Malgré le marasme économique, le malaise social et le chaos politique qui règnent en Tunisie, le FMI ne prévoit pas de récession pour notre pays pour les prochains mois. C’est en tout cas ce qui ressort de son rapport publié le 11 octobre 2022 sur la croissance mondiale en 2022 et 2023. Le FMI est lui aussi dans le coup…
Malgré le marasme économique, le malaise social et le chaos politique qui règnent en Tunisie, le FMI ne prévoit pas de récession pour notre pays pour les prochains mois. C’est en tout cas ce qui ressort de son rapport publié le 11 octobre 2022 sur la croissance mondiale en 2022 et 2023. Le FMI est lui aussi dans le coup…
Par Moktar Lamari (à Washington) *
Les chiffres publiés dans ce rapport permettent de dégager trois constats pour la Tunisie.
1- Le rapport prévoit une croissance atone, mais pas de récession (par définition, une récession équivaut à 2 trimestres avec un taux de croissance négatif). Le Taux de croissance prévu pour la Tunisie serait aux alentours de 2,2% pour 2022 et de 1,6% pour 2023, contre un taux mondial de 2,7%, sous réserve de nombreux paramètres.
Pour 2023, la Tunisie sera dernière de tous les pays de la région Mena. Et c’est du jamais vu que notre pays soit si mal loti et avec un taux de croissance aussi mitigé.
Techniquement c’est une situation proche de la stagnation, considérant que la croissance démographique génère automatiquement son effet sur la croissance, en termes de création de richesses et de consommation incompressible à satisfaire.
2- Le rapport présente normalement les indicateurs macroéconomiques, sans trop de données manquantes comme ce fut le cas l’année dernière. Cela veut dire que la ministre des Finances, présente à Washington, a bien fait son travail. Les prévisions du chômage sont manquantes, mais c’est presque normal, la Tunisie n’est pas seule dans ce cas.
Le FMI valide donc les données tunisiennes, signifiant un retour de confiance en matière de production de statistiques économiques, budgétaires et monétaires. La crédibilité des indicateurs économiques constitue un atout, après plusieurs remises en cause, notamment de la part du FMI.
3- En revanche, l’inflation va rester forte et les déficits vont se creuser, déficit commercial galopant, déficit budgétaire de presque 9% du PIB. Énorme et inédit… La dette tunisienne est désormais officiellement insoutenable. Et son fardeau réduira la marge de manœuvre de l’Etat et des services publics, déjà très dégradés.
Ces constats sont lourds de conséquences.
1- Cela requiert plus de dettes, et une accélération des réformes douloureuses pour réduire de facto (forcing) les dépenses et contenir les déficits. Sans dettes additionnelles, le gouvernement ne peut boucler ses budgets pour 2022 et 2023. Les travaux et les discussions officielles pour un nouveau prêt du FMI ne cachent plus la nécessité de restructurer la dette tunisienne, en passant par des instances internationales dédiées. Ce n’est plus un tabou, pour les autorités tunisiennes représentées au siège du FMI à Washington, pour les rencontres annuelles du FMI –Word Bank.
2- La Tunisie doit couper drastiquement dans les subventions des produits alimentaires et de l’énergie. L’arme des files d’attente dans les stations-services et des rayons vides des magasins va consacrer le fait accompli, et ce pour doper la propension à payer du consommateur, une méthode bien rodée ailleurs dans le monde. La politique du fait accompli… avant de rehausser les prix, en réduisant les subventions et en favorisant la vérité des prix. C’est un passage obligé, mais la politique à mener doit minimiser les risques paupérisation et de fragilisation qui fait payer les contribuables la mal-gouvernance des élus.
3- Les chiffres et indicateurs retenus dans ce nouveau rapport sont ceux qui vont servir comme paramètres de négociation et de calculs des cibles à atteindre dans le cadre de l’élaboration des termes de l’accord Tunisie-FMI. C’est important de partir des mêmes chiffres pour les simulations…
* Economiste universitaire au Canada.
Donnez votre avis