Les tentatives actuelles pour imposer le contrôle de l’Etat sur les contenus des médias en général et des médias audiovisuels en particulier ont été au centre de la conférence sur «Médias et justice : domaines d’intervention pour la préservation des droits et libertés» tenue à Tunis vendredi 7 juillet 2023.
Organisée par la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica), en partenariat avec l’Unesco, Article 19, l’Institut danois des droits de l’homme (IDDH) et le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), cette conférence visait à «établir une relation entre les médias et la justice dans une approche participative où les rôles sont mieux définie».
Cette conférence, à laquelle ont participé des experts dans les domaines de la justice et des médias, s’inscrit dans le contexte de la «nécessité d’ouvrir un débat sur la liberté d’expression et d’information et le rôle de la justice dans la mise en place de mécanismes capables de garantir ces libertés et de protéger la droit à l’information», selon une note introductive.
Membre du conseil de la Haica, Radhia Saïdi, a déclaré que cette conférence est organisée dans un contexte national délicat où les appels à l’indépendance judiciaire et à la liberté d’expression et d’information se multiplient. «Il y a des tentatives d’affaiblir la Haica, notamment en sapant son pouvoir de décision, surtout depuis le départ à la retraite de son ancien président Nouri Lajmi, en janvier dernier», a-t-elle déclaré.
Depuis cette date, le conseil de l’institution n’a pas été en mesure de rendre publiques ses décisions concernant certaines entreprises médiatiques et de nombreux projets soumis à la Haica.
Radhia Saïdi / Yassine Jlassi.
Parmi les tentatives de contournement des prérogatives de l’organisme de régulation, poursuit-elle, figure «la décision de justice interdisant aux médias audiovisuels de commenter l’affaire dite de complot contre la sûreté de l’État». Il est nécessaire de lancer un débat entre la justice, les médias et l’instance de régulation pour définir les domaines et les limites d’intervention afin de préserver les droits et les libertés, a-t-elle ajouté.
De son côté, le président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) Yassine Jlassi a noté un «retour des mécanismes de contrôle étatique des médias, y compris par le biais de justice, ainsi qu’au contrôle préalable des contenus».
Poursuivre 23 journalistes dans un délai de trois mois sur la base du décret-loi n° 54 du 13 septembre 2022 relatif aux infractions liées aux systèmes d’information et de communication constitue une violation flagrante des décrets-lois n° 115 et 116 régissant le secteur médiatique, selon Jlassi. Pour lui, «il s’agit d’une politique du gouvernement actuel visant à saper les droits et acquis du secteur de l’information».
Le procureur général près la cour d’appel de Monastir et porte-parole des tribunaux de Monastir et de Mahdia Farid Ben Jha a souligné, pour sa part, dans une déclaration aux médias, l’impératif de promulguer une loi organique définissant clairement les domaines d’intervention des médias dans les affaires judiciaires en cours. Il a également souligné la nécessité de respecter le rôle de la Haica dans la régulation du paysage audiovisuel.
La conférence a abouti à un projet de Déclaration de Tunis sur les domaines d’intervention des médias et de la justice pour la préservation des droits et libertés.
I. B. (avec Tap).
Hichem Snoussi / Neji Bghouri.
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