Les banques tunisiennes n’ont pas assez financé l’économie, sont les plus vulnérables en Afrique, selon Fitch Ratings, mais elles continuent quand même d’améliorer leurs revenus. Comment expliquer ce paradoxe ?
Par Amine Ben Gamra *
Un secteur bancaire robuste est capable de faire face à différents chocs négatifs tout en contribuant à la stabilité du système financier. Cependant, un système bancaire faible peut déclencher la fuite des capitaux et forcer une éventuelle hausse du taux d’intérêt, affaiblir le financement de l’économie et abandonner le secteur privé lors des périodes de récession ou de crise économique.
En Tunisie, l’amélioration continue des revenus des banques peut cacher la vulnérabilité du système bancaire dans son ensemble, ce qui constitue l’une des causes prédominantes des crises financières.
Ralentissement des crédits à l’investissement
Au terme du premier trimestre 2022, l’ensemble du secteur financier coté à la Bourse de Tunis, comprenant 12 banques, 5 compagnies d’assurance et 10 sociétés de services financiers et de leasing, a dégagé un revenu global de 1,9 milliard de dinars tunisiens (625 millions de dollars) en hausse de 11,6% par rapport aux 1,7 milliard de dinars réalisé sur la même période en 2021.
En 2021, les banques ont vu leur encours des crédits afficher une croissance modérée de 4,6% à 77,1 milliards de dinars. Cette croissance modérée s’explique par l’accroissement rapide des crédits à la consommation ayant surtout touché les crédits de logements et les prêts pour l’acquisition de voitures.
Par contre, le secteur a connu un essoufflement quasi général de son activité de crédit à l’investissement qui s’explique, d’une part, par la morosité du climat des affaires qui a induit une baisse de la demande des crédits pour le financement de projets, et d’autre part, par la volonté des banques d’accorder la priorité à la collecte des dépôts plus qu’à la distribution des credits à l’investissement.
Les banques tunisiennes les plus vulnérables d’Afrique
L’agence de notation américaine Fitch Ratings, qui a abaissé, une nouvelle fois, en mars, la note souveraine de la Tunisie, affirme que les établissements bancaires de notre pays sont parmi les plus vulnérables d’Afrique face aux retombées de la guerre russo-ukrainienne.
Selon Fitch Ratings, les conséquences indirectes du conflit : hausse des prix de l’énergie; inflation, notamment des denrées alimentaires de base; et baisse des flux des capitaux étrangers, devraient accélérer les risques d’insolvabilité de ces banques et réduire encore davantage leur contribution à l’économie nationale, et pas seulement en termes de crédits à l’investissement.
* Expert comptable, commissaire aux comptes, membre de l’Ordre des experts comptables de Tunisie.
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