L’Académie diplomatique internationale de Tunis a reçu le 16 février 2024, Barbara K. Bodine, actuellement directrice de l’Ecole de politique étrangère de l’Université de Georgetown, à Washington DC.
Par Raouf Chatty *
Professeure universitaire distinguée spécialisée dans les pratiques diplomatiques, Mme Bodine a parlé du «métier de diplomate» aux cinquante élèves qui formeront la première promotion de diplomates issus de l’Académie diplomatique tunisienne, et qui seront appelés, dans deux ans, à exercer leur profession au ministère des Affaires étrangères à Tunis et dans les missions diplomatiques et consulaires de la Tunisie à l’étranger. Elle était à l’occasion accompagnée de l’ambassadeur américain en Tunisie, Joey Hood. Simple coïncidence, elle est intervenue quelques semaines après le ministre des Affaires étrangères chinois Wang Yi qui a assisté à l’inauguration officielle de l’Académie, dont la Chine a financé entièrement la construction et l’équipement par un don de 74 millions de dinars.
En invitant Mme Bodine, les autorités tunisiennes ont fait d’une pierre deux coups. Elles ont montré en premier lieu que la Tunisie est toujours fidèle à ses relations traditionnelles avec les États-Unis d’Amérique, qu’elle est attachée de façon indéfectible aux valeurs libérales de la démocratie, des droits de l’homme et de la bonne gouvernance, et en deuxième lieu, qu’elles veulent donner l’occasion à ses jeunes diplomates de se familiariser avec l’expertise américaine en matière de pratiques diplomatiques. Et elles ont vu juste.
En effet, ces diplomates en herbe ne pouvaient trouver meilleur exemple que celui de Mme Bodine, qui dirige aujourd’hui l’école diplomatique relevant d’une célèbre université états-unienne. Elle possède une vaste expertise diplomatique de terrain, puisqu’elle avait travaillé, durant de nombreuses années, dans des environnements complexes et extrêmement difficiles nécessitant un grand de sens de l’écoute, des qualités de négociateur patient et ouvert à l’autre.
La biographie de Mme Bodine reflète une solide connaissance de la Chine et de l’Iran, deux pays qui ne comptent pas parmi les grands amis des Etats-Unis, et un parcours diplomatique riche et fourni des pays arabes du Golfe dans des contextes très difficiles en relation avec le Yémen et l’Irak, avant et post guerre, ainsi que le Koweït lors de l’invasion irakienne, en 1992, tout comme une connaissance profonde de l’actualité internationale, des questions sécuritaires, du contre terrorisme et des enjeux du développement…
Pour les futurs diplomates, l’occasion était donnée, lors de la discussion avec la professeure et diplomate américaine, de savoir que le métier de diplomate nécessite, outre la connaissance solide de l’histoire, de la culture, de l’économie et de la géopolitique des Etats et des régions où ils sont en poste, beaucoup d’autres ressources, dont, notamment, une forte personnalité, l’ouverture d’esprit, l’amour de la profession, la curiosité discrète, le sens de la mesure, l’ouverture sur l’autre, la souplesse, la patience, le sens de l’écoute, le sens des contacts, la disponibilité, le goût pour le travail de terrain, la maîtrise des langues étrangères, autant d’atouts pour permettre au diplomate de remplir au mieux sa mission au service de son pays et de la paix mondiale d’une façon générale.
La présence de Mme Bodine aura été une excellente occasion confirmant la volonté des autorités tunisiennes de conférer à cette nouvelle académie une dimension réellement internationale au service du rayonnement de la Tunisie.
L’espoir est aujourd’hui grand de voir cette académie s’ouvrir à toutes les compétences, tunisiennes et étrangères, dans tous les domaines et aller de l’avant dans la réalisation des objectifs pour lesquels elle avait été mise en place. On lui souhaite bonne continuation après cet excellent départ.
* Ancien ambassadeur.
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