«Le déclaration que Zouhair Maghzaoui devait adresser au peuple tunisien a été reportée à une date ultérieure». Cette note publiée le 8 octobre 2024 sur facebook par l’équipe de campagne de l’ex-candidat à la présidence de la république est sa dernière intervention publique. Aussi son silence depuis le 6 octobre suscite-t-il des interrogations…
Imed Bahri
Crédité par l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) de seulement 1,97% des suffrages, très loin derrière le président Kaïs Saïed, réélu pour un second mandat avec le score astronomique de 90,96% et derrière l’homme d’affaires Ayachi Zammel crédité, lui, de 7,35%, alors qu’il n’a pu faire campagne pour cause d’incarcération, le secrétaire général du mouvement Echaâb ne pouvait faire pire. Il avait pourtant sillonné le pays du nord au sud et de d’est en ouest pour aller à la rencontre des électeurs, et multiplié les messages vidéos sur les réseaux sociaux et les entretiens avec les médias audio-visuels, y compris étrangers, où il détaillait son programme électoral et critiquait en des termes tranchants le maigre bilan du président sortant.
Le silence de Maghzaoui et des membres de son parti et de son équipe de campagne ne saurait être expliqué uniquement par l’ampleur de sa défaite électorale qui n’a pas surpris grand-monde. Et pour cause, après avoir longtemps soutenu Kaïs Saïed, et souvent avec ferveur, il a eu du mal à convaincre les Tunisiens de la sincérité de sa posture d’opposant de la 25e heure. Pour beaucoup d’électeurs, il apparaissait comme un simple comparse ou candidat de décor, étant donné que l’autre candidat que l’on croyait logé à la même enseigne, Ayachi Zammel, a fini par incarner, aux yeux des Tunisiens, le statut du véritable opposant, d’autant qu’entre l’acceptation de sa candidature et l’annonce des résultats du scrutin, il avait été condamné à plusieurs années de prison pour de vagues accusations de falsification de parrainages.
Pourquoi, après avoir remis en question, dans un premier temps, la crédibilité des résultats annoncés par l’Isie, Maghzaoui s’est-il interdit de faire des apparitions publiques et médiatiques, au point de reporter aux calendes grecques une conférence de presse qu’il avait lui-même annoncée, le 6 octobre, après l’annonce des résultats préliminaires de sortie des urnes révélés par le cabinet Sigma Conseil? Pourquoi ses camarades du mouvement Echaâb observent-ils tous la même réserve, se faisant eux aussi étrangement muets, eux qui ont l’habitude de courir les caméras et les micros?
Qu’est-ce qui s’est passé entre-temps pour rendre tout ce beau monde si peu bavard alors que beaucoup de Tunisiens, à commencer par ceux qui ont voté pour Maghzaoui, attendaient des explications de la déroute électorale de ce dernier, car c’en est une, si on donne foi aux résultats annoncés par Sigma et l’Isie et qui n’ont fait l’objet d’aucun recours, pas même celui du secrétaire général du mouvement Echaâb qui, rappelons-le, les avait pourtant, dans un premier temps, remis en question?
Que s’est-il passé depuis le 6 octobre du côté de chez Maghzaoui et du mouvement Echaâb ? Nous n’avons pas de réponse à cette question car nous n’avons pas pu avoir la moindre réaction à ce sujet de la part de Maghzaoui et de ses partisans.
Une défaite électorale, quelle que soit son ampleur, est toujours difficile à avaler, elle doit cependant être expliquée à défaut d’être digérée. Car elle ne le sera jamais…
Les mauvaises langues prétendent que Maghzaoui, qui a beaucoup misé, depuis le 25 juillet 2021, sur son soutien tapageur à Saïed pour faire oublier ses errements politiques antérieurs – notamment son alliance opportuniste avec les islamistes d’Ennahdha et Nabil Karoui -, regrette aujourd’hui les critiques acerbes qu’il a adressées au président de la république et à son maigre bilan lors de la dernière campagne électorale. Malheureusement pour lui, comme il y avait un avant et un après 25 juillet 2021, il y aura forcément un avant et un après 6 octobre 2024. Et dans cette nouvelle phase, espérons (pour lui) que sa traversée du désert ne sera pas trop longue…
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