Tunisie : les «petites guerres» de Wafa Chedly

Wafa Chedly, chroniqueuse très active sur les réseaux sociaux, s’est autoproclamée championne de la lutte contre la corruption en Tunisie, en multipliant les accusations contre les personnalités publiques… et, par ricochet, les plaintes pour diffamation et diffusion de fausses nouvelles… portée à son encontre. Vidéo.

Par Imed Bahri

Qu’à cela ne tienne, Me Chedly, avocate de son état, est proche de la ministre de la Justice Leila Jaffel, dont elle est l’avocate attitrée sur… les réseaux sociaux et, même, la porte-parole puisque c’est elle qui, récemment, a annoncé que la ministre avait fait l’objet d’une tentative d’assassinat : on aurait, selon elle, une première fois, traficoté les roues de sa voiture et tenté, une seconde fois, de lui bloquer l’ascenseur.

Inutile d’ajouter, à ce propos, que ces faits n’ont pas donné lieu à des enquêtes. Si c’était le cas, le parquet n’en a pas encore officiellement communiqué.

Madame Propre tire sur tout ce qui bouge

Me Chedly inscrit ses accusations à l’emporte-pièce dans le contexte de la guerre contre la corruption supposément menée par le président de la république Kaïs Saïed, dont elle est l’un des plus fervents défenseurs sur les réseaux sociaux, tout en s’attaquant régulièrement à ses opposants et en en faisant les cibles privilégiées de ses flèches.

Madame Propre avait déjà pris pour cible le président de la Fédération tunisienne de football Wadie Jary, en prétendant, qu’il faisait l’objet d’un mandat d’arrêt émis à son contre par la justice dans une affaire de corruption, alors qu’il était à l’étranger et accompagnait les Aigles de Carthage à la Coupe du monde de football Qatar 2022. A son retour à Tunis, M. Jary est rentré directement chez lui sans être arrêté ni même interrogé par la police de l’aéroport de Tunis-Carthage, avant de retrouver le lendemain son bureau et ses activités habituelles. Que nenni ! Il en faudrait plus pour déstabiliser Mme Chedly qui n’en démord pas : «Jary a été entendu par la police et a été laissé en liberté», a-t-elle expliqué.

Dans la guerre par procuration qu’elle mène pour le compte du président de la république contre l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), Mme Chedly s’est offert une nouvelle cible en la personne de Noureddine Taboubi, le puissant secrétaire général de la centrale syndical.

On connaît la thèse de Mme Chedly selon laquelle M. Taboubi et son organisation sont les principaux responsables de la faillite économique de la Tunisie. C’est là une opinion qu’elle partage avec d’autres analystes. Mais la championne de la lutte contre la corruption en Tunisie ne s’est pas arrêtée là : elle s’est attaquée personnellement à M. Taboubi en prétendant qu’il avait bénéficié d’un chèque en provenance des Emirats arabes unis d’un montant de 250 000 euros (soit environ 750 000 dinars tunisiens).

Certes, le fac-similé du chèque en question, qui a été partagé sur les réseaux sociaux, serait un faux. C’est, en tout cas, ce qu’affirment les responsables de l’UGTT qui vont porter plainte en justice contre Mme Chedly… pour diffamation et diffusion de fausses nouvelles. Mais en attendant que la justice dise son mot sur cette nouvelle affaire, Mme Chedly persiste et signe en demandant à la justice d’ouvrir une enquête sur la fortune supposée des dirigeants de l’UGTT et des membres de leurs familles, au cas où ils se seraient enrichis depuis qu’ils ont accédé au bureau exécutif de l’organisation.

«Le dossier est entre les mains du ministère de la Justice. Pourquoi le ministère de la Justice ne m’a-t-il pas démenti ? Je n’ai pas accusé l’UGTT en tant que telle, pourquoi me répond-elle et pas Noureddine Taboubi», a déclaré Mme Chedly dans Studio Shems, lundi 12 décembre 2022. Et d’ajouter, dans une évidente volonté de rattraper le coup, sans faire totalement marche-arrière : «Et puis je ne l’ai pas accusé (Taboubi, Ndlr). J’ai demandé l’ouverture d’une enquête sur le chèque que tout le monde a vu. S’il s’avère quil est un faux, Taboubi serait blanchi par la justice et pourrait relever de nouveau la tête.»

En d’autres termes, Mme Chedly n’accuse pas M. Taboubi de corruption, mais se soucie seulement de son honneur et de celui de l’UGTT. Elle ne voudrait pas, dit-elle, que l’image de la centrale syndicale soit entachée. On devrait donc plutôt l’en remercier !          

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