«Le développement du secteur de l’habillement et du textile par la mise à disposition de ressources qualitatives» est le thème choisi par la Chambre de commerce tuniso-belgo-luxembourgeoise (CCTBL) à l’occasion du forum qu’elle vient d’organiser le 27 avril courant à Monastir.
Près d’une centaine d’intervenants du secteur, locaux et représentants de pays partenaires, ont été conviés à débattre de la problématique afin de proposer des solutions et des recommandations à même d’assurer la pérennité et le développement d’une branche dont le développement doit nécessairement s’appuyer sur une main-d’œuvre hautement qualifiée dans un contexte marqué par une demande internationale de plus en plus exigeante qui interpelle les entreprises tunisiennes de la filière habillement et textile notamment sur l’importance de la qualité fournie.
Inaugurant les travaux du forum, Mondher Ben Sik Ali, gouverneur de Monastir, a lancé plusieurs recommandations dont notamment l’amélioration des conditions de travail dans le secteur de la confection pour qu’il préserve son attractivité auprès des jeunes.
Car malgré des réalisations en hausse en 2022 par rapport à 2021, le secteur manque cruellement de ressources humaines qualifiées, comme l’a rappelé Kaïs Fekih, président de la CCTBL, à l’ouverture des travaux du forum : «Ce secteur représente une part importante de notre économie et joue un rôle crucial dans l’emploi et la croissance de notre pays. Cependant, le manque de travailleurs qualifiés dans ce domaine est une source de préoccupations pour les entreprises et les décideurs économiques».
Hausse des exportations
Une problématique d’autant plus paradoxale que la filière habillement et textile s’est pourtant particulièrement distinguée en 2022 avec une augmentation remarquable du chiffre d’affaires de ses exportations à 9156 millions de dinars, soit une augmentation de 21% par rapport à 2021.
Par ailleurs et malgré cet essor, le secteur est marqué par des programmes de formation professionnelle non structurés comparés aux besoins des entreprises. En effet, le secteur enregistre l’arrivée d’une main-d’œuvre non qualifiée et peu motivée qui se redirige peu à peu vers d’autres filières, notamment les équipements automobiles qui offrent plus de perspectives d’évolution et de promotion professionnelle.
Le constat est par ailleurs inquiétant : les universités et les centres techniques produisent de moins en moins d’ingénieurs et de techniciens textile. De plus, l’immigration, la concurrence d’autres secteurs, le changement et l’évolution des notions du travail ainsi que la reconversion vers d’autres métiers offrant de meilleurs niveaux de rémunération interpellent sur les menaces qui pèsent sur la branche à court et moyen termes.
«Malgré ces défis, il existe des perspectives d’évolution pour le secteur de la confection. Tout d’abord, il est important de souligner que la Tunisie a déjà fait preuve d’une grande capacité d’adaptation et de résilience face aux défis économiques. En outre, le gouvernement a pris des mesures pour améliorer l’environnement des affaires, y compris des incitations pour encourager l’investissement dans la formation et la recherche & développement», a encore ajouté le président de la Chambre.
Parmi les recommandations émises lors du forum, il a été évoqué l’opportunité de se transformer en un secteur plus innovant et durable, en se concentrant sur la production de vêtements de haute qualité et respectueux de l’environnement, qui répondent aux besoins des consommateurs de plus en plus conscients de l’impact environnemental de leur consommation.
Une main-d’œuvre plus qualifiée
En matière de formation professionnelle et technique, il a été suggéré que le gouvernement continue à y investir pour encourager l’émergence d’une main-d’œuvre qualifiée et ainsi stimuler la croissance et le développement économique à long-terme. Il sera nécessaire pour ce faire de combler le fossé entre la formation professionnelle et les besoins réels constatés.
A ce propos, Saber Ben Kilani, représentant du ministère de l’Industrie, des Mines et de l’Energie, a déclaré que le département a préparé une stratégie nationale pour 2035 pour les secteurs porteurs dont celui du textile et de l’habillement. «L’idée est d’aider à disposer d’une vision claire par rapport aux orientations stratégiques futures», a-t-il expliqué.
En tout état et face à la conjoncture qui sévit et notamment la problématique du déficit en ressources humaines constaté, les professionnels ont proposé, toujours à l’occasion du forum de la CCTBL, un certain nombre de solutions et de préconisations concrètes. Il s’agit d’abord de se pencher sur la modernisation du secteur (industries et centres de formation) dans le contexte de l’industrie 4.0 et des nouvelles technologies. Ensuite, de s’orienter vers le textile technique à forte valeur ajoutée, encourager l’innovation et développer de nouvelles spécialisations. Pour y parvenir, il faudra de toute évidence investir dans l’innovation et l’automatisation des méthodes de travail. Cette approche permettra de réduire les coûts et d’augmenter la production.
De plus, la montée en compétence s’avère fondamentale. Elle porte sur la formation au numérique, la création d’environnement propice, l’engagement de processus de RSE / ESG et l’élaboration de stratégies de communication.
Là où le bât blesse également de l’avis de tous, ce sont les niveaux de salaires lesquels doivent être améliorés en même temps que les conditions de travail. Dans le même temps, il s’agira aussi de ne pas hésiter à renégocier les accords avec les donneurs d’ordre pour accompagner un nivellement vers le haut.
La nécessité d’un travail collaboratif entre les différents acteurs s’avère par conséquent nécessaire dans le but de mieux s’organiser. L’appui de l’Etat est crucial pour aider au développement du secteur. Il s’agit, entre autres pistes, de créer une «cellule SOS» au niveau du ministère de tutelle permettant d’écouter les problèmes des professionnels et d’essayer de trouver des solutions. Le secteur de l’industrie du textile de l’habillement compte en Tunisie 1 425 entreprises dont 1 151 qui produisent sous le régime totalement exportateur. Les entreprises employant 10 personnes et plus occupent 151 529 personnes dont 136 950 relèvent des entreprises totalement exportatrices et 14 579 de celles partiellement exportatrices.
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