Les discussions techniques ayant bien avancé, les négociations proprement dites de la Tunisie avec le Fonds monétaire international (FMI) pour un nouveau prêt de 4 milliards de dollars vont-elles être bientôt lancées ? La cheffe de gouvernement Najla Bouden l’espère bien, d’autant que son gouvernement ne sait pas encore comment boucler le budget de l’Etat pour l’exercice 2022, et qui ne saurait l’être sans un bol d’oxygène du FMI.
Par Imed Bahri
Les négociations attendues ont fait l’objet de la rencontre, mardi 21 juin 2022, à la Kasbah, entre Mme Bouden et le directeur du département Moyen-Orient et Asie centrale du FMI, Jihad Azour, au cours de laquelle la Première ministre a présenté l’approche adoptée par son gouvernement pour la mise en œuvre des réformes à moyen et court terme envisagées dans le cadre de l’accord de prêt espéré.
Importance de la dimension participative, dit-elle ?
Selon un communiqué du Premier ministère, Mme Bouden a souligné l’importance de la dimension participative adoptée par le gouvernement pour assurer la bonne mise en œuvre desdites réformes, en passant en revue les axes du programme de stabilité économique et financière, ainsi que les nouvelles stratégies sectorielles pour développer la structure économique et dynamiser l’entrepreneuriat pour créer des emplois pour les diplômés. Mais pas seulement, le chômage touchant plus de 700.000 personnes, soit 17% de la population active, dont près de 250.000 diplômés. Un paquet stable, sinon en légère augmentation depuis 2011, en raison de la décélération du rythme de la croissance.
M. Azour a souligné, de son côté, la force des relations de coopération entre la Tunisie et le FMI – l’accord relatif au Plan d’ajustement structurel (PAS) de 1986 ayant permis à la Tunisie de sortir de la crise et de renouer avec la croissance -, ainsi que l’importance des consultations entre les deux parties.
L’intransigeance de l’UGTT pèse sur les discussions
Il n’en reste pas moins qu’au-delà des déclarations officielles, soporifiques à souhait, le spectre du rejet exprimé par l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) de toutes les réformes envisagées par l’Etat continue de peser sur un hypothétique accord entre la Tunisie et le FMI, lequel avait exigé l’accord préalable de l’UGTT comme une condition sine qua non pour tout nouvel accord, d’autant que la Tunisie a failli à tous engagements pris dans le cadre de ses précédents accords avec le FMI à cause, justement, de la non implication voire de l’opposition catégorique de l’UGTT.
Les deux parties vont-elles courir le risque de passer outre cet accord préalable avec la centrale syndicale, impossible à obtenir, eu égard l’intransigeance dont font preuve les dirigeants de l’UGTT?
C’est, en tout cas, la seule solution qui reste pour faire aboutir un accord vital pour la Tunisie, étant donné la rupture du dialogue entre la Kasbah et la Place Mohamed Ali.
Il convient cependant de rappeler à ce propos que l’accord relatif au PAS en 1986 n’a pas eu à passer par l’aval préalable de l’UGTT et que toutes les réformes mises en œuvre par l’ancien président Ben Ali dans les années 1990 – et notamment la privatisation de dizaines d’entreprises publiques – étaient passées comme une lettre à la poste. On n’avait pas entendu, à l’époque, des récriminations de la part de l’UGTT. Et le pays avait beaucoup gagné de la relance de la croissance qui suivit (5 à 7% du PIB annuellement pendant une vingtaine d’années). Mieux encore, la classe ouvrière avait beaucoup gagné en pouvoir d’achat.
Reste qu’une telle option exige un Etat fort et capable d’aller jusqu’au bout de ses idées, sans hésiter ni trembler face aux surenchères politiques et syndicales. Car l’UGTT d’aujourd’hui n’est plus simplement un syndicat. Il est devenu carrément la principale force d’opposition dans le pays aux pieds de laquelle se prosternent des partis impopulaires, sans envergure et sans crédibilité.
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