Il est tout de même étonnant qu’en Tunisie, un pays soumis à la volonté d’un seul homme, le président Saïs Saïed en l’occurrence, certains osent encore parler de démocratie, d’élections voire même de politique, à l’instar de Farouk Bouasker, ci-devant président d’une commission électorale que n’aurait pas renié feu Ben Ali. (Illustration: Farouk Bouasker n’a à rendre compte qu’au président Kaïs Saïed).
Par Imed Bahri
En appelant tous ceux qui entendent se présenter aux élections législatives du 17 décembre prochain, à commencer dès maintenant à préparer leurs dossiers, et à ne pas attendre la semaine du dépôt des candidatures, à la mi-octobre, le chef de l’Instance supérieure indépendante pour les Elections (Isie), Farouk Bouasker, fait comme si les candidats allaient se bousculer au portillon. Il sait pourtant que des données objectives laissent présager un immense pschitt à la hauteur de la mégalomanie du président de la république, qui n’a pas fait dans la dentelle en promulguant par décret une nouvelle constitution et une nouvelle loi électorale qui vident l’acte même de candidature à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) de tout intérêt.
Le boycott se généralise
M. Bouasker, qui intervenait hier, jeudi 22 septembre 2022, sur Shems FM, a fait comme si ce débat sur l’utilité et la légalité de ce scrutin n’existait pas, sachant que la plupart des forces politiques qui comptent dans le pays ont déjà décidé de ne pas y participer et que, même pour les médiocres et les opportunistes habituels, qui pensent à juste titre que ce sera l’occasion ou jamais pour eux de siéger sous la coupole du palais du Bardo, le dépôt de candidature ne sera pas une sinécure, car ils vont devoir réunir 400 parrainages, à moitié constitués de femmes et au quart de jeunes, les faire légaliser par les autorités concernées et financer leurs campagnes par leurs propres deniers, comme le stipule la nouvelle loi électorale. Bonjour donc l’argent sale, le népotisme, le clanisme et les petites combines…
Les documents requis pour le dépôt de candidature sont un bulletin n° 3 ou un reçu du dépôt de la demande y afférente auprès des autorités, une attestation de paiement de l’impôt sur le revenu, une attestation de paiement de la taxe municipale et un certificat de résidence, a cru devoir rappeler M. Bouasker, dont le cauchemar, on l’image, est d’avoir à gérer une élection froide et fade, car sans intérêt pour les partis politiques et boycottée par l’écrasante majorité des Tunisiens, dont le taux de participation a toujours été très faible et le taux d’abstention très fort, comme ce fut le cas lors du référendum constitutionnel du 15 juillet dernier (75%).
On ose encore parler d’élections
Tout en admettant que la principale difficulté réside dans la collecte des 400 parrainages, M. Bouasker a cru aussi devoir appeler les éventuels candidats à un si improbable scrutin à commencer dès maintenant à préparer leur dossier, trahissant ainsi les inquiétudes qui sont les siennes, lui et ses collègues de l’Isie, tous triés sur le volet et nommés par décret présidentiel. Dans un pays où tous les pouvoirs sont accaparés par un chef de l’Etat qui n’écoute personne, M. Bouasker et ses collègues sont, forcément, soumis aux désidératas et aux… caprices de ce dernier.
Et on ose encore parler de démocratie, d’élections voire même de politique dans un pays soumis à la volonté d’un seul homme.
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