A  propos de la crise des municipalités en Tunisie

La dissolution des conseils municipaux issus des élections de 2018, et ce dans le cadre de l’état d’exception proclamé le 25 juillet 2021 par le président de la république Kaïs Saïed, a peut-être réglé quelques problèmes, mais elle en a créés beaucoup d’autres qui sont à l’origine de la pagaille qui règne depuis quelque temps dans nos communes. (Illustration: Parc Sidi Bou Said. Ph. Afek Ben Chahed).

Leith Lakhoua *

Depuis mars 2023, les municipalités du pays sont plongées dans une crise profonde suite à la dissolution de leurs conseils municipaux. Cette décision a transféré la responsabilité des affaires communales aux secrétaires généraux sous la supervision du ministère de l’Intérieur. Malheureusement, cette transition a révélé des lacunes importantes dans la gestion quotidienne des collectivités locales.

Des défaillances en série

Les secrétaires généraux, bien que désignés pour coordonner les activités municipales, se retrouvent avec des équipes réduites et insuffisantes pour faire face aux défis de la gestion urbaine.

Les conséquences de cette défaillance sont palpables : les plans locaux d’urbanisme stagnent, la gestion des parcs et jardins publics est négligée, la propreté des communes est en déclin, et la réglementation des droits de stationnement est défaillante.

Cette situation a ouvert la voie à une loi de la jungle où des lobbys puissants ont pris le contrôle de diverses ressources municipales. Ces groupes, souvent associés à des pratiques mafieuses, exploitent les failles laissées par la vacance des conseils municipaux. Les citoyens se retrouvent alors pris en otage de ces pratiques abusives. Les exemples sont nombreux : l’accaparement des droits de stationnement avec des dispositifs illégaux comme les «sabots» ou «chenguel», et la gestion déplorable des parcs publics.

Anarchie à Sidi Bou Said

Le parc Sidi Bou Said illustre particulièrement cette dérive. Ce parc, en état de délabrement avancé, a été pris en main par le propriétaire d’un café adjacent. Celui-ci a organisé le stationnement des véhicules à l’intérieur du parc, ce qui est formellement interdit. Les équipements du parc sont défectueux, le sol est abîmé, et l’entretien des plantes est quasi inexistant. L’installation d’une colonie de grenouilles dans le fleuve artificiel, autrefois peuplé de canards, témoigne de la négligence des responsables.

Face à cette situation chaotique, il est impératif que la présidence intervienne de manière décisive. La reprise en main des conseils municipaux, en particulier ceux qui attirent l’attention des lobbys, semble nécessaire pour rétablir l’ordre et protéger les intérêts des citoyens. La mise en place de cellules de suivi pourrait permettre de surveiller de près la gestion des ressources communales et d’endiguer les abus. Le rétablissement d’une gouvernance municipale fonctionnelle est essentiel pour restaurer la confiance des citoyens et garantir une gestion équitable des biens publics.

* Consultant en logistique industrielle.

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