Le rééquilibrage des relations de la Tunisie avec ses frères et voisins maghrébins est nécessaire, pour qu’elle puisse jouer un rôle constructif, serein, de bonne foi et sans parti-pris en vue de la solution de la crise libyenne et du différend algéro-marocain sur le Sahara. Car la stabilité et la prospérité du Maghreb sont des conditions essentielles pour la stabilité et la prospérité de la Tunisie.
Par Elyes Kasri *
N’en déplaise aux révolutionnaires adeptes du big bang politique et diplomatique qui s’acharnent à réinventer la roue, les fondamentaux de la diplomatie tunisienne ne sont pas une invention bourguibienne mais une lecture perspicace par feu Habib Bourguiba des réalités internationales et des contraintes objectives et immuables, historiques, géographiques, économiques et sécuritaires qui façonnent les intérêts de la Tunisie et son positionnement sur la scène internationale.
La non ingérence dans les affaires intérieures des pays tiers et en premier lieu les pays voisins, l’adhésion inconditionnelle à la légalité internationale, le règlement pacifique des différends et conflits internationaux par le recours à la légalité et aux instances internationales compétentes et la priorité à la coopération et au développement internationaux ont été sous Bourguiba et Ben Ali les fondements de la diplomatie tunisienne et doivent le rester indéfiniment.
La Tunisie victime d’expérimentations politiques et économiques
Malheureusement, l’ère post révolution a remis en question la sérénité de nos relations avec nos voisins maghrébins en permettant la déstabilisation de la Libye qui a fini par faire régner le chaos dans ce pays voisin et des penchants tantôt pro-marocains par le «Tartour» national (l’ancien président par intérim Moncef Marzouki, Ndlr) pour des raisons personnelles qui n’échappent pas aux connaisseurs et tantôt pro-algériens pour des raisons que certains imputent, probablement à tort, à des motifs bassement matériels et conjoncturels. Ceci en plus des nostalgies ottomanes des goumis islamistes.
La Tunisie a été déjà suffisamment victime de tant d’expérimentations politiques et économiques avec des résultats qui en ont fait un cas d’école de quasi faillite politique et économique d’un pays émergent en un laps de temps relativement court.
Il est grand temps de revenir aux fondamentaux de la diplomatie tunisienne notamment la neutralité positive vis-à-vis des différends régionaux et internationaux et l’adhésion à la légalité internationale, sans lesquels la crise que traverse la Tunisie risque de s’aggraver et pourrait même devenir irréversible.
Le nécessaire rééquilibrage des relations avec l’Algérie et le Maroc
L’édifice maghrébin qui, plus qu’un rêve populaire, est un impératif culturel, économique et sécuritaire pour les peuples de notre région, doit être préservé en dépit des vicissitudes de la géopolitique et des divergences et tensions du moment.
Le rééquilibrage de nos relations avec nos frères et voisins maghrébins et un rôle constructif, serein, de bonne foi et sans parti-pris de la Tunisie en vue de la solution de la crise libyenne et du différend algéro-marocain (sur le Sahara, Ndlr), ne feront que servir l’image et les intérêts de la Tunisie car la stabilité et la prospérité du Maghreb sont des conditions essentielles pour la stabilité et la prospérité de la Tunisie.
* Ancien ambassadeur au Japon et en Allemagne.
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