Les pays occidentaux donnent l’impression de s’être enfin réveillés en changeant leur ton avec Israël concernant sa guerre génocidaire livrée aux Palestiniens à Gaza depuis octobre 2023 sauf qu’il y a un fossé entre les paroles et les actes.
Imed Bahri
Les États-Unis prétendent agir pour mettre fin à la guerre mais pas plus tard qu’hier, mercredi 28 mai 2025, ils ont livré la 800e cargaison d’armes à Israël portant l’aide militaire totale de Washington depuis le début de la guerre de Gaza à plus de 90 000 tonnes, selon les responsables israéliens.
Les Européens n’ont pas suspendu, eux non plus, leurs exportations d’armes vers Israël. Ils poursuivent une collaboration étroite et refusent catégoriquement qu’Israël soit accusé de génocide.
Dans une enquête de son correspondant Patrick Kingsley, le New York Times (NYT) a évoqué la vague de condamnations des puissants alliés d’Israël qui est intervenue sur la tard alors que la guerre dévastatrice contre Gaza dure depuis plus d’un an et demi. Ils donnent l’impression de vouloir que cette guerre prenne fin.
Cependant, et en dépit des déclarations teintées d’embarras et de vague colère, ces pays continuent de soutenir Israël militairement, économiquement et en matière de renseignement, ce qui incite le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu à poursuivre les massacres des civils à Gaza.
Au cours de plus de 18 mois de guerre, Israël a fait face à d’intenses critiques de la part des dirigeants étrangers et des organisations humanitaires mais a rarement fait face à une condamnation publique de la part de ses alliés, encore moins suivies par des menaces de conséquences tangibles.
L’aide militaire occidentale à Israël se poursuit
Ces dernières semaines, des partenaires tels que les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France ont exprimé une forte volonté d’exercer une pression publique sur Israël aboutissant à l’appel du président Trump dimanche à une désescalade de la guerre.
«Nous avons parlé avec eux (les Israéliens, Ndlr) et nous voulons voir si nous pouvons mettre fin à toute cette situation le plus rapidement possible», a déclaré Trump aux journalistes dans le New Jersey avant de monter à bord d’Air Force One. Il parle de «situation» mais pas de guerre ou de massacres, et encore moins de génocide. Ce qui aurait été plus juste.
Ces commentaires contrastent cependant avec la position publique de Trump lors de sa prise de fonction en janvier lorsqu’il a accusé le Hamas plutôt qu’Israël d’être responsable de la guerre en cours. Il a également tenu à présenter un front uni avec le Premier ministre israélien.
La dernière déclaration de Trump intervient quelques heures avant que le gouvernement allemand, habituellement grand partisan d’Israël (pour se faire pardonner ses massacres de juifs sous le régime nazi), n’exprime des critiques inhabituellement fortes à l’égard des attaques massives d’Israël contre Gaza. «Je ne comprends pas franchement le but de causer de telles souffrances à la population civile», a déclaré lundi Friedrich Merz, le nouveau chancelier allemand, lors d’une interview télévisée.
Ce changement de position allemand intervient quelques jours après une intervention similaire du gouvernement italien de droite, un autre allié d’Israël qui avait jusqu’alors évité une condamnation aussi forte. «Netanyahu doit cesser ses raids sur Gaza. Nous avons besoin d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages détenus par le Hamas qui doivent quitter Gaza», a déclaré le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani, dans une interview publiée sur le site internet de son ministère.
Ces commentaires font suite à un effort coordonné de la Grande-Bretagne, du Canada et de la France pour critiquer la décision d’Israël d’étendre ses opérations à Gaza. Dans une déclaration commune publiée la semaine dernière, les trois pays, qui ont largement soutenu le droit d’Israël à répondre à l’opération Déluge d’Al-Aqsa du 7 octobre 2023, ont estimé que l’expansion de la guerre était totalement disproportionnée. Les trois pays ont mis en garde contre de graves conséquences si Israël ne changeait pas de cap.
Les intérêts israéliens passent avant toute autre chose
La Grande-Bretagne a depuis suspendu ses négociations commerciales avec Israël. Elle a également imposé des sanctions aux extrémistes israéliens qui cherchent à forcer les Palestiniens à quitter leurs terres en Cisjordanie occupée. C’est l’une de ses mesures les plus radicales contre les intérêts israéliens depuis qu’elle a abandonné son opposition l’année dernière au mandat d’arrêt émis contre Netanyahu par la Cour pénale internationale (CPI).
Par ailleurs, la France organise en juin une conférence en partenariat avec l’Arabie saoudite pour discuter de la création d’un État palestinien, ce que Netanyahu refuse catégoriquement, en menaçant de rattacher la Cisjordanie à Israël si la France venait à reconnaître un État palestinien.
Cependant, tous ces pays continuent de soutenir Israël de nombreuses manières concrètes notamment par le biais de partenariats militaires, économiques et en matière de renseignement. Leurs déclarations vaguement critiques à l’égard d’Israël se sont si vite évaporées que l’on se demande pourquoi ils les ont faites, d’autant qu’ils ont presque tous poursuivi leurs livraisons d’armes à l’Etat hébreu.
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