Dans un récent rapport intitulé “Tunisia Food & Drink Report Includes 5-year forecasts to 2026” (Tunisie : Rapport sur la nourriture et les boissons, et prévisions sur 5 ans jusqu’en 2026), Fitch Rating prévoit des temps difficiles pour notre pays au cours des cinq prochaines années, avec un sérieux risque de sous-alimentation pour les couches les plus vulnérables de la population.
Par Imed Bahri
Selon l’agence internationale de notation, le secteur agroalimentaire périclite dangereusement dans notre pays, qui risque de manquer de produits alimentaires, parce que ses populations n’arrivent plus à payer le prix des aliments… essentiels, pour diverses causes: inflation, sécheresse, démantèlement de la politique de l’offre, avec l’abandon de certaines filières agricoles, dévaluation du dinar…
Crise du coût de la vie
«Au 4e trimestre 2022, des pénuries alimentaires enregistrées dans diverses régions de la Tunisie continuent de peser sur les prix et le gouvernement est aux prises avec une facture d’importation qui monte en flèche. Il y a des manifestations sporadiques et des troubles civils liés à la crise du coût de la vie», note le rapport en rappelant que le gouvernement est en train de négocier un programme d’aide financière avec le Fonds monétaire international (FMI) pour remédier aux déficits budgétaires dus à la flambée des coûts d’importation.
«Le gouvernement a du mal à réformer ses mécanismes obsolètes de subventions alimentaires malgré la montée en flèche des déficits budgétaires, l’inflation des prix et une facture d’importation élevée. En février 2022, avec l’invasion russe de l’Ukraine et l’augmentation subséquente des prix des matières premières, le déficit des importations alimentaires de la Tunisie a presque doublé au 1er semestre 2022 pour atteindre 1,6 milliard de TND (497 millions de dollars)», constate aussi Fitch, qui prévoit, en 2023, une croissance des dépenses alimentaires de 8,5%, portant les dépenses totales à 21,5 milliards de TND (6,5 milliards de dollars), après une croissance de 9,3% en 2022.
Croissance atone et hausse des dépenses alimentaires
Par ailleurs, l’équipe du Risque Pays de l’agence de notation prévoit une inflation moyenne de 7,3% en 2023. «Cela maintiendra la croissance réelle limité», avertit Fitch, soit entre 1 et 3%, alors que «la croissance à moyen terme sur la période 2022-2026 des dépenses alimentaires est actuellement envisagée à 7,4% en glissement annuel, ce qui portera les dépenses totales à 26 milliards de TND (7,4 milliards de dollars) d’ici 2026», indique le rapport qui précise que cette dynamique haussière sera soutenue par une démographie et un pouvoir d’achat favorables.
Commentaire désabusé d’un économiste qui a pris connaissance du rapport : «Ces perspectives annoncent des évolutions inquiétantes pour la Tunisie, notamment des risques de sous-alimentation pour une large partie des populations vulnérables. Notre pays pourrait retourner aux années difficiles 1960-70, où les Tunisiens dépendaient pour leur alimentation de l’USAID, du Programme alimentaire mondial (PAM) et autres aides internationales…»
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