Bien qu’annoncée officiellement par Washington, la récente visite de la secrétaire d’État adjointe américaine aux affaires du Proche-Orient, Barbara A. Leaf, en Tunisie, serait passée complètement sous silence si l’ambassade des Etats-Unis à Tunis n’en a pas rendu compte hier, jeudi 23 mars 2023.
Par Imed Bahri
Selon le communiqué publié par l’ambassade, Mme Leaf s’est rendue en Tunisie dans le cadre d’une tournée régionale qui l’a amenée, du 20 au 23 mars, en Jordanie, en Egypte, en Tunisie et au Liban, des pays qui font face à de graves crises économiques. Mais pas seulement.
Au cours de sa visite à Tunis, Mme Leaf a rencontré le ministre des Affaires étrangères, Nabil Ammar, avec qui elle a souligné le partenariat de longue date entre les États-Unis et la Tunisie, et l’importance de faciliter le travail des diplomates à Tunis et à Washington.
La responsable américaine, dont ce fut la seconde visite à Tunis, après celle effectuée en août dernier au cours de laquelle elle avait été notamment reçue par le président de la république Kaïs Saïed, a fait part du point de vue des États-Unis sur «l’importance d’assurer un système de freins et de contrepoids essentiel à toutes les démocraties», précise le communiqué américain.
Pour un processus politique démocratique inclusif
«Elle a également appelé à la mise en œuvre rapide du plan de réforme économique élaboré par le gouvernement du président Saïed et qui a obtenu le soutien du FMI et des pays donateurs», ajoute la même source.
«La secrétaire adjointe Leaf a également rencontré des représentants de la dynamique société civile tunisienne qui plaident pour un processus politique démocratique inclusif qui protège les libertés fondamentales, y compris le droit à la liberté d’expression. Elle a également réalisé des entretiens avec des médias tunisiens et internationaux», lit-on aussi dans le même communiqué.
Le ministère tunisien des Affaires étrangères a rendu compte de plusieurs rencontres de moindre importance effectuées ces derniers jours par le ministre Nabil Ammar, mais n’a pas dit un mot de celle qui l’a réuni avec Mme Leaf.
Rappelons à ce propos que la visite à Tunis de Mme Leaf a eu lieu alors que la déclaration du secrétaire d’Etat américain Antony Blinken avertissant contre «l’effondrement de l’économie tunisienne si le pays ne parvient pas à un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) de manière urgente» faisait des gorges chaudes à Tunis. «La Tunisie doit s’engager dans un accord avec le FMI pour éviter un scénario d’effondrement économique», a souligné Blinken, ajoutant qu’«un accord avec le FMI n’aura pas lieu dans les prochains jours si les conditions nécessaires ne sont pas réunies», dans ce qui ressemble à un avertissement difficile à avaler par la partie tunisienne.
La Tunisie fait dos rond
Est-ce à dire qu’en omettant de faire part de la visite de Mme Leaf sur la page Facebook officielle du ministère des Affaires étrangères, la partie tunisienne a voulu signifier son mécontentement vis-à-vis de ce qui est interprété à Tunis comme une ingérence dans les affaires intérieures de la Tunisie voire comme une atteinte à sa souveraineté ?
En l’absence d’une réaction officielle à ce sujet, on est bien tenté de le penser, alors que pour une fois, les positions américaines et européennes à propos de la situation en Tunisie ou de qui est désormais appelé «la question tunisienne» se rapprochent dangereusement pour notre pays qui ne peut se payer le luxe d’un isolement international au moment où il a besoin d’une aide financière d’urgence pour, justement, éviter l’effondrement. Effondrement dont tout le monde parle, sauf à Tunis où l’on continue de faire semblant que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.
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