Née en 1954, à Abidjan, en Côte d’Ivoire, Tanella Boni est poète, romancière, nouvelliste, critique littéraire et d’art. Professeure de philosophie, spécialiste d’Aristote et de Platon, elle enseigna à l’Université d’Abidjan.
Membre de nombreuses institutions académiques, comme poète, elle publia douze recueils, en France et en Côte d’Ivoire, dont certains récompensés de prix et de distinctions littéraires. Sa poésie est une interrogation philosophique, au centre de laquelle, l’être humain est invité à garder son humanité, malgré la violence et l’oppression. Le continent africain sur le front.
Quelques titres : Grains de sable, Ed. des Autres, 1993; Gorée, île de Baobab, Le Bruit des autres/Ecrits des Forges, 2004 ; Insoutenable frontière, Ed. Bruno Doucey, 2022.
Tahar Bekri
Où vas-tu de ce pas
Toi qui n’as pas fini la tâche immense
A toi réservée ici-même
Mais que veut dire ici-même
Ni un lieu ni un pays
A l’échelle humaine
Le temps est vulnérable
Il s’effrite à la seconde
Où je parle
La vie est si fragile
Qui s’efface s’évanouit
A la vitesse de l’éclair
Comment retrouver ses traces
Je n’ai pas la mesure du temps
A portée de main
Cette mesure t’a échappée à toi aussi
Elle n’existe pas
Chacun effleure son ombre
Chemin faisant
Un beau jour l’escalier s’arrête
Tu rates la montée de la dernière marche
Ton corps t’échappe en une seconde
Tu ne sais plus comment te relever
Tu ne peux imaginer que c’est la fin
De ton monde de ses bruits de ses couleurs
Un beau jour une nouvelle fenêtre
S’ouvre sur la rive où tu embarques
Tu te demandes si tu n’as jamais appris à nager
Mais tu n’as plus de voix plus de corps
C’est ton dernier rêve tout de blanc vêtu
Tu as perdu la verdure des arbres
Et la terre rougeâtre des savanes de l’enfance
Tu as perdu la chaleur du soleil au zénith
Tu ne sais plus quelle couleur porte la nuit
Mais tu gardes la clarté de ton esprit
Afin d’imaginer le chemin du retour
Extrait de Le poème n’est pas un objet perdu, Ed. Vallesse, Abidjan, 2022.
(Remerciements à l’auteure)
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