie à continuer à travailler avec la Tunisie, à renforcer les investissements italiens en Tunisie, pour augmenter la présence des entreprises en Tunisie mais surtout nous nous sommes concentrés sur la grande question de l’immigration : nous avons convenu que ce n’est pas seulement un problème de sécurité mais pour le résoudre, nous devons intervenir à la racine», a poursuivi Tajani, en visite mercredi à Tunis en compagnie du ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi. «Avec la sécurité, nous devons travailler – a-t-il ajouté – avec des actions politiques qui servent à lutter contre la pauvreté, le terrorisme, le changement climatique, la maladie. En bref, une stratégie qui permet à l’Italie d’être un protagoniste et peut résoudre le fléau de l’immigration, comme le président tunisien l’a dit, ensemble nous pourrons atteindre les objectifs. La Tunisie s’est engagée à résoudre tous les problèmes, nous ferons de notre mieux pour que cette collaboration à tous les niveaux puisse être renforcée et puisse contribuer à la solution du problème de l’immigration dans le court terme, moyen et long terme».
18 000 migrants irréguliers tunisiens arrivés en Italie en 2022
Dans au journal La Presse de Tunisie intitulée «Il faut faire plus et ensemble», Tajani avait déclaré : «Il est indéniable que le dossier de l’immigration occupe une place centrale dans toutes les relations» entre les deux pays, illustrant les données sur le phénomène : «32 000 migrants irréguliers, dont 18 000 ressortissants tunisiens, sont arrivés en Italie en 2022. Au cours des deux premières semaines de cette année, plus de 1 700 personnes ont débarqué illégalement sur la côte italienne». Il faut donc, explique-t-il, «renforcer la coopération» : «Je pense notamment à la lutte contre les départs irréguliers, à travers des contrôles aux frontières plus importants et plus larges, prévoyant l’élaboration de mécanismes permettant d’augmenter le nombre de rapatriements depuis l’Italie». Il s’est cependant empressé d’ajouter que l’Italie est toujours prête à soutenir les efforts de la Tunisie dans ce domaine, «comme en témoignent les 47 millions d’euros financés par le ministère italien des Affaires étrangères ces dernières années».
Sur le plan commercial, «cette année encore l’Italie s’est affirmée comme le premier partenaire commercial de la Tunisie avec une part de marché de 14,3%. Ce résultat extraordinaire est dû aux plus de 900 entreprises italiennes qui opèrent de manière stable en Tunisie dans divers secteurs», rappelle Tajani, annonçant «l’organisation d’un Business Forum en Tunisie en 2023 «pour attirer plus d’investissements italiens dans le pays, travaillant sur des intérêts communs, également à la lumière des besoins du marché tunisien».
De son côté, la présidence tunisienne a insisté, dans le communiqué publié à l’issue de la rencontre de Saïed avec Tajani et Piantedosi, sur «la conviction commune des deux pays d’adopter une approche globale qui va au-delà de la dimension purement sécuritaire pour s’attaquer à ses causes profondes et fournir des cadres innovants et des mécanismes appropriés pour gérer la migration régulière».
Augmenter le nombre de migrants réguliers
Dans une vidéo publiée sur la page de la présidence de la république tunisienne, le vice-président du Conseil des ministres et ministre des Affaires étrangères et de la Coopération a déclaré que l’Italie est «prête à augmenter le nombre de migrants réguliers, formés en Tunisie, qui peuvent travailler en Italie dans les domaines de l’agriculture et de l’industrie». Il s’agit de «renforcer la migration régulière et de réduire la migration irrégulière», a-t-il dit.
De son côté, le ministre italien de l’Intérieur a rappelé que la coopération sécuritaire entre les deux pays amis remonte à l’accord bilatéral conclu en 2013, et que la délégation italienne est en Tunisie pour consolider et impulser les relations déjà existantes, et de discuter de la migration irrégulière en tant que dossier d’intérêt commun.
Il a exprimé la volonté du président du conseil des ministres italien d’adopter «une approche globale fondée sur la légalité et la légitimité» pour la lutte contre la migration irrégulière, et ce, selon une stratégie de coopération étroite avec la Tunisie, «d’autant plus que la moitié de ceux qui arrivent en Italie sont originaires des pays subsahariens, ce qui signifie que la Tunisie, à son tour, souffre de ce problème», a-t-il dit, montrant une compréhension des Italiens des difficultés auxquelles font face les Tunisiens à ce niveau et leur disposition à apporter des réponses adéquates à ce fléau.
Dans ce cadre, Piantedosi a annoncé, lors de sa rencontre avec le ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine, un nouveau programme d’action visant à former une catégorie de jeunes candidats à la migration dans des domaines professionnels spécifiques répondant aux besoins du marché du travail italien, soulignant l’importance pour les candidats à la migration régulière de rejoindre les différents emplois en Italie. Selon un communiqué du ministère tunisien de l’Intérieur, des experts des deux pays ont été chargés d’examiner les moyens et mécanismes à mettre en œuvre ce programme et assurer un quota permanent aux Tunisiens dans le cadre de la migration régulière.
Au cours de la rencontre, le ministre de l’Intérieur tunisien a souligné que les efforts sécuritaires dans la lutte contre la migration irrégulière restent insuffisants, soulignant la nécessité de solutions économiques, sociales et de développement.
I. B. (avec Ansamed et Tap).
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