«L’été 2023 sera l’été de la soif», a affirmé l’expert en développement et en gestion des ressources à la Faculté des Sciences de Tunis, Hassine Rehili, lundi 27 mars 2023, dans une déclaration à l’agence Tap. Et de souligner les grandes difficultés qu’aura le pays en matière d’approvisionnement en eau potable durant la saison estivale. (Illustration: les barrages sont à 30% de leurs capacités).
«La situation hydrique actuelle dans le pays est très critique, les récentes coupures de l’eau dans plusieurs régions du Grand Tunis, du Cap Bon et du Sahel, opérées sans avis préalables, sont très logiques dans le cadre de la gestion des ressources d’eau disponibles», a indiqué l’expert, qui a, par ailleurs, relevé que les régions du sud et du centre ne s’approvisionnent pas des barrages, mais des nappes phréatiques, ce qui expose ces nappes à une surexploitation menaçant leur capacité à se renouveler, et les régions concernées à la sécheresse.
Situation difficile et choix douteux
Rehili a averti que le pays se trouve, pour la première fois, dans une situation aussi critique, à cause du déficit pluviométrique enregistré durant l’automne et l’hiver précédents. Lequel déficit a fortement impacté les réserves des barrages.
Il a, à cet égard, rappelé que le taux de remplissage des barrages se situent entre 30 à 32% à l’échelle nationale. Ce taux n’a pas dépassé 17% au niveau du barrage de Sidi Salem (Testour- Béjà) qui constitue le plus grand barrage du pays et dont les réserves n’ont jamais autant baissé depuis son entrée en exploitation au cours des années 80.
L’expert a indiqué que la Conférence des Nations Unies sur l’eau qui s’est tenue à New York du 22 au 24 mars 2023, a mis l’accent sur la situation délicate des ressources en eau dans le monde, à cause de la surexploitation des ressources disponibles et des effets des changements climatiques, affirmant que l’agenda d’action adopté lors de cette conférence comporte 700 mesures visant à préserver cette ressource.
Selon Rehili, l’une des recommandations de la conférence était de consacrer environ 300 milliards de dollars pour la mise en œuvre de ces mesures pour garantir l’accès à l’eau pour toute la population sur terre à l’horizon 2050.
La Tunisie est classée parmi les pays à la situation hydrique très délicate, compte tenu de la rareté des ressources en eau, tout au long de l’histoire du pays.
Revoir les priorités concernant l’eau
Le spécialiste regrette, par ailleurs, que la Tunisie n’ait pas ancré, durant les 50 années passées, une culture de rationalisation des eaux et des politiques préservant cette ressource vitale. Au lieu de cela, le pays s’est orienté vers des cultures grandes consommatrices d’eau et destinées en plus à l’exportation.
Rehili a, aussi, pointé du doigt le gaspillage de l’eau par le secteur industriel, les vides juridiques dans ce domaine et l’absence d’audits hydriques.
«Il est temps de revoir les priorités concernant l’eau, de donner la priorité à l’eau potable et de couper définitivement avec les activités agricoles destinées à l’exportation qui consomment de grandes quantités d’eau», a-t-il préconisé, recommandant l’adoption d’une nouvelle carte agricole, l’exploitation des eaux traitées dont le potentiel est estimé entre 350 et 400 millions m3 par an pour réduire la pression sur les eaux conventionnelles des barrages.
Rhili a plaidé en faveur de la mise en place d’un plan urgent pour réduire le gaspillage des eaux que ce soit dans les canaux d’irrigation ou d’eau potable et de créer un département ministériel spécifique à l’eau qui regroupera toutes les entreprises et structures en rapport avec l’eau.
Il faut également, d’après lui, ouvrir un débat avec la participation de tous les intervenants pour discuter de cette question vitale de l’eau.
D’après Tap.
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