Stress hydrique en Tunisie : une crise dont on parle peu

Alors que le changement climatique aggrave le stress hydrique, que les pluies se font rares depuis le début de la saison agricole, que les barrages, déjà obstrués, se vident, le gouvernement tunisien ne semble pas mesurer l’ampleur de la menace à laquelle le pays fait face. (Illustration: barrage Sidi Salem).

C’est dans ce contexte difficile que le Forum Tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) a publié, en ce début janvier 2023, une note intitulée «La crise de l’eau en Tunisie : une mauvaise gestion des ressources hydrauliques expose le pays à un stress hydrique», où il appelle le gouvernement à accélérer l’adoption du code de l’eau, toujours en suspens, afin de faire face à la crise hydraulique à laquelle est confrontée la Tunisie, tout mettant l’accent sur la nécessité d’inscrire l’accès à l’eau comme «un droit fondamental», en accordant la priorité à l’usage domestique.

Ce texte, souligne le FTDES, doit prévoir un article portant sur la protection des ressources en eaux conventionnelles, notamment, les eaux souterraines dont le volume d’exploitation s’élève à plus de 125% dans les régions du sud.

Gaspillage tous azimuts

Selon l’organisation, cette mesure permettrait de durcir les conditions d’octroi d’autorisation de forage de puits et de lutter contre les puits anarchiques estimés à 19 000 en 2019. Elle a, par ailleurs, mis l’accent sur la nécessité de mettre fin à «l’anarchie exécutive» et de limiter le nombre d’intervenants dans le secteur. Elle a, ce titre, suggéré de créer un ministère dédié strictement au secteur de l’eau, lequel aura pour mission de chapeauter les différentes structures concernées.

Evoquant le secteur agricole, le forum a jugé indispensable d’élaborer un nouveau plan agricole qui prend en considération la spécificité de chaque région et la rentabilité des cultures. Face à un secteur qui consomme près de 80% des ressources hydrauliques sans pour autant garantir l’autosuffisance alimentaire, il est impératif, souligne l’organisation, de réduire les cultures agricoles très consommatrices d’eau comme les agrumes et les fruits.

Pour ce qui est de l’industrie, le FTDES a déploré l’absence d’une stratégie nationale visant à contrôler les eaux utilisées dans le secteur, citant l’exemple du textile, dont les eaux usées ont endommagé des zones entières.

Il a, à cet égard, déploré l’absence de mécanismes de recyclage de ces eaux, appelant, à «appliquer le principe de pollueur-payeur».

En ce qui concerne le secteur touristique, le Forum a fait remarquer que les hôtels et les établissements touristiques, qui accueillent des millions de touristes chaque année, sont des lieux de gaspillage d’eau. L’Etat est par conséquent appelé à recourir à de ressources non conventionnelles dans ce secteur comme le dessalement de l’eau de mer.

Vétusté des réseaux de la Sonede

Sur le plan logistique, l’organisation a suggéré de doubler la capacité de stockage pour atteindre 20% au minimum de l’ensemble des précipitations qui dépassent 36 milliards m3, afin d’aider la Tunisie à faire face au stress hydrique. Cependant, cette mesure demeure tributaire de la capacité du pays à aménager de nouveaux barrages et de réhabilité ceux qui sont vétustes, ajoute-t-elle.

S’agissant du volet technique, le forum a plaidé en faveur de la mise en place d’un plan opérationnel à même de réduire les pertes de l’eau potable et d’irrigation (400 millions de m3 par an) dues à la vétusté des réseaux de distribution de la Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (Sonede).

La dégradation des ces réseaux entraîne une perte de 30% du volume des eaux distribuées par la Sonede chaque année, note l’organisation, soulignant l’importance de réhabiliter ces canaux.

I. B.(avec Tap).

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