L’opération Déluge d’Al-Aqsa du 7 octobre 2023 n’a pas été uniquement un revers pour les renseignements israéliens. Elle a révélé une lacune majeure dans les renseignements américains sur Gaza et dans sa compréhension plus large du Mouvement de résistance islamique Hamas. À force de trop compter sur les Israéliens, les États-Unis n’ont pas vu venir l’opération du Hamas qui détient toujours 33 Américains à Gaza et qui a chamboulé la situation géopolitique générale au Moyen-Orient comme nous sommes en train de le voir actuellement. (Illustration : un soldat israélien se tient à l’extérieur d’un tunnel menant à un centre de données du Hamas, découvert dans la ville de Gaza).
Imed Bahri
Selon Politico, les événements survenus lors des événements du 7 octobre contre Israël ont déclenché une campagne visant à intensifier la collecte et l’analyse d’informations dans la bande de Gaza par les Américains eux-mêmes.
Le média américain indique que les États-Unis comptaient largement sur Israël pour obtenir des informations internes sur Gaza et que les Israéliens n’avaient pas pris au sérieux certains de leurs avertissements internes.
Les responsables qu’ils soient actuels ou anciens affirment que les États-Unis ont longtemps eu du mal à recueillir des renseignements sur le Hamas et qu’ils ont augmenté leur collecte de renseignements dans la bande de Gaza au lendemain de l’opération du 7 octobre contre Israël. Cependant des lacunes subsistent quant au type de renseignements qui pourraient être nécessaires pour trouver un moyen de mettre fin au conflit.
Depuis le 7 octobre, l’administration Biden a continué de donner la priorité à la collecte de renseignements sur d’autres crises et conflits étrangers notamment le conflit Hezbollah-Israël, la guerre en Ukraine et les menaces de la Chine, ont déclaré des responsables et des législateurs proches du dossier.
Drones, satellites et radars pour quel résultat ?
Politico s’est entretenu avec quatre hauts responsables américains en exercice et anciens et trois législateurs et membres du Congrès sur cette question. La plupart ont requis l’anonymat pour s’exprimer librement sur des questions sensibles liées aux renseignements.
Le principal angle mort des États-Unis à Gaza a immédiatement attiré l’attention dans les jours qui ont suivi le 7 octobre. Lors des réunions d’information au Capitole, les responsables du renseignement ont déclaré aux législateurs qu’ils étaient surpris par ce que le Hamas était capable d’accomplir. Ils ont déclaré: «La planification de l’attaque a pris des mois voire des années. Elle a entraîné la mort de 30 Américains et il s’agit de l’attaque la plus sanglante contre des citoyens américains depuis les attentats du 11 septembre.»
Des membres de haut rang du Congrès ont insisté pour obtenir des réponses: Les États-Unis ont-ils été prévenus? Comment Israël a-t-il pu rater cela?
Au cours de l’année écoulée, les agences de renseignement américaines ont tenté de combler cette lacune en déployant des drones, des satellites et d’autres outils de surveillance –comme certains radars– pour mieux comprendre les tactiques militaires du Hamas. Tout cela a aidé Israël à déterminer les emplacements du Hamas à Gaza, selon Politico.
Toutefois, un an après l’attaque, les services de renseignement américains ont toujours du mal à comprendre la dynamique politique interne du Hamas, s’il est prêt à parvenir à un accord de cessez-le-feu et quelles sont ses aspirations à long terme pour Gaza, autant de questions auxquelles les décideurs politiques doivent répondre immédiatement.
Pendant des décennies, les administrations américaines ont choisi de ne pas donner la priorité à la collecte et à l’analyse des informations concernant Gaza et le Hamas. En dépit des améliorations, une année ne suffit pas pour rattraper le retard selon les responsables actuels et anciens du renseignement.
Les angles morts des États-Unis
Politico estime que les lacunes des services de renseignement à Gaza pourraient compliquer la tâche de la Maison Blanche dans la recherche de la bonne formule pour un accord de cessez-le-feu. On ne sait pas exactement où se situent les angles morts des États-Unis mais le débat public sur le projet américain sur la libération des détenus à Gaza et l’accord le cessez-le-feu a révélé ce manque de clarté.
L’administration Biden a affirmé à plusieurs reprises que le Hamas avait accepté la proposition mais le mouvement s’est prononcé et l’a explicitement rejetée et c’est ce qui s’est passé avec Israël également.
Des responsables et d’anciens officiers supérieurs du renseignement américain ont déclaré que les États-Unis avaient commencé à s’appuyer fortement sur les Israéliens pour obtenir des informations sur Gaza et le Hamas à la fin des années 1990 lorsque Washington a commencé à traiter plus directement avec les Palestiniens sur le front politique.
Depuis lors, les États-Unis ont affecté certaines unités pour suivre le Hamas, la Cisjordanie et Gaza mais ces unités sont souvent petites par rapport à celles qui couvrent d’autres pays et problèmes de la région, ont indiqué ces responsables.
Les États-Unis contribuent depuis longtemps à combler les lacunes en matière de renseignement que les Israéliens partagent avec eux mais les inconvénients sont devenus évidents le 7 octobre 2023. Norman Rolle, l’ancien directeur du renseignement national chargé du dossier iranien a déclaré: «Nous avons qualifié cela uniquement d’échec du renseignement israélien. Nous devons être clairs. Il s’agit également d’un échec du renseignement américain.»
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