Né à Tunis en 1947, Hubert Haddad, est poète, romancier, peintre, essayiste. Auteur d’une œuvre importante et multiforme, il fonde en 1969, la revue de poésie Le Point d’être dans la mouvance du surréalisme. (Ph. Zulma).
Impliqué dans son engagement d’intellectuel et d’artiste, Hubert Haddad publie le roman, Palestine (Prix Renaudot Poche). Depuis 2016, il est l’initiateur et rédacteur en chef d’Apulée, revue annuelle et internationale, de littérature et de réflexion, qui traite du monde d’une manière décentrée et nomade, surtout concernant l’Afrique et la Méditerranée.
L’œuvre de Hubert Haddad est couronnée de nombreuses distinctions. Dont : Peintre d’éventail; La Verseuse du matin (Dumerchez); Un monstre et un chaos; L’invention du diable; Peintre d’éventail (Zulma).
Tahar Bekri
«La terre se nourrit d’empreintes. Le ciel se nourrit d’ailes» (Miguel Angel Asturias).
La clé du vent, le vent la perd. Il n’y a pas d’identité bien ancrée ; on naît chrétien, juif ou musulman comme l’eau du ciel dans le fleuve ou la mer. La seule image qui demeure pour moi, c’est la silhouette du djebel Boukornine à travers les vapeurs bleues du golfe de Carthage – si semblable au Vésuve dans la baie de Naples. L’enfance est un volcan qui peu à peu vous recouvre des cendres tremblées de l’oubli. Je ne me souviens que des quatre éléments, la terre ocre, l’onde aux cent couches d’azur, l’air étourdissant de senteurs et ce feu du soleil sur toutes choses. Ni l’air ni l’onde ou le feu ne peuvent se saisir : le domaine des djinns et des esprits ne s’appuie sur aucune terre. Le sol est notre lot, pauvres humains qui passons comme passent les fleurs et les cités.
***
verrai-je toujours les nuages
m’aimera-t-on un peu dans les cendres
est-ce que je pourrais crier demain je t’aime aux inconnues
mais je n’aurais plus de nom pour trouver mon chemin
il n’y aura personne pour me montrer la voie
il n’y aura plus de voie
des enfants perdus peut-être chanteront devant moi
la mélodie de l’oubli qui creuse la mémoire
humain dans le passé, je ne suis plus qu’une ombre
je marche à jamais seul à côté de mon frère
la mort a brisé les sceaux de l’au-delà
***
L’horloge de ton ombre me dira l’heure
et la destinée
Il court sans laisser d’empreinte l’amoureux
Il distribue au hasard le courrier des mortes
Il s’est noyé dans le fleuve Amour
Ses ailes brisées en plein vol
Par les baleines du couchant
***
un vieux roi au fond du tombeau
règne sur les racines des arbres
mémoire fictive des passions
(le gris, la pluie, rien n’avait changé)
les visages sont des livres clos
un miroir caché résonne
dans l’admirable silence de la lumière
(Remerciements à l’auteur)
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