Le président Saïed ne cesse de dénoncer ceux qui, au cœur même de l’Etat, jouent un double jeu, œuvrant contre la volonté du peuple et servant les intérêts de certains lobbys qui se croient au dessus des lois. L’administration publique en Tunisie est-elle à ce point gangrené par la corruption? Vidéo.
Par Imed Bahri
Le problème c’est que le chef de l’Etat dispose de tous les pouvoirs dans le pays et on est en droit de se demander qu’est-ce qui l’empêche de les utiliser pour démasquer ces traîtres à la nation et les faire condamner par la justice.
Autre problème : le président nous décrit un Etat gangrené par la corruption et, depuis le temps qu’il nous brosse ce tableau sans vraiment agir pour y changer quoi que ce soit, on se met à sérieusement douter de ses capacités à agir. Ces lobbys sont-ils si puissants ? Ou est-il lui-même à ce point désarmé ?
Ces remarques sont été inspirées par les déclarations du président lors de la rencontre, lundi 8 avril 2023, au Palais de Carthage, avec la Première ministre Najla Bouden, au cours de laquelle il a souligné la nécessité d’appliquer la loi à toutes les personnes, quelle que soit leur position dans le pays.
Campagne électorale permanente ?
«Aucune transgression, ni de la loi, ni de la volonté du peuple, ne peut être acceptée», à lancé Saïed, dans la vidéo de la rencontre diffusée par la présidence de la république sur sa page Facebook, en ajoutant, comme s’il était en campagne électorale permanente, qu’il est venu «pour servir l’Etat tunisien, les pauvres et les nécessiteux» et qu’il s’est «engagé à réaliser les espoirs et la volonté du peuple tunisien, dans le passé, le présent et l’avenir».
«Beaucoup pensent qu’ils sont au-dessus de leurs responsabilités et qu’ils peuvent jouer avec l’appareil d’Etat», a déclaré le président, notant dans ce contexte que ces derniers «n’auront pas leur place dans l’appareil d’Etat s’ils agissent contre la volonté du peuple tunisien», volonté que, cela va sans dire, il pense incarner de manière exclusive.
«Nous voulons faire notre chemin ensemble, sans ingérence extérieure, notre souveraineté n’est pas un mot facile et la Tunisie n’est ni à louer ni à vendre», a encore souligné Saïed, ajoutant : «Nous voulons suivre une voie nouvelle, loin des pièges et des terrains minés car la paix civile en Tunisie n’a pas de prix», dans une limpide allusion aux réformes structurelles que la Tunisie s’est engagée à mettre en œuvre dans le cadre de ses accords avec ses bailleurs de fonds internationaux et à leur tête le Fonds monétaire international (FMI), réformes que le président semble rejeter de plus en plus ouvertement.
Gouvernement fantoche ?
Le président de la république a également appelé tous les acteurs de l’appareil d’État à «respecter la loi, notamment le devoir de réserve, en tant que fonctionnaires, quel que soit leur degré de responsabilité», appelant certains de ces responsables, sans les nommer, à «cesser de danser sur les cordes, à l’intérieur de l’administration et dans ses nombreuses structures».
«Les dépassements de certains ne seront jamais acceptées et ceux qui œuvrent à contrer ce processus doivent en assumer les conséquences», a enfin averti le président de la république, comme pour rappeler aux membres du gouvernement qu’il est le seul à décider des grands choix de l’Etat et, surtout, à les exprimer. Ce qui, on l’imagine, va avoir des conséquences sur la crédibilité même du gouvernement que préside Mme Bouden, surtout au regard des partenaires étrangers qui s’interrogeront, à juste titre, sur la valeur qu’ils pourront accorder à l’avenir à sa signature et à ses engagements.
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