Mohsen Hassan : «La Tunisie n’est pas au chapitre de l’effondrement»

Les craintes du parlement européen de l’effondrement économique de la Tunisie sont exagérées, a indiqué l’ex-ministre du Commerce et l’expert économique Mohsen Hassan, précisant qu’en dépit de la situation économique difficile du pays, à l’instar de la plupart des États du monde suite à des facteurs extérieurs (Covid-19 et guerre russo-ukrainienne), la situation actuelle dans notre pays n’a pas atteint la phase d’effondrement.

Lundi, 20 mars 2023, Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne (UE) pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité a déclaré que «l’Union européenne s’inquiète de la détérioration de la situation économique et politique de la Tunisie et redoute un effondrement du pays», tout en avertissant que «l’effondrement de la Tunisie entraînerait la recrudescence des flux migratoires.» Borrell a aussi averti que l’UE ne pourra pas aider la Tunisie si celle-ci se montre incapable de signer un accord avec le Fonds monétaire international (FMI).

Dans une déclaration accordée à l’agence Tap, Hassan a précisé que ces crises étrangères ont eu un impact sur la Tunisie, étant donné que son économie est ouverte sur le monde et ont causé un ralentissement de la croissance, estimant la réalisation, en 2023, d’un taux de 1,6% contre 2,2% en 2022.

La Tunisie a rempli les conditions exigées par le FMI

La crise économique en Europe a contribué à la régression de la demande extérieure du pays, d’autant plus que la régression de la croissance en Europe d’un point engendre une baisse de la croissance de près de 0,7% en Tunisie, a-t-il expliqué.

Dans le même contexte, Hassan a ajouté que l’économie tunisienne trébuche également à cause de facteurs endogènes, dont les plus importants sont l’élargissement du déficit énergétique courant et la dégradation des équilibres de la finance publique, en plus de l’aggravation du déficit commercial alimentaire, à cause de la sécheresse enregistrée ces dernières années.

Il a poursuivi que la Tunisie enregistre une hausse du taux d’inflation qui a atteint 10,4% en février 2023 et du taux de chômage, qui dépasse 15% ce qui a contribué au déséquilibre du budget de l’État et a mené au recours aux crédits (intérieur et extérieur).

L’expert s’est dit étonné du fait que le FMI qui n’a pas accordé à la Tunisie les financements attendus (1,9 milliard de dollars sur quatre ans), alors que le pays a rempli les conditions et respecté ses anciens engagements, rappelant à cet égard, que le FMI a accordé cette semaine un crédit à Sri Lanka de 2,9 milliards de dollars en dépit des difficultés financières que traverse ce pays, et un autre financement à l’Ukraine de 15,6 milliards de dollars.

Selon Hassan, la Tunisie obtiendrait, durant les prochaines semaines, un accord du FMI, vu qu’elle a rempli toutes les conditions techniques relatives à la mise en place d’un programme des réformes, l’adoption de la loi relative aux entreprises publiques, et la mise en œuvre des réformes économiques dans la loi des finances 2023. Et d’ajouter que l’appui des pays de l’Europe, notamment l’Italie, et des États-Unis va renforcer la probabilité d’obtention de ce crédit, précisant que la conclusion d’un accord avec le FMI ouvrira les portes devant la Tunisie pour conclure de nouveaux accords bilatéraux et multipartites avec d’autres bailleurs de fonds, tels que la Banque islamique, la Banque africaine de développement (BAD) et les pays du Golfe, et pour sortir sur le marché international et améliorer sa notation souveraine.

Des solutions alternatives existent

Hassan a indiqué que la situation économique difficile ne doit pas entraver l’exécution des réformes structurelles convenues avec le FMI, soulignant l’impératif d’accélérer l’amélioration du climat des affaires et de la compétitivité, d’instaurer l’équité fiscale, de lutter contre l’évasion fiscale l’économie parallèle, et de réformer le système de la subvention qui n’a pas encore commencé alors que cette réforme est décrétée dans la loi des finances 2023.

Pour l’expert économique, même si la Tunisie n’a pas obtenu à temps un crédit du FMI, des solutions alternatives existent. Le gouvernement peut émettre un emprunt obligataire en devises destiné à la diaspora pour qu’elle participe à la mobilisation des ressources de l’État, et en les incitant à booster l’économie nationale, d’autant plus que les transferts en devises de la diaspora vers la Tunisie en 2020 ont atteint 9,5 milliards de dollars, représentant près de 20% de la réserve en devises de la Tunisie.

Hassan a appelé aussi à exploiter les richesses souterraines de manière efficace, de résoudre le problème de transport de phosphate à travers les moyens traditionnels (les chemins de fer) et de réfléchir à d’autres solutions, notamment à travers les pipelines, de soutenir le secteur agricole, de rationaliser l’importation et de mettre à niveau le secteur touristique, à travers l’investissement dans la qualité et la formation.

L’État doit également prendre une décision concernant sa contribution dans les entreprises publiques, en prenant en considération son rendement économique avec la possibilité de se contenter des secteurs stratégiques vitaux et renoncer aux secteurs compétitifs, a conclu l’expert.

D’après Tap.

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