Les Etats-Unis estiment que le report de la décision du Fonds monétaire international (FMI) d’accorder un prêt à la Tunisie est plutôt du à l’indécision du gouvernement tunisien et au retard enregistré dans la mise en œuvre effective des réformes structurelles convenues dans le cadre de cet accord. «Tous les partenaires de la Tunisie et ses amis de longue date comme les États-Unis veulent de toute urgence voir le gouvernement tunisien agir», explique Barbara Leaf. (Illustration : rencontre Barbara Leaf – Kaïs Saïed en août 2022).
Par Imed Bahri
Dans un briefing à distance, tenu le 30 mars 2023, Barbara Leaf, secrétaire d’État adjointe aux Affaires du Proche-Orient, a évoqué les résultats de son récent périple au Moyen-Orient et en Afrique du nord qui l’a amenée récemment en Jordanie, en Egypte, en Libye, au Liban et en Tunisie, où elle a discuté, a-t-elle dit, des «défis économiques et politiques critiques auxquels le pays est confronté.»
Aller de l’avant
«J’ai souligné que l’automne dernier, le gouvernement tunisien a présenté son propre programme de réforme pour faire face à la crise économique du pays, que le FMI a ensuite approuvé. Les États-Unis sont prêts à soutenir la Tunisie si ses dirigeants décident d’aller de l’avant avec son propre programme de réforme économique», a déclaré Mme Leaf.
Tout en admettant qu’il s’agit là d’«une décision souveraine pour la Tunisie», la responsable américaine a ajouté que «les États-Unis sont profondément investis pour la réussite du peuple tunisien depuis de nombreuses années, et si, donc, le gouvernement (tunisiens, Ndlr) décide de ne pas poursuivre un accord avec le FMI, nous sommes impatients de savoir quels sont leurs plans alternatifs.»
«J’ai souligné que nous restons attachés à notre soutien de longue date au peuple tunisien et à ses aspirations à un gouvernement démocratique et responsable qui préserve l’espace de libre débat et de dissidence, protège les droits de l’homme et les libertés fondamentales pour tous, promeut la prospérité à long terme et respecte la règle de droit», a encore déclaré Mme Leaf, en précisant qu’elle a également «souligné l’importance du travail que nos diplomates mènent avec le peuple tunisien en tant que composante importante de nos relations bilatérales.»
Interrogée sur le conseil qu’elle pourrait donner au président tunisien Kaïs Saïed et au gouvernement tunisien», Mme Leaf a répondu : «Ce qu’un gouvernement décide de faire face à la terrible crise économique qui malmène son pays est bien sûr une décision souveraine. Les dirigeants tunisiens – le président Saïed – devront donc prendre eux-mêmes ces décisions difficiles. Nous pouvons offrir des conseils. D’autres pays partenaires peuvent aussi offrir des conseils. Mais en fin de compte, cela revient à une décision souveraine.»
Agir en urgence
La responsable américaine a rappelé, à ce propos, que «le paquet de réformes que le gouvernement du président Saïed a négocié au nom de la Tunisie pendant environ un an a obtenu le soutien et l’approbation du FMI», ajoutant que «la décision qui incombe maintenant au président Saïed et à son gouvernement est de savoir s’il faut réellement adopter le paquet de réformes qu’ils ont mis en place. Et comme je l’ai dit, c’est une décision souveraine.»
En plus de ce rappel utile, qui ménage les susceptibilités des Tunisiens, si tapageusement attachés à la souveraineté de leur décision nationale, Mme Leaf ne s’est pas privée d’y aller de son petit conseil : «S’ils ne vont pas poursuivre sur cette voie pour une raison quelconque, alors tous leurs partenaires doivent de toute urgence comprendre ce qu’ils proposent de faire. Parce que l’énorme dette que la Tunisie traîne déjà et l’aggravation de la crise économique en Tunisie nécessitent une approche urgente et des réformes structurelles. La dette à elle seule rend difficile pour la Tunisie d’emprunter simplement pour sortir de cette crise. Elle ne le peut pas, en fait. Ainsi, tous les partenaires de la Tunisie et ses amis de longue date comme les États-Unis veulent de toute urgence voir le gouvernement (tunisien, Ndlr) agir.»
Mme Leaf laisse ainsi entendre que le report de la décision du FMI d’accorder un prêt de 1,9 milliard de dollars sur 4 ans est plutôt du à l’indécision du gouvernement tunisien et au retard enregistré dans la mise en œuvre effective des réformes structurelles convenues dans le cadre de cet accord. Lesquels indécision et retard donnent à penser aux partenaires de la Tunisie que son gouvernement hésite à s’engager, craignant peut-être de devoir faire face aux conséquences socialement difficiles de ces réformes pourtant nécessaires pour relancer l’économie et rendre l’Etat moins dépendant des emprunts étrangers.
Accéder à la retranscription en anglais de la totalité du briefing.
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