Donald Trump veut en finir avec les Palestiniens

Aussitôt revenu au pouvoir, le président américain Donald Trump a débloqué une livraison suspendue de 1800 bombes Mk-84 pesant chacune près de 1000 kg à Israël, annulé les sanctions contre les colons israéliens en Cisjordanie ayant commis des crimes et comme tout cela ne suffisait pas, il a annoncé dimanche 26 janvier sa volonté de voir les Palestiniens de Gaza déplacés en Égypte et en Jordanie et «de faire le nettoyage dans cette population». Comme si le génocide commis par Israël à Gaza ne suffisait pas au malheur de ce peuple spolié de sa terre et martyrisé depuis 1948 devant le regard complice d’un Occident barbare et qui affiche désormais ouvertement sa barbarie.   

Imed Bahri

Les propos de Trump, on l’imagine, ont provoqué un profond malaise auprès des pays arabes concernés car ils peuvent avoir des conséquences graves sur la stabilité régionale.

L’éditorialiste du Washington Post, David Ignatius, a écrit que les déclarations du président américain sur le «nettoyage» et «la purge» de Gaza et le transfert des Palestiniens vers l’Égypte et la Jordanie ont mis les nerfs des partenaires arabes des États-Unis à rude épreuve. 

En faisant trop de propositions à la fois, Trump risque de saper ses bonnes idées par celles qui sont mauvaises. Il a commis sa première erreur majeure de politique étrangère samedi lorsqu’il a choqué les journalistes en leur disant qu’il voulait «nettoyer» Gaza de ses habitants et déplacer ces derniers en Jordanie et en Egypte.

Cette proposition était peut-être davantage l’expression d’une motivation personnelle que d’une politique planifiée. Cependant cette déclaration publique a stupéfié les dirigeants arabes modérés qui cherchaient à travailler avec lui. Car le transfert des Palestiniens déstabiliserait leurs gouvernements ainsi que toute la région, estime Ignatius, qui ajoute que Trump aime être un perturbateur mais ses dernières déclarations étaient comme lancer une bombe.

Un démolisseur à la Maison blanche

Un responsable arabe a émis l’hypothèse dimanche que le plan de Trump pourrait sembler refléter la pensée d’un promoteur immobilier plutôt qu’une initiative de politique étrangère. Le locataire de la Maison blanche a déclaré à propos de Gaza: «C’est  un site en démolition en ce moment. Je préférerais m’associer à certains pays arabes et construire des logements dans un endroit différent où ils pourraient peut-être vivre en paix pour changer.»

Trump a fait ces remarques à bord d’Air Force One après un appel privé avec le roi Abdallah de Jordanie. Comme d’autres dirigeants étrangers, le monarque jordanien veut coopérer avec Trump mais il ne peut pas risquer de déstabiliser son pays avec des vagues de migrants.

La réaction des pays du Moyen-Orient a été rapide et très négative. Le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman Safadi, a déclaré que l’opposition de la Jordanie au déplacement des Palestiniens est ferme et ne changera pas. L’ambassade d’Égypte à Washington a réitéré les propos de l’ambassadeur Moaz Zahran en 2023 dans lesquels il avait déclaré: «L’Égypte ne fera partie d’aucune solution qui comprendrait le transfert de Palestiniens au Sinaï.»

Les partisans arabo-américains de Trump sont mécontents. «Nous rejetons catégoriquement la proposition du président de transférer les Palestiniens de Gaza apparemment par la force vers l’Egypte ou la Jordanie», a déclaré Bechara Bahbah, président de l’association Arabo-Américains pour Trump, et d’ajouter: «Nous n’avons pas besoin d’affirmations ou de déclarations farfelues concernant le sort des Palestiniens.» 

Un cessez-le-feu fragile

Les propos désinvoltes de Trump sur le transfert des Palestiniens renforcent une tendance qui est évidente chez lui depuis son élection qui consiste à lancer des batailles inutiles sur ses thèmes favoris. Il a engagé un conflit avec son allié de l’Otan, le Danemark, au sujet du Groenland, a menacé de récupérer le canal de Panama et s’est moqué à plusieurs reprises du Canada en raison du déficit commercial des Etats-Unis avec ce pays.

Trump semble avoir oublié que la politique étrangère n’est pas une voie à sens unique, même les grandes puissances ont besoin d’amis. Ignatius affirme que saboter le Moyen-Orient est particulièrement imprudent aujourd’hui alors que la région tente de se remettre d’une guerre dévastatrice. Le cessez-le-feu à Gaza et la libération des détenus israéliens dont Trump se vante d’y avoir contribué sont de plus en plus fragiles car les Israéliens se rendent compte qu’ils n’ont pas réussi à établir une structure de gouvernement alternative à Gaza pour remplacer le Hamas.

Le cessez-le-feu au Liban, autre clé de la stabilité future de la région, est également menacé car Israël ne s’est pas encore retiré du sud et l’armée libanaise n’a pas encore totalement pris le relais du Hezbollah. Si cet accord échoue, le Liban en paiera le prix mais Israël le paiera également compte tenu des troubles en cours au nord de sa frontière.

Tout et n’importe quoi

Ignatius estime que les incendies allumés par le président Trump dans la région réduisent sa capacité à éteindre ceux qui y font rage. En tant que président qui valorise son indépendance dans ses prises de décision, il risque de se rendre prisonnier de l’aile la plus extrême et la plus à droite de la politique israélienne qui a applaudi et salué ses déclarations sur le transfert forcé des Palestiniens.

Ces propos révèlent un thème sont tenus après une première semaine frénétique d’ordres, de purges et d’interdictions. Avec la lave qu’il crache dans toutes les directions, Trump déclenche plus de batailles qu’il ne pourra en arrêter. La première chose à faire dans une guerre est généralement de concentrer le feu plutôt que de le disperser puis d’essayer d’atteindre les objectifs escomptés.

Trump a de bonnes idées en matière de politique étrangère notamment pour mettre fin à la guerre en Ukraine cependant il met en péril ses bonnes idées en proposant un tas de mauvaises idées avec une approche floue ce qui donne l’impression qu’il mélange tout ça, partout et en même temps. Une impression qu’il fait tout et n’importe quoi. 

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