150 universitaires occidentaux appellent à libérer les prisonniers politiques en Tunisie

Des universitaires en Europe et aux États-Unis ont signé une lettre ouverte appelant les autorités tunisiennes à libérer le chef du mouvement islamiste Ennahdha, Rached Ghannouchi, et tous les prisonniers politiques du pays.

La lettre des universitaires a été diffusée un mois après l’arrestation de Ghannouchi en raison de déclarations dans lesquelles il critiquait les autorités tunisiennes à la suite de la proclamation de l’état d’exception par le président Kaïs Saïed le 25 juillet 2021 et de ce qu’ils considèrent comme sa «prise de contrôle du pouvoir judiciaire».

Les 150 signataires ont déclaré que la démocratie tunisienne, qui représente le dernier espoir du printemps arabe, fait face au retour de la tyrannie depuis le 25 juillet 2021, après le démantèlement des institutions démocratiques, et depuis que l’autorité et le pouvoir se soient concentrés entre les mains du président.

«Plus récemment, Rached Ghannouchi, qui a été démocratiquement élu président du Parlement tunisien dissous anticonstitutionnellement par le président Kaïs Saïed, a été arrêté à son domicile le 17 avril 2023 pour rejoindre les dizaines de dirigeants de l’opposition en prison. Les accusations portées contre lui et d’autres dirigeants de l’opposition sont une tentative désespérée d’éliminer les principales voix de l’opposition pour détruire la démocratie en Tunisie et détourner l’attention de l’aggravation des crises politiques, économiques et sociales dans le pays», lit-on dans la lettre.

«L’arrestation de M. Ghannouchi fait partie d’‘‘une vaste chasse aux sorcières à motivation politique’’, selon les termes d’Amnesty International», lit-on aussi.

Les universitaires proviennent de 19 pays d’Amérique du Nord et d’Europe, dont Charles Taylor, John Esposito, Francis Fukuyama, Philippe Schmitter, Clement Henry Moore, Olivier Roy, François Burgat, Jocelyne Cesari, Noam Chomsky, Larry Diamond, John Entelis, Burhan Ghalioun, et Elaine Lust, Khaled Abou El Fadl, John Kane et Charles Tripp.

Le texte intégral de la lettre

Lettre ouverte : Appel à la libération de Rached Ghannouchi et de tous les prisonniers politiques en Tunisie

Alors que la transition démocratique autrefois prometteuse et inspirante du Printemps arabe fait face à un assaut féroce, menaçant de ramener la Tunisie aux époques les plus sombres de la dictature, les démocrates tunisiens résistent courageusement et défendent leurs droits et libertés durement acquis.

Alors que les dirigeants de l’opposition progressent vers la présentation d’un front uni, diversifié et large pour la restauration de la démocratie, ils sont confrontés à une vaste campagne d’arrestations arbitraires, d’accusations à motivation politique, de diabolisation et de menaces. Tous ceux qui croient aux valeurs communes de liberté et de démocratie dans le monde doivent les soutenir dans leur lutte pour la liberté.

Plus récemment, Rached Ghannouchi, qui a été démocratiquement élu président du Parlement tunisien dissous anticonstitutionnellement par le président Kaïs Saïed, a été arrêté à son domicile le 17 avril 2023 pour rejoindre les dizaines de dirigeants de l’opposition en prison. Les accusations portées contre lui et d’autres dirigeants de l’opposition sont une tentative désespérée d’éliminer les principales voix de l’opposition, de détruire la démocratie en Tunisie et de détourner l’attention des crises politiques, économiques et sociales qui s’aggravent dans le pays.

Nous, soussignés, universitaires et personnalités publiques, exprimons notre solidarité avec M. Ghannouchi et tous les démocrates tunisiens injustement arrêtés ou poursuivis, et appelons les autorités tunisiennes à libérer tous les prisonniers politiques en Tunisie.

A quatre-vingt-un ans, M. Ghannouchi est reconnu comme l’un des plus éminents défenseurs de la démocratie dans le monde arabe et de la démocratie musulmane. Il a été l’une des voix les plus cohérentes de la modération et de la condamnation de l’extrémisme. Son approche consensuelle et ses appels constants au dialogue et à l’unité à travers les lignes politiques, intellectuelles et idéologiques sont plus que jamais nécessaires en Tunisie, dans la région au sens large et au-delà. Priver la Tunisie, la région et le monde d’une des voix les plus en vue de la modération et de la démocratie serait une perte tragique bien au-delà des frontières tunisiennes.

L’arrestation de M. Ghannouchi s’inscrit dans le cadre d’une «chasse aux sorcières à motivation politique» de grande envergure, telle que décrite par Amnesty International. Les autorités tunisiennes ont arbitrairement poursuivi, arrêté et détenu des dirigeants de partis politiques démocratiques, des représentants de la société civile, des syndicalistes, des juges et des journalistes, dont beaucoup font face aux mêmes accusations de «complot contre la sûreté de l’État» pour leur défense de la démocratie tunisienne.

Nous appelons les autorités tunisiennes à libérer tous les prisonniers politiques et à restaurer les libertés et les droits de l’homme en Tunisie.

Source : Middle East Monitor.

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