Cela fait plusieurs années que le gouvernement tunisien annonce la publication prochaine d’un nouveau code des changes, pour remplacer celui en vigueur depuis les années 1990 et qui bloque des pans entiers de l’économie du pays. Mais ce texte tant attendu ne semble pas près de passer sous les fourches caudines d’une administration tatillonne et inefficace.
Par Imed Bahri
Aux dernières nouvelles, le nouveau projet de loi a été remis, depuis quelques mois déjà, par la Banque centrale de Tunisie à la présidence du gouvernement, qui l’a envoyé aux différentes directions concernées pour avis et éventuels propositions d’amendements, en attendant son adoption par le gouvernement et sa discussion par l’Assemblée, désormais en place. Du coup, sa promulgation se trouve de nouveau renvoyée aux calendes grecques…
La cheffe du gouvernement, Najla Bouden, dont la lenteur semble avoir aggravé celle, légendaire, de l’administration qu’elle dirige, peut donc prendre encore son temps, au moment où le pays souffre d’une grave crise financière et que son économie est presque à l’arrêt.
L’effet d’annonce
C’est dans ce contexte désespérant que Mme Bouden a présidé, hier, mardi 25 avril 2023, à la Kasbah, une séance de travail ministérielle consacrée à «la révision du système des changes, dans le cadre des programmes nationaux de réforme annoncés par le gouvernement pour améliorer le climat des affaires et des investissements.»
Selon le communiqué du gouvernement, les participants à la réunion ont «discuté des grands axes de la réforme du régime des changes, en mettant l’accent notamment sur la libéralisation des procédures d’investissement étranger, la dette extérieure et la possibilité d’ouverture de comptes en devises ou en dinars convertibles pour les détenteurs de ressources en devises».
Le projet de loi de réforme du système de change prévoit également la possibilité d’ouvrir des comptes auprès de systèmes de paiement et de commerce électroniques étrangers et d’ouvrir des comptes en dinars convertibles, ajoute un communiqué du Premier ministère, qui précise que «le projet vise à soutenir le principe de libéralisation des transferts au titre de l’investissement à l’étranger, revoir et développer le système d’activité d’échange manuel et de traitement des actifs cryptés» et vise également à «renforcer le contrôle de l’activité de change et à revoir le système des délits de change et des sanctions».
«Le nouveau projet de loi sur les changes repose sur un certain nombre d’orientations principales, notamment le principe de libéralisation, avec la nécessité d’accompagner cette libéralisation avec l’évolution technologique, le développement des transactions et des systèmes de paiement en ligne. Il prévoit une approche progressive et prudente, tenant compte de la situation économique, préservant la monnaie nationale et orientant le secteur informel vers les circuits officiels», souligne le communiqué.
Le temps dure longtemps
On appréciera, au passage, l’insistance du gouvernement sur ce qu’il a qualifié d’«approche progressive et prudente», qui, on l’imagine, va remettre en place tous les verrous que les opérateurs économiques souhaitent voir sauter, tout en donnant rendez-vous à ces derniers dans un an ou même plus, pour voir enfin ce texte promulgué et entrer en vigueur. Non sans avoir été, auparavant, vidé de toute sa substance par une administration qui ne veut rien lâcher de ses prérogatives de contrôle, quitte à continuer à bloquer la machine économique, à faire fuir les investisseurs et à faire perdre au pays des ressources financières importantes.
Ainsi va la Tunisie, dont l’économie est en panne et qui continue de s’endetter pour payer les salaires de ses quelque 700 000 fonctionnaires, dont près du tiers sont payés pour ne rien faire et un autre bon tiers qui ne bouge le petit doigt que lorsqu’il a un intérêt personnel.
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