Le premier Prix Mahmoud Darwich de poésie, des lettres et des arts a été décerné, à titre posthume, lors d’une cérémonie qui s’est tenue à Tunis le 13 juin 2025 à l’espace Al-Kitab, à Tunis, sous le thème «La poésie comme résistance». L’occasion de rendre hommage à deux figures majeures de la poésie et de la littérature arabe : Mahmoud Darwich, poète palestinien emblématique, et Mohamed Sghaïer Ouled Ahmed, poète tunisien récompensé par ce prix pour l’ensemble de son œuvre.
Abdelhamid Larguèche *

Mahmoud Darwich (1941-2008) est considéré comme un grand représentant de la poésie engagée. Né en Palestine, il a vécu l’errance de l’exil forcé après la destruction de son village natal, une expérience qui a profondément marqué son écriture. À travers plus de trente recueils poétiques et essais, il a transformé la poésie en un outil de résistance contre l’oppression coloniale, l’occupation et l’effacement identitaire. Son engagement politique, notamment au sein de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), et ses textes fondateurs, comme la Déclaration d’indépendance de la Palestine en 1988, témoignent de son combat pour la dignité et la liberté.
Darwich a donné une voix universelle à la cause palestinienne, mêlant beauté poétique et lutte humaniste.

Le 1er Prix portant le nom du célèbre poète a été décerné à titre posthume à un autre célèbre poète, le Tunisien Mohamed Sghaïer Ouled Ahmed, dont l’œuvre incarne les mêmes valeurs de résistance et d’humanisme. À travers ses écrits, il a capturé les souffrances et les espoirs du peuple tunisien, transformant le quotidien en épopée. Son engagement pour la liberté et la justice sociale en fait une figure majeure de la poésie arabe moderne. Le jury a salué sa capacité à lier l’esthétique poétique à un message politique profond, faisant de lui un digne héritier de l’esprit de Darwich.
Une poésie ancrée dans la lutte
La cérémonie a mis en lumière les liens profonds unissant la Palestine et la Tunisie à travers la poésie. Les discours ont souligné comment Darwich et Ouled Ahmed, bien qu’issus de contextes différents, partageaient une même vision : celle d’une poésie ancrée dans la lutte pour la dignité et la liberté. Le choix de décerner ce prix à un poète tunisien symbolise l’universalité du message porté par Darwich, mais aussi cette vieille amitié entre deux pays et deux poètes qui ont tant partagé, aussi bien la douleur que la joie.

«La poésie n’est pas seulement des mots, c’est la blessure la plus proche de la lumière du soleil », disait Mahmoud Darwich. Lui faisant écho, Mohamed Sghaïer Ouled Ahmed exprimait la même blessure : «Je n’aime pas les pays comme les aime le touriste, mais comme les aime le révolutionnaire, le malade, la mère, le prisonnier…»
Bien plus qu’une récompense littéraire, le Prix Mahmoud Darwich est un acte politique et symbolique. Il célèbre des artistes dont les mots transcendent les frontières pour porter un message de résistance et d’espoir. En honorant Mohamed Sgaïer Ouled Ahmed, la Tunisie réaffirme son attachement aux valeurs de justice et de liberté, tout en perpétuant l’héritage de Mahmoud Darwich.
* Historien et président du jury du Prix Mahmoud Darwich.
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