Riadh Jrad a appelé Kaïs Saïed à «envoyer des messages rassurants à toutes les catégories et les couches sociales, et toutes les régions, à travers un discours positif lors de la cérémonie de prestation de serment» devant les deux chambres parlementaires réunies, qui lui sont totalement acquises.
Le jeune chroniqueur de la chaîne Attessia, connu pour sa véhémente opposition aux… opposants au président de la république, intervenait hier, lundi 7 octobre 2024, dans l’émission ‘‘Rendez-vous 9’’, suite à la confirmation par l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) du «triomphe» du président sortant par un score sans appel de 90% au scrutin présidentiel tenu la veille et marqué par un taux d’abstention officiel de plus de 70%. Ses propos ont été rapportés par Diwan FM.
Jrad considère-t-il que le discours belliqueux habituel de Saïed, accusant souvent ses opposants de corruption, de traitrise et d’allégeance aux puissances étrangères, risquait de lui aliéner le soutien de beaucoup de Tunisiens ? C’est, en tout cas, ce que laisse penser son appel sous forme de supplication, sauf qu’avec le score astronomique de 90% dont l’Isie a crédité le locataire du palais de Carthage, et qui a valeur de plébiscite, la crainte du jeune chroniqueur nous paraît exagérée. Avec un tel résultat, Saïed doit penser qu’il a un boulevard devant lui pour poursuivre sa politique de… «libération nationale». Ce n’est visiblement pas l’avis de Jrad qui est considéré comme l’un de ses plus fervents soutiens.
«Monsieur le président, je vous prie de profiter positivement de cet espoir et de cette joie et de démentir les allégations selon lesquelles vous seriez l’ennemi des hommes d’affaires, du capital, des partis, des corps intermédiaires et des organisations nationales, ce que je ne crois pas», a lancé Jrad, énumérant ainsi les griefs souvent exprimés à l’encontre de Kaïs Saïed et qui trouvent souvent leur justification dans les déclarations mêmes du chef de l’Etat.
«Vous avez aujourd’hui une grande responsabilité. Menons notre pays de la rive du désespoir et du découragement vers celle de la construction et de l’édification», a encore souligné Jrad, ajoutant sur le même ton de la supplication : «Je vous en supplie. Nous ne voulons pas que la joie et l’espoir [de l’élection de Saïed, Ndlr] se transforment en déception, car les conséquences en seront graves».
On ne sait pas si ces supplications ont été transmises au président de la république, ni ce qu’en pense ce dernier, qui habituellement n’en fait qu’à sa tête, mais pour une fois que cet agitateur politique à l’insulte facile dit quelque chose de censé (ça lui arrive très rarement il est vrai), on aimerait bien qu’il soit entendu par celui à qui ses supplications sont adressées.
On ne sait pas non plus si les opposants à Saïed vont apprécier les appels de Jrad ou lui en être reconnaissants, et s’ils vont oublier toutes les insultes dont il les a abreuvés au cours des trois dernières années, et même avant lorsqu’il ne jurait que par Nabil Karoui, son ancien maître à penser. Mais, quoi qu’il en soit, et au moment même où Jrad parlait, des dizaines de dirigeants politiques, d’activistes de la société civile, d’hommes d’affaires, de journalistes, de blogueurs et de simples citoyens croupissaient en prison, poursuivis dans des affaires… d’opinion.
I. B.
Donnez votre avis