Les «enfants de Ghannouchi» ont encore frappé à Ghardimaou.
Pour ne pas être considérés comme des terroristes en costume-cravate, les dirigeants du parti Ennahdha, qui ont des affinités idéologiques avec les terroristes islamistes, doivent déclarer solennellement que le jihad hors-la-loi en islam.
Par Farhat Othman *
Avec l’attaque terroriste hier, dimanche 8 juin 2018, à Ghardimaou (Jendouba), c’est un nouveau drame qui a frappé la Tunisie au cœur, visant ses forces à la fois vives, sensibles et sans défense, ses soldats, les vrais, ceux de terrain.
Et ils sont sensibles, sans défense, victimes des querelles politiciennes; surtout, n’ayant pour se protéger le passe magique politique et idéologique dont disposent les terroristes pour apparaître, faire leur sale coup et disparaître sains et saufs.
Complicités objectives
Ce passe, on ne peut plus l’ignorer, est une complicité active ou passive, directe ou indirecte, dont les ennemis de la patrie disposent auprès de quelques franges de la population. Pour d’aucuns, par peur ou par hostilité à l’ordre du pays, ces terroristes combattant d’autres terroristes, à leurs yeux.
C’est ainsi qu’ils voient les choses. Et ils ne sont pas les seuls, puisqu’il arrive qu’on trouve ce même sentiment au sein de la classe politique, de la magistrature et du barreau, où certains milieux seraient bien plus sensibles à ce que ces criminels auraient comme aura religieuse, cette fausse qualité de jihadistes, qu’attentifs à leurs crimes.
Car il ne faut pas se leurrer! Il est bien des Tunisiens qui sont, sinon de mèche avec les terroristes, en sont les complices objectifs. Bien pis, on ne compte plus les terroristes mentaux, ceux qui, chez les élites, intellectuelles et politiciennes, civiles et religieuses, théorisent un horrible droit de tuer et de semer le désordre au nom de l’islam.
Peut-on encore et doit-on se taire sur la responsabilité de ces terroristes en col blanc, de véritables bandits en costume-cravate, qui est aussi criminelle que les forfaits terroristes sur le terrain; ceux-ci se réclament d’ailleurs souvent des élucubrations justificatives de ceux-là ?
On ne peut plus tolérer ni accepter un tel terrible laisser-aller en Tunisie, d’autant plus grave qu’il a lieu dans une confusion des valeurs abyssale faisant de l’islam, la foi de la paix et de la fraternité, une religion de la haine, du massacre et des tueries. Avec cette terrible confusion des valeurs, il est plus qu’impératif d’en finir au plus vite.
C’est celle qui autorise nos forces de l’ordre à s’occuper des vétilles de la jeunesse qui étouffe par ailleurs, pour délaisser les terribles menées des vrais ennemis de l’ordre; comme de s’occuper de ces jeux guère dangereux, sinon puérils, de l’amour et du sexe.
Ainsi, en pistant Éros, on l’interdisant de séjour en ce pays, on laisse tout le champ libre à Thanatos pour agir à sa guise, du moment que le droit d’aimer et de faire le sexe en Tunisie est interdit, sa terre étant livrée aux bûchers des vanités et des vaniteux.
Au demeurant, il est à s’interroger si l’on n’agirait pas de la sorte exprès afin de faire de ces jeunes brimés, empêchés de vivre à la normale, des recrues faciles pour les haineux de l’ordre où ils auront droit tous les excès ? La question est sérieuse et doit être non seulement posée, mais solutionnée aussi et sans plus tarder.
Extirper le ver du fruit
Il est temps donc que cela cesse; et il faut le démontrer par des actes et non des propos de circonstances, gros d’hypocrisie et de malhonnêteté aussi.
Le ver est dans le fruit, et ce fruit est une lecture fausse et faussée de la religion déclarée constitutionnellement religion du pays. Aussi, c’est de cette religion qu’il faut partir afin d’en extirper le mal. Ce mal est la lecture intégriste et ses manifestations dans les lois de la république.
Par conséquent, toutes les lois à fondement supposé islamique doivent être suspendues incontinent. Et qu’on ne dise pas que cela contredit la nature de la société qui serait conservatrice. C’est un mythe éventé, qui ne sert plus que de cache-sexe au conservatisme des gens au pouvoir, car ils trouvent dans les lois scélérates en vigueur matière à consolider leurs abus et faire prospérer leurs privilèges.
Il est temps de libérer le pays du carcan d’une lecture antéislamique de la religion, celle générée par une jurisprudence («fiqh») obsolète qui a donné naissance à l’horreur qu’est Daech, lequel se base sur les écrits de nos jurisconsultes dont l’effort d’interprétation de leur foi n’est plus valable aujourd’hui.
Il est bien temps de reprendre un tel effort en commençant par oser déclarer solennellement que ce qui motive les terroristes, le fameux jihad, est forclos en islam. Aujourd’hui, il n’y a plus de jihad que majeur, celui à entreprendre sur soi; ainsi tout acte armé entrepris au nom de la religion est un acte de guerre, une menée terroriste à dénoncer au nom même de l’islam en notre nouvel «ijtihad» (effort d’interprétation rationnelle).
C’est ce qui tombe sous le sens et qui doit être solennellement déclaré de suite, non seulement par les instances religieuses, mais surtout politiques qui comptent dans le pays. C’est le préalable afin d’entrevoir le bout de ce tunnel de nuit noire et de brouillard idéologique qui est en train de tout dévaster dans le pays.
Si l’on veut prouver être patriote, manifester sa vraie foi en un islam de paix, le seul islam possible, on n’a plus le choix, il faut mettre le jihad hors la loi. Sinon, il ne servira à rien à prétendre lutter contre le terrorisme, et leurs protestations patriotiques se résoudront au jeu malsain politicard de qui prétendrait remplir le tonneau des Danaïdes. L’osera-t-on ?
C’est la question ontologique qui se pose à nos décideurs politiques. À commencer par les dirigeants issus du parti islamiste Ennahdha, les premiers concernés, car ils ont des affinités idéologiques avec les tueurs de nos gardes nationaux, hier, à Ghardimaou.
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