Le poème du dimanche : ‘‘Bruits dans la ville’’ de Hassan Najmi

Né en 1960 à Benhmed au Maroc, Hassan Najmi est poète, romancier, chercheur, journaliste. Fondateur de la Maison de la poésie du Maroc, actuellement, président du PEN club international-Maroc.

C’est une voix qui compte dans le paysage poétique et littéraire marocain et arabe. A publié une dizaine de recueils.

Poésie dans la mêlée sociale, ouverte sur la poésie internationale. Son œuvre est couronnée de succès et de distinctions littéraires.

Quelques titres : Petite vie, 1995; Tombé à l’insu, Un Mal comme l’Amour, 2011.

Tahar Bekri

Le soir – dans la capitale

Le mur que j’aperçois depuis la fenêtre se met à s’obscurcir

(Image d’un mur qui s’enténèbre dans un vieux bagne)

Claquements de fenêtre qu’on ferme dans l’immeuble

(Il y a peu, les cellules ont été verrouillées. Grincement du portail de

fer)

Ce qu’il y a de plus beau à Rabat

Est que la nuit s’installe si tôt !

(Ce qu’il y a de plus beau dans une prison est que l’on quitte le

monde, les hommes !)

Il n’y a plus rien à craindre

Ici, tous les maux nichent derrière les portes

Les prisonniers sont là

Les hommes libres aussi

Et nous –

Nous en qui l’espoir a pourri

Nous parlons à demi-mots

Aimons juste avec la moitié du cœur 

Avec la moitié du poumon

Et à mesure

Nous qui avions écorché nos gorges

– Notre voix ayant baissé d’un ton –

Avons un timbre enroué comme dans un chant ivre

Nous épargnons nos derniers souffles

Et chantons toute la nuit

Et au petit matin

Nous faisons une courte promenade dans la prison sous le soleil

Et quand à nouveau le mur s’obscurcit –

Nous reprenons le chant

Personne n’entend nos demi-voix

Là-bas dans les cellules du vieux pénitencier. Ici, dans la capitale

Trad. par Rachid Khaless et Asmae Khalla

Un Mal comme l’Amour, 2011 (Préface de Tahar Ben Jelloun).

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