Le Congrès américain a menacé la Cour pénale internationale (CPI) et ses responsables en cas de lancement de mandat d’arrêt contre le quarteron de génocidaires israéliens et à leur tête Benjamin Netanyahu. C’est un manque de respect total pour la juridiction internationale, une ingérence dans son travail d’enquête et une intimidation gravissime. Si un tel comportement émanait d’un pays arabe, africain ou sud-américain, ça aurait été un tollé mondial et les chancelleries occidentales auraient joué les vierges effarouchées mais comme il s’agit d’Israël, personne ne bronche!
Imed Bahri
Axios, site d’information américain très suivi et connu pour ses révélations du fait de sa grande proximité avec la classe politique et le monde du renseignement, a affirmé que le Congrès menacerait la CPI si elle émettait des mandats d’arrêt contre les dirigeants israéliens impliqués dans les crimes de guerre à Gaza dont le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Dans son article intitulé «Le Congrès menace la CPI à cause des mandats d’arrêt israélien», le site ajoute que des membres du Congrès issus aussi bien du parti démocrate que du parti républicain ont averti la juridiction internationale qui siège à La Haye que si elle émettait des mandats d’arrêt, elle ferait l’objet de représailles et d’une législation qui affecterait son travail.
Axios indique que Netanyahu a personnellement exhorté le président Joe Biden à intervenir et à empêcher l’émission de mandats d’arrêt. Il indique également que «la Cour pénale internationale enquête depuis 2014 sur les crimes de guerre commis par l’armée israélienne et des factions palestiniennes», ce qui montre que le travail de la CPI ne se limite pas uniquement aux événements survenus depuis le 7 octobre 2023 mais bien avant.
Pour sa part, la Maison Blanche n’a pas commenté ce qui s’est passé lors de la conversation Biden-Netanyahu mais son porte-parole a déclaré: «La Cour pénale internationale n’a aucune compétence en la matière dans cette situation et nous ne la soutenons pas.»
Le président de la Chambre des représentants issu du parti républicain en l’occurrence l’ultra-sioniste et le très pro-israélien Mike Johnson a publié lundi 30 avril 2024 une communiqué qualifiant l’émission probable de mandats d’arrêt de «honte» et d’«illégale».
Il a poursuivi dans son communiqué: «Si l’administration Biden ne la conteste pas, la Cour pénale internationale va créer et s’octroyer un pouvoir sans précédent pour émettre des mandats d’arrêt contre les dirigeants politiques, les diplomates et les soldats américains.»
La rhétorique israélienne reprise par les dirigeants américains
M. Johnson n’explique pas pourquoi il évoque des représailles contre des responsables américains alors que la CPI pourrait sévir contre les responsables israéliens et non américains. Peut être veut-il exagérer la chose pour semer la panique et nourrir le dénigrement à l’endroit de la CPI? Et si c’était aussi un aveu que les Etats-Unis participent directement avec leur armée au génocide perpétré actuellement par Israël dans la bande de Gaza?
D’ailleurs ces réactions excessives et dépouillées de toute logique de la part M. Johnson ne sont pas étonnantes. Il parle souvent comme s’il était le porte-parole du gouvernement israélien et non pas comme un responsable américain. Il avait repris verbatim la rhétorique israélienne dans sa réaction concernant la forte mobilisation pro-palestinienne sur les campus universitaires américains comme nous l’avons rapporté dans notre article «Khan émettra-t-il un mandat d’arrêt international contre Netanyahu?»
Mike Johnson a également appelé Biden à demander immédiatement et sans équivoque à la CPI d’arrêter ses procédures et d’utiliser tous les moyens à sa disposition pour empêcher cet «acte abominable». Aucun respect d’une juridiction internationale comme la CPI de la part de ce Johnson, seule l’impunité d’Israël prime pour lui.
Le président de la Chambre des représentants a joint sa voix à celle d’un certain nombre de républicains qui ont critiqué la CPI ces derniers jours. Un représentant républicain a déclaré à Axios qu’un projet de résolution était en cours de rédaction en réponse aux probables mandats d’arrêt.
Le président de la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants, le républicain du Texas Michael McCaul, a déclaré qu’il attendait une copie du projet en cours de préparation par le sénateur républicain de l’Arkansas Tom Cotton concernant l’imposition de sanctions aux fonctionnaires de la CPI qui sont liés à l’enquête sur les responsables américains et leurs alliés mais il a ajouté : «Nous espérons que les choses n’en arriveront pas à ce point.»
Le représentant démocrate de Californie Brad Sherman a déclaré que les États-Unis devraient «se demander s’ils resteront signataires du Statut de Rome», statut en vertu duquel la CPI a été créée. «Nous devons réfléchir à discuter avec certains des pays qui ont signé le traité et déterminer s’ils sont disposés à soutenir l’organisation», poursuit-il.
Deux ardents partisans d’Israël, le démocrate de New York Ritchie Torres et le sénateur démocrate de Pennsylvanie John Fetterman, ont également critiqué la CPI. Torres mettant en garde le président et le Congrès des graves conséquences. Dans un message sur la plateforme X, il a déclaré: «Je sais que le Congrès imposera des répercussions pour une décision aussi étrange.»
Dans le même temps, Pamela Jayapal, représentante démocrate progressiste et critique d’Israël depuis Washington, a déclaré que la CPI est «une entité indépendante et qu’elle doit fonctionner comme elle le souhaite». Le représentant démocrate du Wisconsin et autre critique d’Israël Mark Pocan a considéré que «le Congrès n’a pas à leur dire quoi faire».
Un certain nombre de démocrates estiment qu’il est trop tôt pour parler de mandats d’arrêt avant qu’ils ne soient révélés. Le représentant démocrate du Massachusetts Jim McGovern a déclaré: «Pourquoi n’attendons-nous pas de voir ce qui se passe, puis évaluons-nous la situation en fonction de ce qui en ressort?». Dan Kildee, un démocrate du Michigan, a déclaré qu’il «avait des signes d’inquiétude face à la guerre» et «qu’il est toujours préférable de connaître les faits avant de porter un jugement».
Menaces et intimidations d’une rare violence
Axios avait précédemment révélé également dans dans un article de son correspondant à Tel Aviv Barak Ravid une demande de Biden d’intervenir et d’empêcher la CPI d’émettre des mandats d’arrêt contre des responsables israéliens liés à la guerre de Gaza.
Ces menaces et intimidations d’une rare violence et arrogance de la part de ces officiels américains montrent d’abord qu’ils s’ingèrent dans le travail d’une juridiction internationale ce qui est illégal. Ensuite, ceci est révélateur que ces responsables américains hautains considèrent le droit international et les institutions internationales comme des gadgets qui doivent être à leur service. Ils doivent servir uniquement à sévir contre leurs adversaires et à les punir sévèrement par contre ils considèrent comme inconcevable et comme relevant de l’hérésie que le droit international et les juridictions internationales appliquent les mêmes règles à eux et à leurs alliés surtout à Israël, chouchou intouchable des États-Unis depuis 1948. Preuve en est, quand la CPI avait émis un mandat d’arrêt international contre le président russe Vladimir Poutine, pour eux c’était un droit acquis et ça devait être fait mais un mandat d’arrêt international contre le génocidaire Benjamin Netanyahu et ses complices, c’est hors de question!
Enfin, si un État africain ou arabe avait menacé la CPI comme le fait le Congrès américain via le président de la Chambre des représentants ainsi que des représentants et des sénateurs, ça aurait été un tollé international et ils les auraient traité de tous les noms d’oiseaux mais quand ce comportement vient des responsables américains, il devient normal et il n’y a aucun tollé.
Les responsables américains se comportent comme des cowboys qui piétinent le droit international et malmènent vulgairement les juridictions internationales pour voler au secours d’Israël.
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