En multipliant les déclarations hostiles à l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), sans la nommer, Kaïs Saïed montre qu’il cherche à en découdre sinon à en finir avec l’organisation syndicale qui, même en crise, affaiblie et divisée, constitue l’unique force politique en Tunisie pouvant contrarier la mise en œuvre de son projet politique.
Tout en affirmant qu’il n’a «absolument aucune intention de régler ses comptes avec qui que ce soit», le président de la république a affirmé, lors d’une rencontre avec la Première ministre Sarra Zaafrani Zenzeri, vendredi 15 août 2025, au palais de Carthage, qu’«il n’y a pas de place pour le compromis sur la responsabilité, ni sur la récupération des biens volés au peuple tunisien», indique un communiqué de la présidence. «De même, il n’y a pas de place pour quiconque se substitue au rôle de l’État, ni pour une adhésion forcée, ni pour un financement imposé», a-t-il ajouté dans une limpide allusion aux facilités dont bénéficie l’UGTT auprès de l’Etat pour collecter les cotisations de ses membres parmi les salariés de la fonction publique. La centrale syndicale, qui a toujours trouvé dans l’Etat un partenaire très coopératif, sait qu’elle a aujourd’hui, en face d’elle, un redoutable adversaire qui est déterminé à ne plus lui donner des cadeaux sinon à le combattre jusqu’au bout.
Le président de la République a souligné que la Tunisie traverse des moments historiques, des moments de distinction entre ceux qui ont soutenu le peuple et ses revendications légitimes, et ceux qui s’y sont opposés, et c’est parmi ces derniers que, bien entendu, il classe la centrale syndicale.
Les récentes mesures et réalisations sociales visent à satisfaire pleinement les revendications légitimes du peuple, notamment en matière d’emploi, de liberté et de dignité nationale, a martelé le chef de l’Etat, par allusion aux décisions annoncées contre la sous-traitance et l’emploi précaire et aux recrutements effectués parmi certaines catégories longtemps marginalisées.
Le chef de l’Etat a réitéré ses instructions d’intensifier les efforts de restructuration des nombreuses administrations qui ne servent à rien, soulignant la nécessité de remplacer tout fonctionnaire qui a fait preuve de négligence dans ses fonctions ou qui «rate le moment historique que vit notre chère nation».
Même si certaines personnes nommées manquent d’expérience, elles sont patriotes, sincères et capables d’apporter une réelle contribution à la lutte de libération nationale, a martelé Saïed qui ne fait plus mystère de sa volonté de remplacer de nombreux cadres et agents de l’Etat par des éléments qui montrent plus de détermination et de zèle dans la mise en œuvre du projet politique qu’il mène sous la bannière de la «lutte pour la libération nationale».
Passant en revue l’avancement des travaux du gouvernement dans de nombreux domaines publics, ainsi que le projet de loi de finances pour l’année à venir, Saïed a réaffirmé que plus les défis sont grands, plus la détermination à les relever est forte dans tous les domaines. «Aucune voix n’est au-dessus de celle du peuple», a-t-il lancé, soulignant que l’État, ses lois et ses institutions sont aux côtés du peuple tunisien, qui écrit chaque jour son histoire en déjouant toutes les tentatives désespérées de régression, qu’elles viennent de l’intérieur ou de l’extérieur, et en affrontant quiconque s’y associe, agitant ainsi, comme à son accoutumée, la théorie du complot, qui expliquerait, à ses yeux, la persistance de la crise générale dans le pays. Selon lui, celle-ci, qui perdure depuis plusieurs années, n’est pas réelle, mais artificielle, provoquée par des éléments hostiles au peuple dont il croit incarner, lui, exclusivement, la volonté.
Imed Bahri
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