Lundi 8 avril 2024, la Cour internationale de justice (CIJ) à La Haye a ouvert les audiences publiques concernant la demande de mesures provisoires présentée par le Nicaragua contre l’Allemagne le 1er mars. L’État d’Amérique centrale accuse le pays européen, qui a du mal à solder son passé nazi, entaché du sang des juifs qu’il avait massacrés lors de la seconde guerre mondiale, de «faciliter le génocide» contre les Palestiniens dans la bande de Gaza par le biais de son soutien militaire et politique à Israël.
Par Imed Bahri
Le Nicaragua a présenté lundi le recours de 43 pages tandis que ce mardi l’Allemagne répondra devant la plus haute instance judiciaire des Nations Unies.
Le Nicaragua a demandé à la CIJ d’imposer des mesures provisoires pour pousser Berlin à cesser de fournir des armes à Israël et à revenir sur sa décision de cesser de financer l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA) et a souligné que l’adoption de ces mesures est nécessaire et urgente pour protéger la vie de centaines de milliers de personnes à Gaza.
Il faut rappeler que les mesures provisoires sont des ordonnances d’urgence imposées par la CIJ en attendant que l’affaire soit instruite et que le verdict soit rendu.
Le représentant nicaraguayen Carlos José Arguello Gomez a déclaré devant la Cour que l’Allemagne avait violé la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948 en continuant à fournir des armes à Israël après que les juges de la CIJ eurent statué qu’il est possible qu’Israël ait violé certains droits garantis par la Convention sur le génocide lors de son attaque contre Gaza. Arguello Gomez a ajouté: «Il ne fait aucun doute que l’Allemagne était bien consciente et connaissait bien au moins le grand danger de commettre un génocide dans la bande de Gaza».
Berlin responsable du génocide à Gaza
L’équipe juridique du Nicaragua a déclaré devant la CIJ que l’Allemagne était responsable du génocide à Gaza car elle continuait à soutenir Israël avec des armes malgré sa connaissance de la possibilité de commettre un génocide. Elle a ajouté que l’Allemagne facilite les violations israéliennes au lieu d’augmenter l’aide humanitaire à la population de Gaza.
Dans sa plaidoirie, l’équipe juridique a rappelé que le soutien militaire allemand à Israël a décuplé au cours des derniers mois et que le gouvernement allemand a exporté du matériel militaire vers Israël pour une valeur de 326 millions d’euros en 2023.
Le Nicaragua a demandé de forcer l’Allemagne à cesser de soutenir Israël dans la destruction de la Palestine en plus de l’obliger à revenir sur sa décision de suspendre le financement de l’UNRWA sachant que l’Allemagne est le deuxième bailleur de fond de cette agence onusienne après les États-Unis mais elle ne lui a pas versé un seul dollar cette année sachant que la population palestinienne à Gaza est en proie à la famine.
En revanche, le ministère allemand des Affaires étrangères a rejeté les accusations portées contre lui par le Nicaragua de violation de la convention sur le génocide et du droit international humanitaire en fournissant des armes à Israël pendant sa guerre dans la bande de Gaza. Le porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères Sebastian Fischer a déclaré aux journalistes avant l’ouverture des audiences: «Nous rejetons les accusations nicaraguayennes», estimant que l’Allemagne n’a violé ni la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide ni le droit international humanitaire.
Le recours du Nicaragua devant la CIJ est basé sur la plainte de génocide intentée par l’Afrique du Sud contre Israël. La CIJ a ordonné à Israël de prendre les mesures nécessaires pour prévenir les actes de génocide et a récemment renforcé sa position en exigeant des mesures supplémentaires obligeant Tel-Aviv à accroître les possibilités d’acheminement de l’aide humanitaire à la bande palestinienne assiégée depuis 17 ans.
L’Occident barbare doit rendre des comptes
Bien que les décisions de la CIJ soient contraignantes, la Cour ne dispose d’aucun mécanisme pour les faire appliquer. Cependant, voir les pays dits puissants comme l’Allemagne sur le banc des accusés et rendre des comptes sur leurs décisions politiques comme de mauvais élèves qui passent devant un conseil de discipline est une bonne chose car ces pays font d’habitude ce qu’ils veulent au mépris des valeurs qu’ils prétendent défendre, ne rendent aucun compte et continuent de donner des leçons à la terre entière.
De plus l’indignation et la compassion sélectives des pays occidentaux ont scandalisé une bonne partie de l’opinion publique mondiale car c’est la solidarité sans faille quand il s’agit de l’Ukraine ou d’Israël mais quand il s’agit des Palestiniens, le ton change. Aucune condamnation de la barbarie israélienne, aucune qualification juridique de ce que perpètre Israël à Gaza depuis maintenant plus de six mois. Le terme génocide est encore tabou en Occident.
Quant au Nicaragua, modeste pays d’Amérique centrale, il fait honneur à la communauté internationale et aux pays du Sud par son humanisme et son sens de la responsabilité alors que les pays arabes voisins de la Palestine et qui lui sont liés par l’Histoire, la langue et la religion ne bougent pas le petit doigt ni devant les juridictions internationales ni en finançant les besoins vitaux des Palestiniens et continuent de traîner les pieds pour financer l’UNRWA.
Le Nicaragua comme d’autres pays de l’Amérique latine à l’instar de la Colombie, du Brésil et de la Bolivie se distinguent par un soutien infaillible au peuple palestinien martyrisé par la machine de guerre… occidentale, car Israël n’est, en fin de compte, qu’un poignard de l’Occident barbare pointé dans le corps du monde arabe, et à travers lui, du tiers-monde dans son ensemble.
Donnez votre avis