La démocratie, dans son essence, repose sur la diversité des opinions et la capacité à les accepter. Cependant, nous assistons actuellement à un déclin inquiétant de cette culture de l’acceptation de l’autre. Et pas seulement en Tunisie ou dans le monde arabo-musulman.
Par Khémaïs Gharbi *
Lorsqu’on examine de près la démocratie telle qu’elle se manifeste aujourd’hui, on ne peut s’empêcher de constater un déclin inquiétant de la culture de l’acceptation des opinions divergentes. Cette tendance alarmante n’est pas l’apanage de notre région, mais elle se propage à travers le monde. Nous vivons à une époque où de nombreuses personnes rejettent systématiquement les points de vue qui diffèrent des leurs, où le dialogue est de plus en plus difficile, même dans des pays qui se proclament démocratiques.
Les espaces de débat se rétrécissent
Dans ce climat de polarisation croissante, l’intolérance envers les opinions différentes devient monnaie courante. L’acceptation de la diversité des idées, qui est pourtant l’un des piliers fondamentaux de la démocratie, semble s’effriter. Les individus sont de moins en moins enclins à écouter, comprendre ou même tolérer des opinions qui contredisent les leurs. Cette intolérance peut engendrer des divisions profondes au sein de la société, sapant ainsi les bases mêmes du vivre ensemble dont la démocratie est l’un des principaux piliers.
Pire encore, dans de nombreux contextes, il est devenu difficile de donner un avis contraire à celui du pouvoir établi. Des mécanismes tels que l’interruption de la parole ou les attaques personnelles sont utilisées pour réduire au silence ceux qui osent s’opposer. Les espaces de débat et de dialogue se rétrécissent, compromettant ainsi la vitalité de la démocratie. Dans ces conditions, l’expression libre et ouverte des idées devient un défi majeur.
L’une des raisons de cette polarisation croissante réside dans le rôle des médias. Chaque média a sa propre ligne éditoriale, ce qui peut contribuer à favoriser la divergence des opinions. Les plateformes médiatiques peuvent ainsi amplifier les divisions et rendre difficile la recherche d’un terrain d’entente. De plus, l’accès limité à des médias favorables à une certaine école de pensée restreint la capacité des individus à s’informer de manière équilibrée.
Revendications collectives, intérêts particuliers
Il est frappant de constater que, trop souvent, la démocratie est revendiquée collectivement pour promouvoir des intérêts particuliers, plutôt que pour servir le bien commun. On observe cette tendance à refuser de participer à la réussite d’un projet politique tant que son camp n’est pas au pouvoir. Pourtant, la démocratie véritable implique la participation active de tous et la recherche du consensus, même lorsque nos opinions divergent.
En résumé, la démocratie, dans son essence, repose sur la diversité des opinions et la capacité à les accepter. Cependant, nous assistons actuellement à un déclin inquiétant de cette culture de l’acceptation de l’autre. Pour préserver et renforcer la démocratie, il est impératif que nous rétablissions une véritable culture de l’ouverture aux opinions différentes, que nous écoutions activement et que nous favorisions un dialogue respectueux. Sans cela, nous risquons de voir la démocratie s’éroder davantage, mettant en péril les principes sur lesquels elle repose.
* Enseignant supérieur à la retraite, Bruxelles.
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