Poète né en 1951 à Gabès, en Tunisie. Vit à Paris. Ecrit en français et en arabe. Tahar Bekru a publié une trentaine d’ouvrages (poésie, essais, livres d’art). Son œuvre poétique, publiée depuis 1983, est traduite dans de nombreuses langues, fait l’objet de travaux universitaires et de créations artistiques.
Prix de l’Académie française du Rayonnement de la langue et la littérature française, 2019, Tahar Bekri est membre de l’Académie des Jeux floraux, Toulouse, 2022, maître de conférences honoraire, Université Paris-Nanterre.
Dernières publications : Chants pour la Tunisie, Al Manar, 2023; Par-delà les lueurs, Al Manar, Paris, 2021; Désert au crépuscule, Al Manar, 2018; Le livre du souvenir, Elyzad, Tunis, 2016; La nostalgie des rosiers sauvages, Al Manar, 2014.
Par-dessus lui
Le ciel est réveillé par les avions militaires
L’orage et le tonnerre
Il entend parler de guerre d’inflation
De spéculation et de vie chère
Le monde éclaté comme une grenade
Ses grains rouge-sang
Les puissants veulent agrandir leur empire
Les faibles partent en mer et font naufrage
Il entend parler de réchauffement climatique
De gaz de schiste d’énergie fossile de pétrole et de chantage
D’incendies de forêts parties en fumée
De sècheresse de maison qui brûle
De nuées de sauterelles et de criquets
Qui ravagent tout sur leur passage
De tornades de cyclones de tremblements de terre
De blés qui moisissent dans les ports
De montagnes qui perdent leurs neiges
De glaciers qui s’effritent qui errent
De mer qui s’élève qui avance qui mange la terre
De falaises qui s’érodent de sources qui tarissent
De fleuves à sec de fleuves dérobés
D’eaux volées de mers disparues
D’ours qui meurent de faim
De baleines qui échouent sur les rivages
De loups qui s’approchent des villes
Les puissants eux se barricadent construisent des murs
Elèvent des tours d’argent
Les faibles font la traversée du désert sont mis dans des camps
Dorment à la belle étoile se couvrent de la nuit
Payent leur dû aux nouveaux sang-sus
Lui comme un enfant
Plante une graine de pommier à sa fenêtre
La voilà qui pousse
Il voit grandir son pommier
Le salue chaque jour
Le protège contre le vent la grêle et la tempête
La sècheresse et le fracas du monde
Le pommier pousse s’enracine
Ses feuilles sont vertes sa tige plus solide
Il parle au pommier lui demande s’il a soif
S’il a besoin d’ombre ou de soleil
S’il est bien entouré sans mauvaises herbes
Il ne peut le laisser à l’abandon
Il l’emmène dans sa terre avec sa terre
Pour être plus à l’aise
Demande qu’on le plante ailleurs
Qu’on veille sur lui
Dans une terre plus grande plus épanouie
S’il se maintient en vie
Appelez-le le Résistant
Dit-il …
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