Le procès de dizaines de personnalités accusées de complot contre l’État, parmi lesquels de grands noms de l’opposition au président Kaïs Saïed, s’est ouvert hier, mardi 4 mars 2024, à Tunis, une procédure exceptionnelle dénoncée comme «un règlement de compte politique» par les militants des droits de l’homme. Les audiences, assez mouvementées, ont été reportées au 11 avril prochain, à la demande de la défense.
Dirigeants de partis, avocats, personnalités du monde des affaires et des médias : au total une quarantaine de personnes font l’objet de poursuites pénales pour «complot contre la sécurité intérieure et extérieure de l’État» et «appartenance à un groupe terroriste». De telles accusations entraînent de lourdes peines de prison, pouvant aller jusqu’à la peine de mort.
Selon la défense, certains suspects sont accusés d’avoir eu des contacts suspects avec des diplomates. Human Rights Watch (HRW) a exhorté les autorités tunisiennes à libérer «immédiatement» toutes les personnes «arbitrairement détenues» dans cette affaire et à «mettre fin à cette parodie» de justice.
Le procès est extraordinaire par son ampleur et l’identité des accusés, dont beaucoup sont des militants historiques, d’anciens ministres et députés, des hommes d’affaires et des personnalités médiatiques bien connues.


Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a dénoncé ce qu’il a qualifié de «persécution des opposants», affirmant que nombre d’entre «font l’objet de vagues accusations». Les autorités tunisiennes n’ont pas manqué d’exprimer leur «profonde stupéfaction» après ces critiques, selon elles infondées.
Hier, la salle d’audience était bondée. L’avocat et militant Ayachi Hammami, parmi les prévenus, a déclaré au juge qu’il «refuse de participer à cette farce», tandis que les proches des autres prévenus en détention provisoire, en majorité absents – l’autorité judiciaire ayant décidé de les entendre par visioconférence, disposition durement dénoncée par la défense – agitaient leurs portraits et scandaient des slogans contre une «justice sous ordre».
L’avocat Abdelaziz Essid a appelé à «mettre fin à cette folie». Après l’ajournement de l’audience, les juges ont rejeté la demande de libération des accusés, a indiqué à l’AFP l’avocate Dalila Ben Mbarek Msaddek, sœur de l’un des prévenus, Jawher Ben Mbarek, incarcéré depuis deux ans.
I. B.
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