«Tout comme nous avons agi avec force contre les bras armés terroristes de l’axe du mal iranien à Gaza, au Liban et en Syrie, nous agirons contre les Houthis» : c’est par ces mots que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a réagi à la frappe du groupe chiite yéménite Ansar Allah communément appelé les Houthis du Yémen qui a fait 16 blessés à Tel-Aviv. Lundi, Netanyahu a ordonné à l’armée israélienne de bombarder l’infrastructure du groupe chiite yéménite.
Imed Bahri
À l’heure où le Hezbollah sort épuisé d’une guerre contre Israël et que son état-major politique et militaire a été décimé et que le régime de Bachar Al-Assad, principal allié régional de la République islamique d’Iran, est tombé, il ne reste plus dans l’axe iranien que les milices chiites irakiennes qui se tiennent à l’écart et les Houthis au Yémen qui sont fortement attaqués par les États-Unis et Israël ces derniers temps et qui entendent réagir avec de plus en plus d’agressivité en ciblant à la fois l’intérieur israélien mais aussi l’armée américaine.
Le journal israélien Yedioth Ahronoth a estimé que l’incident de la destruction d’un avion de combat américain F-18 au-dessus de la mer Rouge la semaine dernière révèle l’ampleur du grand défi posé par les Houthis non seulement à Israël mais aussi aux États-Unis et à la communauté internationale.
Alors que les Houthis n’ont pas tardé à revendiquer la responsabilité de l’abattage de l’avion, Washington a déclaré qu’un navire de guerre américain l’avait abattu par erreur mais le journal israélien a rapporté que le Pentagone n’avait pas précisé si les tirs amis étaient directement liés aux combats en cours là-bas décrivant l’incident comme l’un des plus dangereux auxquels les forces américaines ont été exposées au Moyen-Orient.
Le journal israélien estime que la capacité de la coalition dirigée par les États-Unis à dissuader les Houthis est mise en doute après que la milice yéménite ait fait preuve de fermeté face aux frappes aériennes «ignorant» les graves souffrances des civils au Yémen.
Des mesures américaines insuffisantes
Le Yedioth Ahronoth rappelle que le sous-secrétaire américain à la Défense chargé de l’Acquisition et du Soutien, William LaPlante, avait averti le mois dernier que les Houthis étaient «devenus effrayants» et qu’il était «étonné par les technologies auxquelles ils ont désormais accès».
Selon le journal israélien, les attaques des Houthis contre Israël avec des missiles et des drones et contre des navires civils traversant la mer Rouge placent l’administration du président américain Joe Biden dans une position difficile car elles coïncident avec ses efforts de médiation pour mettre fin à la guerre intra-yéménite ainsi que le conflit saoudo-houthi. Biden avait retiré ce groupe de la liste américaine des organisations terroristes dès son entrée en fonction tandis que l’administration américaine a évité au cours de l’année écoulée de lancer des attaques directes et à grande échelle contre des cibles houthistes dans le but de maintenir les efforts diplomatiques et empêcher une escalade plus large dans la région.
Cependant, Washington a formé une coalition internationale visant à dissuader les opérations des Houthis en mer Rouge tandis qu’Israël a exprimé son mécontentement face à ce qu’il considère comme des mesures américaines insuffisantes contre la milice yéménite.
Le journal rapporte que l’armée israélienne a intercepté lundi un drone lancé depuis le Yémen mais qu’elle n’a pas réussi à intercepter deux missiles balistiques la semaine dernière.
Le Yedioth Ahronoth indique aussi qu’alors que les tensions continuent de monter, la possibilité que les États-Unis et leurs alliés intensifient leurs opérations militaires demeure d’autant plus que le président américain élu Donald Trump se prépare à prendre officiellement ses fonctions le mois prochain.
Evolution rapide des capacités des Houthis
Bien que le Wall Street Journal ait cité lundi un responsable militaire américain selon lequel la coalition avait abattu 450 drones lancés par les Houthis, le Yedioth Ahronoth confirme que les capacités technologiques possédées par les Houthis posent encore des défis majeurs comme en témoigne l’échec du système de défense antimissile israélien.
Un rapport de l’Onu publié en novembre a indiqué que «l’ampleur, la nature et la portée des transferts de divers équipements et technologies militaires fournis aux Houthis à partir de sources extérieures –y compris le soutien financier et la formation de leurs combattants– sont sans précédent».
Cette évolution rapide des capacités des Houthis a alarmé les analystes. Yedioth Ahronoth rapporte que Muhammad Al-Basha, un analyste de la sécurité au Moyen-Orient basé aux États-Unis, avait déclaré au site Internet Pacha Report en 2004 que les Houthis étaient un groupe assiégé se cachant dans les montagnes et que maintenant, ils poursuivent les porte-avions américains avec des missiles et des drones et les frappent à deux mille kilomètres du centre du Yémen.
D’autres analystes préviennent que ce changement de capacités pourrait s’intensifier si l’Iran accroît son soutien aux Houthis à l’heure où la République islamique face à des revers au Liban et en Syrie.
Même si les États-Unis accélèrent leurs opérations, les experts doutent de la possibilité de les dissuader. «Les Houthis ne se soucient pas de ce qu’ils perdent car ils veulent gagner et affronter les puissances mondiales», selon Osama Al-Rohani, directeur du Centre d’études stratégiques de Sanaa, un centre de recherche indépendant basé au Yémen.
Toutefois, ils ne sont pas non plus des naïfs et craignent que leur chef Abdelmalek Badreddine Al-Houthi ne subisse le sort funeste de Hassan Nasrallah et de Yahya Sinwar et l’ont donc caché dans une grotte dans les montagnes du nord du Yémen la fin de la semaine dernière.
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