Le processus électoral en vue des prochaines présidentielles en Tunisie avance cahin-caha, plutôt difficilement, l’enthousiasme affiché au départ par les candidats à la candidature dégénérant souvent chez certains d’entre eux en récriminations et en dénonciations des obstacles que met l’administration publique sur leur chemin. Ambiance…
Imed Bahri
L’organisation tunisienne I Watch, affiliée à Transparency International, annonce avoir signalé des «violations pouvant mettre en péril le droit d’éligibilité», et appelle l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie) à «assumer l’entière responsabilité d’assurer un scrutin neutre et un climat électoral impartial pendant la période restante de réception des candidatures, dans le respect du principe d’équité et d’égalité des chances pour les candidats potentiels».
Le dépôt des candidatures pour l’élection présidentielle du 6 octobre a débuté lundi dernier, 29 juillet, et se poursuivra jusqu’au 6 août. Des candidatures qui nécessitent des critères d’acceptation draconiens : les candidats doivent en effet présenter, entre autres documents, le bulletin n° 3 attestant d’un casier judiciaire vide, le parrainage de 10 parlementaires ou de 40 présidents de collectivités locales ou de 10 000 électeurs avec au moins 500 signatures dans 10 circonscriptions électorales différentes, «un chiffre énorme», estime Amine Kharrat, analyste de l’observatoire Al-Bawsala.
I Watch estime dans un communiqué publié le 30 juillet que le silence de la commission électorale sur ce qu’elle décrit comme «les désagréments auxquels sont soumis certains candidats potentiels et leurs représentants de la part de structures étatiques au cours du processus de collecte des parrainage, alors qu’elle est [ladite commission] responsable du bon déroulement du processus électoral, indique qu’elle ne traite pas tous les candidats potentiels de manière impartiale».
Selon l’ONG, le fait de ne pas avoir délivré à certains candidats le fameux bulletin n°3 «implique des structures de l’État, notamment le ministère de l’Intérieur, dans le refus à certains candidats potentiels du droit de se faire élire», cequi constitue, selon elle, une «violation des principes de neutralité de l’administration», peut-on lire dans le communiqué.
Le président de l’Isie, Farouk Bouasker, a pour sa part confirmé dans une déclaration aux médias que l’Isie est en coordination constante avec les ministères de l’Intérieur, de la Justice et des Finances et toutes les parties prenantes liées aux élections pour faciliter le processus d’obtention des documents et les procédures de dépôt de candidature pour chaque citoyen tunisien remplissant les conditions légales et réglementaires requises.
Compte tenu de la difficulté particulière de remplir toutes les conditions de candidature, le porte-parole de l’Isie a déclaré que, même si plus d’une centaine de personnes ont récupéré les formulaires de candidature, il y aura probablement une douzaine de candidats admis à l’élection présidentielle du 6 octobre.
Par ailleurs, et dans ce même contexte, plusieurs candidats à la candidature continuent de déplorer, dans des commentaires sur les réseaux sociaux, une volonté claire de les exclure de la course au Palais de Carthage.
Ils affirment faire face à de nombreux obstacles pour rassembler les 10 000 parrainages populaires exigés et pour constituer leurs dossiers de candidature à remettre à la commission électorale, demandant à celle-ci une prolongation du délai de collecte des parrainages, dans le respect du calendrier électoral.
Selon ces candidats potentiels, les pratiques bureaucratiques et les difficultés du pays révèlent une volonté manifeste de les empêcher et de les exclure. Ce qui met en danger la crédibilité du processus électoral dans son ensemble, disent-ils, et met à mal les fondements mêmes d’une concurrence loyale, qui respecte le peuple en tant qu’arbitre final, lui permettant, disent-ils encore, de choisir librement ses représentants.